Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... D... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 10 octobre 2019 l'obligeant à quitter le territoire français sans délai, fixant le pays à destination duquel il sera reconduit et assortissant ces décisions d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 1912944 du 19 novembre 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées respectivement les 19 et 27 décembre 2019, M. D..., représenté par Me Bremaud, avocat, demande à la Cour :
1° de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;
2° d'annuler ce jugement ;
3° d'annuler cet arrêté ;
4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire sans délai et la décision fixant le pays de renvoi sont entachées d'incompétence ;
- elles sont entachées d'erreur de fait car le préfet a indiqué à tort qu'il ne pouvait justifier d'une entrée régulière ;
- elles sont entachées d'une erreur de droit ; il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour à la sous-préfecture de Sarcelles ; le préfet ne pouvait prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire sans lui accorder au moins un délai de trente jours pour quitter la France ;
- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; il justifie de dix ans de présence en France, a été en situation régulière de 2009 à 2012 et a obtenu des agréments et cartes professionnelles de mai 2011 à juillet 2017 ;
- la décision d'interdiction de retour est entachée d'incompétence ;
- elle est entachée d'erreur de droit au regard de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant algérien né le 12 mars 1983 à Alger, fait appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 10 octobre 2019 lui faisant obligation de quitter le territoire sans délai, fixant le pays de destination et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Sur les conclusions tendant à l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'appréciation des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président (...) ".
3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'admettre, à titre provisoire, M. D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions attaquées :
4. Mme B... A..., chef du bureau de l'asile de la préfecture de Seine-Saint-Denis, qui a signé les décisions contestées, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de la Seine-Saint-Denis en vertu de l'article 1er de l'arrêté du préfet n° 2019-2484 du 11 septembre 2019, publié au bulletin d'informations administratives du 16 septembre 2019 de la préfecture, à l'effet de signer notamment les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et prononçant une interdiction de retour. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté doit être écarté.
Sur les autres moyens invoqués à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire et de la décision fixant le pays de destination :
5. En premier lieu, le préfet de la Seine-Saint-Denis a relevé dans sa décision que M. D... ne pouvait justifier d'une entrée régulière en France alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. D... est entré en France en 2009 sous couvert d'un visa en qualité d'étudiant. Toutefois, il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur le fait que l'intéressé était dépourvu de titre de séjour. Dès lors, cette erreur de fait doit être regardée, en l'espèce, comme sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
6. En deuxième lieu, M. D... soutient que les décisions contestées sont entachées d'erreur de droit dès lors qu'il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour à la sous-préfecture de Sarcelles comme l'attestent les captures d'écran de tentatives de prise de rendez-vous en ligne et que ces démarches justifient la régularisation de sa situation administrative. Toutefois, il est constant que M. D..., en situation irrégulière depuis l'expiration de son titre de séjour étudiant le 30 septembre 2012, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour depuis cette date et les captures d'écran datées du mois de juillet 2019 ne permettent pas d'établir qu'il aurait été empêché de déposer une demande de titre de séjour depuis l'expiration de son dernier titre. Dans ces conditions, M. D... n'ayant pas demandé le renouvellement de son titre de séjour et s'étant maintenu sur le territoire français à l'expiration de ce titre, le préfet était fondé à prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français.
7. En troisième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige et il n'est pas contesté que M. D... ne présentait pas de garanties de représentation. Dans les circonstances de l'espèce, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant qu'il ne ressortait ni des allégations de M. D..., ni de l'examen de sa situation, l'existence d'une circonstance particulière permettant de regarder le risque de soustraction à l'obligation de quitter le territoire comme n'étant pas établi. Ainsi, le préfet a pu refuser d'accorder un délai de départ volontaire à M. D....
8. Enfin, M. D... soutient que les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, dès lors qu'il réside en France depuis 2009, qu'il travaille en tant qu'agent de sécurité sous couvert d'une carte professionnelle régulièrement délivrée par le préfet du Val-d'Oise et justifie donc d'une insertion professionnelle. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. D... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français depuis 2012, qu'il n'apporte aucun élément attestant de l'intensité et de la stabilité de ses liens affectifs ou familiaux en France, qu'il est célibataire et sans charge de famille et n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie. Dans ces conditions, le moyen ne peut qu'être écarté.
Sur les autres moyens invoqués à l'encontre de l'interdiction de retour :
9. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
10. M. D... soutient que la décision lui faisant interdiction de revenir sur le territoire français pendant une durée de deux ans est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas pris en compte divers éléments de sa vie personnelle et notamment qu'il est entré régulièrement en France, qu'il réside en France depuis plus de dix ans, qu'il a séjourné trois années de façon régulière sous couvert de titres de séjour en qualité d'étudiant de 2009 à 2012, qu'il est bien inséré professionnellement et dispose d'une carte professionnelle en qualité d'agent de sécurité valable jusqu'en 2017, que plusieurs membres de sa famille résident en France, notamment son oncle chez qui il vit, qu'il n'a jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement et qu'il ne représente aucune menace à l'ordre public. Toutefois, il est constant que M. D... s'est maintenu sur le territoire français de façon irrégulière depuis l'expiration de son dernier titre de séjour en 2012. En outre, le requérant est célibataire et sans charge de famille. Il ne justifie pas de liens d'une particulière intensité qu'il aurait noués en France. Il est célibataire et sans charge de famille et a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-six ans dans son pays d'origine. Par suite, et nonobstant l'absence de toute précédente mesure d'éloignement et de menace à l'ordre public, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a, en prononçant une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, entaché sa décision ni d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : M. D... est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : La requête de M. D... est rejetée.
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N° 19VE04157