La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2021 | FRANCE | N°19VE00824

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 02 mars 2021, 19VE00824


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'ordonner la restitution à son profit, au titre du plafonnement des impôts directs à 50 % des revenus des années 2007 à 2010, des sommes de 89 940 euros, 87 474 euros, 130 423 euros et 124 551 euros.

Par une ordonnance n° 1709085 du 17 janvier 2019, le président de la 5e chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2019, Mme D...,

représentée par Me F. Piro et Me A...-J. Piro, avocats, demande à la cour :

1° d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'ordonner la restitution à son profit, au titre du plafonnement des impôts directs à 50 % des revenus des années 2007 à 2010, des sommes de 89 940 euros, 87 474 euros, 130 423 euros et 124 551 euros.

Par une ordonnance n° 1709085 du 17 janvier 2019, le président de la 5e chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2019, Mme D..., représentée par Me F. Piro et Me A...-J. Piro, avocats, demande à la cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° de prononcer la restitution des sommes demandées au titre des années 2007 à 2010 et d'assortir ces sommes des intérêts moratoires ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le président de la 5e chambre du tribunal administratif de Versailles ne pouvait considérer que sa demande était manifestement irrecevable, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, dès lors qu'elle soutenait que sa demande était recevable en application des dispositions de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales et qu'il y avait lieu de s'interroger, dans le cadre d'une décision collégiale, si le jugement du tribunal administratif de Versailles du 28 mars de 2014 était de nature à constituer un événement susceptible de rouvrir les délais de réclamation ;

- l'ordonnance attaquée n'est pas motivée et ne répond pas aux moyens soulevés ;

- à titre subsidiaire, le dégrèvement d'office de l'impôt sur le revenu et les contributions sociales prononcé par l'administration pour les années 2008 à 2012 aurait dû entraîner automatiquement un dégrèvement lié au plafonnement des impôts directs ; ne pas prononcer un tel dégrèvement est constitutif d'un enrichissement sans cause au profit du Trésor.

....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de M. Met, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration a réintégré dans ses revenus imposables les sommes qu'elle a perçues en 2006 et 2007 en exécution de contrats d'assurance-vie conclus par son époux décédé en 2000. Elle a, par ailleurs, demandé le 18 décembre 2008 le plafonnement des impôts directs à 50% de ses revenus au titre de la seule année 2006. Par un jugement du 28 mars 2014, confirmé par un arrêt de la cour du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Versailles a exclu de l'assiette des traitements et salaires de Mme D... les sommes versées en 2006 et 2007 en application des contrats d'assurance-vie souscrits par son époux, l'a déchargée des impositions consécutives et, accordé le plafonnement des impôts directs pour l'année 2006. Le 13 novembre 2014,

Mme D... a présenté une réclamation tendant à obtenir le plafonnement des impôts directs à 50 % de ses revenus et, par voie de conséquence, la restitution partielle des cotisations d'impôt sur le revenu qui en résulterait, au titre des années 2007 à 2010. Mme D... relève régulièrement appel de l'ordonnance par laquelle le président de la 5e chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande au motif qu'elle était manifestement irrecevable au sens des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 1er du code général des impôts, alors applicable : " Les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent être supérieurs à 50 % de ses revenus. / Les conditions d'application de ce droit sont définies à l'article 1649-0 A ". Aux termes de l'article 1649-0 A, alors applicable : " 1. Le droit à restitution de la fraction des impositions qui excède le seuil mentionné à l'article 1er est acquis par le contribuable au

1er janvier de la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4. / (...) / 8. Les demandes de restitution doivent être déposées avant le 31 décembre de la deuxième année suivant celle de la réalisation des revenus mentionnés au 4 (...) ". L'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales dispose : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / (...) / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation / (...) ".

4. Une demande de restitution de la fraction des impositions qui excède 50 % des revenus constitue une réclamation tendant à obtenir le bénéfice d'un droit au sens de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales. Le délai particulier prévu par le 8 de l'article 1649-0 A du code général des impôts pour formuler une demande de restitution ne fait pas obstacle à ce que soit invoquée, après l'expiration de ce délai, la réalisation d'un événement qui motive la réclamation, au sens de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales.

5. Il résulte de ses écritures de première instance que Mme D... avait soutenu devant le tribunal administratif que sa réclamation ne pouvait être regardée comme tardive au regard des dispositions de l'article R. 196-1 du livres des procédures fiscales, dès lors qu'elle tendait à la restitution partielle des impositions mises à sa charge au titre des années 2007 à 2010, sur le fondement du dispositif prévu par les dispositions précitées de l'article 1649-0 A du code général des impôts, suite au jugement rendu par le tribunal administratif de Versailles du 28 mars 2014, confirmé par la cour administrative d'appel de Versailles le 31 décembre 2015. Elle faisait valoir que ce jugement, comme l'arrêt de la cour, avait considéré que les sommes qu'elle avait perçues en application des contrats d'assurance vie souscrits par son défunt mari constituaient le remboursement d'une partie du capital de ce contrat et ne pouvaient, par suite, être regardées comme un revenu imposable, ce qui était constitutif d'un évènement de nature à motiver sa réclamation au sens du c) de cet article. Ces éléments constituaient une critique circonstanciée et argumentée des motifs par lesquels l'administration avait regardé comme tardive sa réclamation. Par suite, en rejetant sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 222-1 du code de justice administrative sa demande comme entachée d'une irrecevabilité manifeste, le président de la 5e chambre du tribunal administratif de Versailles a entaché son ordonnance d'irrégularité. Celle-ci doit, par suite, être annulée.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Versailles :

Sur la recevabilité de la demande de première instance de Mme D... :

7. Par application des dispositions du 8 de l'article 1649-0 A du code général des impôts, citées au point 3, le délai de demande de restitution de la fraction des impositions acquittées par Mme D... excédant le plafonnement des impôts directs à 50 % de ses revenus, expirait le 31 décembre 2009 pour les revenus imposés au titre de l'année 2007, le

31 décembre 2010 pour les revenus 2008, le 31 décembre 2011 pour les revenus 2009 et le

31 décembre 2012 pour les revenus 2010. Il résulte de l'instruction que Mme D... a adressé à l'administration fiscale, dans le délai légal, des demandes de restitution de la fraction de l'impôt sur le revenu, supérieure au seuil de 50 %, au titre des années 2007 à 2009, sans contester les décisions rendues sur ses demandes, et qu'elle n'a pas présenté dans ce délai de demande de plafonnement de ses impositions pour l'année 2010. Le 13 novembre 2014, Mme D... a présenté une demande de restitution complémentaire au titre des années 2007 à 2010, tenant compte du jugement du 28 mars 2014, par lequel le tribunal administratif de Versailles a prononcé la décharge des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 2006 et 2007 au motif que les sommes qu'elle avait perçues en application des contrats d'assurance-vie souscrits par son défunt mari constituaient le remboursement d'une partie du capital versé par l'assuré et devaient être exclues de l'assiette des traitements et salaires. Il est constant que cette demande a été présentée postérieurement à l'expiration du délai prévu au 8 de l'article 1649-0 1 du code général des impôts. Mme D... soutient que ce jugement constitue un événement au sens du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, de nature à rouvrir le délai de réclamation qui lui était ouvert. Toutefois, les événements susceptibles de rouvrir le délai de réclamation en application du c) de ces dispositions sont ceux qui sont de nature à exercer une influence sur le principe même de l'imposition, son régime ou son mode de calcul. Tel n'est notamment pas le cas d'une décision juridictionnelle relative à des impositions portant sur des années différentes. En l'espèce, le jugement du 13 novembre 2014 qualifiant les sommes reçues par Mme D... au titre des années 2006 et 2007 de remboursement en capital ne peut être regardé comme ayant eu une incidence directe sur le principe, le régime ou le mode de calcul de ses impositions acquittées au titre des années 2008 à 2010. Ce jugement ne saurait pas plus constituer l'évènement prévu au c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales de nature à justifier sa demande de restitution au titre de l'année 2007, dès lors que Mme D... aurait pu, sans son intervention, comme elle l'a fait pour l'année 2006, contester la décision d'admission partielle de la demande de restitution qui lui a été notifiée le 6 avril 2010 avec mention des voies et délais de recours. Par suite, la réclamation présentée par Mme D... le

13 novembre 2014 était tardive et sa demande introduite devant le tribunal administratif de Versailles irrecevable.

8. Si Mme D... soutient que le dégrèvement d'office de ses cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des année 2008 à 2012 aurait dû entraîner le dégrèvement d'office de la fraction d'impôt sur le revenu, supérieure au seuil de 50 %, la décision par laquelle le directeur général des finances publiques décide de prononcer un dégrèvement ou une restitution d'office sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 211-1 du livre des procédures fiscales présente un caractère purement gracieux et dont il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier l'usage. Par suite, ce moyen ne peut qu'être rejeté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de Mme D... doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant au versement des intérêts moratoires et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1709085 du 17 janvier 2019, du président de la 5e chambre du tribunal administratif de Versailles est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Versailles et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

2

N° 19VE00824


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00824
Date de la décision : 02/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-02-02-02 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Réclamations au directeur. Délai.


Composition du Tribunal
Président : Mme DORION
Rapporteur ?: Mme Catherine BOBKO
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : SCP BERSAGOL, PIRO et PERROT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-03-02;19ve00824 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award