La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2020 | FRANCE | N°17VE03739

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 10 décembre 2020, 17VE03739


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BIONERVAL a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge de la somme de 146 901,84 euros correspondant au montant de la prime à l'efficacité versée pour la période 2013-2014 dont la société EDF lui demande le remboursement et de mettre à la charge de la société EDF la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1503546 du 9 octobre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette de

mande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires complémentair...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société BIONERVAL a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge de la somme de 146 901,84 euros correspondant au montant de la prime à l'efficacité versée pour la période 2013-2014 dont la société EDF lui demande le remboursement et de mettre à la charge de la société EDF la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1503546 du 9 octobre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés respectivement les

12 décembre 2017, 14 février 2019 et 18 juin 2020, la société BIONERVAL, représentée par

Me B..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge de la somme de 146 901,84 euros dont la société EDF lui demande le versement au titre du remboursement de la prime à l'efficacité énergétique perçue pour la période 2013/2014 ;

3° de mettre à la charge de la société EDF une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a inexactement qualifié la somme en litige en retenant qu'elle constituait la réparation du préjudice subi par EDF alors qu'il s'agit d'une sanction contractuelle ; la société EDF n'a jamais allégué avoir subi un préjudice ;

- le tribunal a implicitement mais nécessairement jugé que l'absence de plombage des analyseurs en CH4 constituait une violation des stipulations du contrat alors qu'il s'agissait d'équipements supplémentaires qui n'entraient dans le cadre du contrat ; en ce qui concerne le compteur installé pour répondre aux obligations contractuelles, le rapport de la société Dekra indique qu'il est conforme (point 6.3.3 du rapport d'audit) ;

- la sanction est injustifiée et disproportionnée ; la mise en oeuvre de pénalités en cas de non-conformité des installations ne présente aucun caractère automatique ; le point 1.4 de l'article VII des conditions générales du contrat d'achat stipule que le remboursement des montants qui seraient indûment perçus ne présente qu'un caractère éventuel ; les non-conformités présentent un caractère extrêmement mineur ; le site d'Etampes connaît une situation économique difficile concrétisée par des pertes d'exploitation significatives ;

- la demande de remboursement a été prise en méconnaissance des droits de la défense en l'absence de mise en demeure préalable ; la procédure de règlement amiable de l'article XIII des conditions générales du contrat n'a pas constitué une garantie équivalente dès lors que la société EDF ne lui a pas communiqué le rapport d'audit sur lequel elle s'est fondée ;

- la demande de remboursement a été prise en méconnaissance du principe d'égalité de traitement entre producteurs.

------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 ;

- le décret n° 2001-410 du 10 mai 2001 ;

- l'arrêté du 19 mai 2011 fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations qui valorisent le biogaz ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,

- les observations de Me B..., pour la société BIONERVAL et de Me A..., pour la société Electricité de France.

Considérant ce qui suit :

1. La société BIONERVAL, qui exploite une installation de méthanisation pour la valorisation énergétique de biodéchets, a conclu le 4 octobre 2012 un contrat d'achat d'énergie électrique avec Electricité de France (EDF). Conformément au point 1.4 de l'article VII des conditions générales applicable au contrat, EDF a fait procéder à la vérification de la conformité de l'installation. A la suite de l'audit mené en octobre 2014 par la société Dekra, la société EDF a indiqué à la société BIONERVAL, par deux courriers du 2 février 2015 et 13 mai 2015, qu'en raison plusieurs non-conformités, elle était tenue de rembourser la prime à l'efficacité énergétique versée au titre de l'année 2014/2015 d'un montant de 146 901,84 euros. Saisi par la société BIONERVAL, le juge des référés du Tribunal administratif de Versailles a, par une ordonnance du 21 juillet 2015, suspendu la demande de remboursement de la prime. La société EDF a formé en vain un pourvoi en cassation à l'encontre de cette ordonnance. La société BIONERVAL a saisi le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à la décharge de la somme de 146 901,84 euros. Par la présente requête, elle relève appel du jugement du 9 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si la société BIONERVAL soutient que le tribunal a inexactement qualifié la somme en litige, un tel moyen se rattache au raisonnement suivi par la juridiction et est sans incidence sur la régularité du jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes des stipulations du 5 des conditions particulières du contrat d'achat de l'énergie électrique produite par les installations valorisant le biogaz et bénéficiant de l'obligation d'achat électrique applicable au litige : " Tarif d'achat. (...) 5.3 Prime à l'efficacité énergétique Pe. Le montant de la prime à l'efficacité énergétique Pe à la date de prise d'effet du présent contrat est égal à : 4,117 c€/kWh ". Aux termes de l'article VII, § 1-4 des conditions générales du contrat : " (...) Les non-conformités constatées ont pour conséquence la perte des permis Pe et Pr et le remboursement éventuel des montants indûment perçus (...) ". Aux termes de l'avenant n° 1 au contrat du 4 octobre 2012 : " (...) Les caractéristiques principales de l'installation sont décrites dans la demande complète de contrat et sont complétées par l'information suivante : Puissance électrique maximale installée 2126 kW ". Aux termes de l'annexe 1 aux conditions particulières du contrat d'achat litigieux : " 3 - Chaînes de mesure. L'ensemble des chaînes de mesure est inviolable (plombé) (...) ".

4. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'inspection de l'installation par une société agréée, la société EDF a fait savoir à la société BIONERVAL qu'il avait été constaté deux non-conformités : d'une part, la puissance de l'installation (2 134 kW) dépassait la puissance mentionnée au contrat d'achat (2 126 kW) et d'autre part, s'agissant du compteur d'énergie primaire, il a été relevé l'absence de plomb sur un débitmètre. La société EDF a alors réclamé à la société BIONERVAL, en application de l'article VII § 1.4, le remboursement de la prime à l'efficacité énergétique versée au titre de l'année 2013/2014.

5. S'agissant de l'absence de plombage du débitmètre, la société BIONERVAL souligne qu'il ressort de l'audit effectué par la société Dekra (points 6.3.3 et 6.4.2 Inviolabilité) qu'à la phrase " L'ensemble des éléments de la chaîne de comptage est plombée ", l'auditeur a coché la case " OUI " et a ajouté le commentaire suivante : " L'absence de plombs physiques sur le débitmètre est compensée par la nécessité d'entrer un code pour modifier les paramètres de correction et qu'aucun capteur n'est apparent (P et T sont intégrés au débitmètre). Il serait tout de même opportun de plomber la prise de pression du débitmètre. ". Toutefois, cet élément n'infirme pas le fait que le débitmètre n'était pas plombé comme l'imposaient les stipulations précitées de l'annexe 1 aux conditions particulières du contrat d'achat litigieux. S'agissant de la puissance de l'installation, il est constant qu'elle dépassait la puissance mentionnée au contrat d'achat. Alors même que ce dépassement était minime, il constituait également une non-conformité à l'une des caractéristiques principales des installations telle que mentionnée dans les documents contractuels. Enfin, il résulte des stipulations contractuelles rappelées au point 2 que toute non-conformité, quelle que soit son ampleur, permettait à la société EDF de solliciter le remboursement de la totalité de la prime à l'efficacité énergique. Dans ces conditions, la société BIONERVAL ne peut utilement se prévaloir de la faible gravité des non-conformités constatées et d'une méconnaissance du principe de proportionnalité au soutien de ses conclusions tendant à être exonérée du remboursement du montant total de la prime. Par ailleurs, la société BIONERVAL, qui n'a pas formulé de conclusions tendant à la modulation de cette pénalité, n'établit ni même n'allègue, en tout état de cause, que le remboursement de la prime à l'efficacité énergétique représenterait un montant manifestement excessif eu égard au montant du marché.

6. En outre, il ne résulte d'aucune stipulation du contrat que la demande de remboursement aurait dû être précédée d'une mise en demeure préalable et la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des droits de la défense. Au demeurant, il résulte de l'instruction que la société EDF et la société BIONERVAL ont échangé à plusieurs reprises sur les non-conformités constatée et la question du remboursement de la prime, la société EDF ayant même, à l'issue de ce dialogue, renoncé au non-versement de la prime au titre de l'année 2014/20015.

7. En dernier lieu, le remboursement de la prime à l'efficacité énergétique prévu par les stipulations du contrat quelle que soit l'importance des non-conformités constatées ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement qui n'impose pas de traiter différemment des producteurs d'électricité placés dans une situation différente.

8. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par la société EDF tirée de la tardiveté de la requête, que la société BIONERVAL n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du 9 octobre 2017 du Tribunal administratif de Versailles et la décharge de la somme de 146 901,84 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société EDF, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la société BIONERVAL demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société EDF au titre de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société BIONERVAL est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Electricité de France sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 17VE03739


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE03739
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. CAMENEN
Rapporteur ?: Mme Jeanne SAUVAGEOT
Rapporteur public ?: M. CLOT
Avocat(s) : SELARL CHETRIT DPE

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-10;17ve03739 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award