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02/07/2020 | FRANCE | N°19VE00457

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 02 juillet 2020, 19VE00457


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 12 février 2018 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de ret

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 12 février 2018 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à défaut, de lui enjoindre de procéder au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 1802318 du 3 janvier 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 9 février 2019 et 5 juin 2020, Mme C..., représentée par Me Toloudi, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du 12 février 2018 du préfet des Hauts-de-Seine refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

2° d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3° à défaut, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation par son conseil au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Mme C... soutient que :

L'arrêté litigieux en tant qu'il rejette la demande de délivrance d'un titre de séjour :

- a été pris par une autorité incompétente ;

- est insuffisamment motivé ;

- est entaché d'un vice de procédure en l'absence de production par le Préfet de l'avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- méconnaît les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

L'arrêté litigieux en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français :

- est illégal par exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- a été pris par une autorité incompétente ;

- est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation ;

L'arrêté litigieux en tant qu'il fixe le pays de renvoi :

- méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante algérienne née le 25 février 1989, a sollicité, le renouvellement d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien. Par un arrêté du 12 février 2018, le préfet des Hauts-de-Seine a refusé la délivrance de ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de sa mesure d'éloignement. Par un jugement n° 1802318 du 3 janvier 2019, dont Mme C... relève appel, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français :

2. Mme C... reprend en appel, en des termes identiques, le moyen soulevé en première instance tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté en litige. Dans ces conditions, ce moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 2 du jugement attaqué.

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. En premier lieu, comme l'a relevé le tribunal administratif, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour vise les textes sur le fondement desquels elle a été prise. De plus, elle expose les circonstances de fait qui en constituent le fondement et mentionne la date d'entrée en France de Mme C... et la circonstance qu'elle a bénéficié d'un précédent titre de séjour. Cette même décision précise également que, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié compte tenu de l'offre de soins et des caractéristiques de son système de santé. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ".

5. Mme C... soutient à nouveau en appel que le préfet ne démontre pas qu'il aurait pris sa décision après avoir obtenu l'avis évoqué au point précédent, ni que cet avis ne serait pas entaché d'erreurs. Cependant, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis médical émis le 5 janvier 2018 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, déjà produit devant le tribunal administratif par le Préfet des Hauts-de-Seine, que l'autorité préfectorale a disposé de l'ensemble des éléments nécessaires à l'examen de la situation médicale de la requérante, et a pris sa décision au vu notamment de l'avis exigé par les dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont il n'est pas établi qu'il aurait été entaché d'erreurs. Par suite le moyen doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ".

7. Il ressort des pièces du dossier que le collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, par l'avis en date du 5 janvier 2018, que, si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale et que ce défaut de prise en charge peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie et voyager sans risque vers son pays d'origine. Si Mme C... soutient que la défaillance du système médical en Algérie serait incontestable, notamment dans le domaine de la néphrologie et de la transplantation rénale, et qu'elle n'aura pas accès à un centre médical susceptible d'assurer son suivi médical constitué notamment d'un traitement imunosuppresseur à proximité de son village d'origine, elle ne le démontre pas par la seule production de certificats médicaux se contentant d'affirmer en termes généraux que son suivi médical ne pourrait se faire qu'en France, alors que le préfet des Hauts-de-Seine a fait état devant les premiers juges sans être démenti, de l'existence de 19 500 greffes de reins réalisées dans le pays d'origine de l'intéressée au cours des vingt dernières années, et de la présence de 600 néphrologues déployés sur le territoire algérien. En outre si l'intéressée soutient que ses ressources financières ne lui permettront pas de bénéficier en Algérie des soins médicaux que son état de santé exigé, elle n'établit pas qu'elle ne pourra pas disposer d'une prise en charge de ses soins dans son pays d'origine, alors qu'elle admet par ailleurs dans ses écritures que ses frais de santé ont été pris en charge par sa famille. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé doit être écarté.

8. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. ".

9. Mme C... soutient que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale dès lors qu'elle justifie d'une présence continue de cinq années sur le territoire national, qu'elle a divorcé le 10 octobre 2016 de son époux qui se trouve en Algérie, que sa mère est décédée, qu'elle est prise en charge en France par ses deux frères séjournant régulièrement sur le territoire national et des membres de sa famille maternelle. Toutefois, la durée de présence de l'intéressée sur le territoire français n'était que de 3 ans et quatre mois à la date de la décision attaquée, en outre elle n'est pas dépourvue de liens familiaux en Algérie où réside notamment son père et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans. Ainsi, eu égard à la durée de son séjour en France et aux conditions de celui-ci, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus de titre de séjour a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision par laquelle le préfet a refusé de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

11. D'une part, il résulte de ce qui précède que la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'est pas illégale. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, invoqué par voie d'exception à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

12. D'autre part et pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 7 et 9, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet des Hauts-de-Seine aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation.

13. Il suit de là que les conclusions à fin d'annulation de la décision faisant obligation à l'intéressée de quitter le territoire français doivent être rejetées.

En ce qui concerne la fixation du pays de renvoi :

14. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " Aux termes de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

15. Mme C... soutient que sa vie serait menacée en cas de retour dans son pays d'origine, dès lors qu'elle ne pourrait y bénéficier du suivi médical que son état de santé exige. Toutefois, pour les motifs exposés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit en tout état de cause être écarté.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Par suite ses conclusions d'appel doivent être rejetées. Le rejet de son appel n'impliquant aucune mesure d'éxécution, ses conclusions présentées aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans le présente instance, il en va de même de ses conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

N° 19VE00457 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00457
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Règles de procédure contentieuse spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: M. Stéphane CLOT
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : TOLOUDI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-07-02;19ve00457 ?
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