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22/01/2019 | FRANCE | N°17VE00212

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 22 janvier 2019, 17VE00212


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1411305 du 14 décembre 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2017, M. et Mme B...demandent à la Cour :

1° d'annuler ce juge

ment ;

2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1411305 du 14 décembre 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 janvier 2017, M. et Mme B...demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- M. B...n'a jamais exercé de mandat social au sein du groupe Interclean et l'option d'achat qui lui a été consentie n'était pas liée à l'exercice de fonctions de direction, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

- le paiement de la somme de 15 000 euros correspondant à la valeur nominale des titres qu'il a acquis caractérise un aléa quant à la réalisation d'un bénéfice dans la mesure où il n'était pas certain de réaliser une plus-value supérieure ou égale à 15 000 euros et alors que l'opération pouvait se solder par la perte de cette indemnité ; l'existence d'un aléa ne doit pas s'apprécier au regard du bénéfice réalisé ultérieurement mais au moment de la conclusion de l'option d'achat et non lors de sa levée ;

- n'étant plus salarié du groupe depuis près d'un an lorsque la levée d'option est intervenue, et alors que celle-ci n'était pas subordonnée à l'exercice de fonctions de direction au sein du groupe pendant une certaine durée, les sommes en litige, dont l'origine provient d'un investissement réalisé en dehors du cadre de son contrat de travail ne peuvent être qualifiées de salaires.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société LBO France Gestion, agissant pour le compte de fonds communs de placements à risque, propriétaire de 77,97 % des actions de la société Financière Prov,

elle-même propriétaire directement ou indirectement de 100 % du capital et des droits de vote des sociétés composant le groupe La Providence, a, par une convention intitulée " option d'achat - dirigeants " conclue le 17 février 2006, consenti à M.B..., alors salarié de la société Financière Prov au sein de laquelle il exerçait les fonctions de directeur financier, sous certaines conditions et moyennant une indemnité d'immobilisation de 15 000 euros, une option d'achat, au prix unitaire d'un euro, d'un nombre d'actions de la société Financière Prov dépendant du taux de rendement interne obtenu par la société LBO France Gestion. Par une convention d'option d'achat signée le 27 juin 2007, ayant vocation à se substituer à la précédente, cette option d'achat a été reportée sur les actions de la société Interclean, devenue l'actionnaire unique de la société Financière Prov. A la suite des négociations engagées par les fonds communs de placements à risque pour la cession de l'intégralité des titres de la société Interclean à la société Samsic,

M. B...a signé, le 17 juillet 2008, le contrat cadre de cession à cette dernière de l'ensemble des titres de la société Interclean. Le 19 septembre 2008, les fonds communs de placements à risque l'ont informé, conformément aux stipulations de la convention d'option d'achat, de leur projet de cession des titres de la société Interclean à la société Samsic, ouvrant droit à la levée de son option par M. B...à hauteur de 194 663 actions au prix de 194 663 euros. Le 21 septembre 2008, M. B...a levé l'option d'achat portant sur 194 663 actions de la société Interclean, puis cédé, le 25 septembre suivant, la totalité de ces actions à la société Samsic au prix unitaire de 3,54 euros, soit pour une somme au total de 689 868 euros. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause, dans le cadre de la procédure contradictoire, l'imposition du revenu retiré de la vente des actions, à savoir la somme de 495 205 euros, dans la catégorie des plus-values de cession de valeurs mobilières et l'a imposé dans la catégorie des traitements et salaires. M. et Mme B...demandent à la Cour d'annuler le jugement du 14 décembre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la décharge du supplément d'impôt sur le revenu résultant de cette rectification.

2. Aux termes de l'article 79 du code général des impôts : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu. ". Aux termes de l'article 82 du même code : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits. (...) ". Le 1 du I de l'article 150-0 A du même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige dispose : " Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que des articles 150 UB et 150 UC,, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux (...) de valeurs mobilières (...) sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal (...) 25 000 euros pour l'imposition des revenus de l'année 2008 (...) ". Et aux termes du 1 de l'article 150-0 D du même code : " Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci (...) ".

3. Pour imposer dans la catégorie des traitements et salaires, le revenu retiré par

M. B...de la vente des actions de la société Interclean, l'administration s'est fondée sur la circonstance que l'avantage qui lui a été consenti consistant en la faculté d'acquérir les actions à prix préférentiel était lié à sa qualité de salarié au sein du groupe Interclean et sur l'absence d'aléa de l'opération. Elle fait ainsi valoir, d'une part, que le nombre d'actions sous option qui pouvaient être acquises par M.B..., directeur financier au sein de ce groupe lorsque lui a été consentie l'option d'achat en litige, était d'autant plus grand que le taux de rentabilité interne de la société Interclean serait élevé, et que l'avantage qui lui a été consenti était modulé en fonction de la pérennité de sa participation à l'amélioration de ce taux, la convention d'option d'achat signée le 27 juin 2007 prévoyant le caractère dégressif du nombre d'actions pouvant être acquises par M. B...en cas de départ " good leaver " de la société Interclean moins de trois ans après sa signature. D'autre part, elle fait valoir que M. B...n'a pris aucun risque capitalistique, ayant eu connaissance, lors de la levée de l'option d'achat, du prix de cession des actions et, par conséquent, du gain qu'il allait percevoir, et n'ayant pas eu à décaisser le prix d'acquisition des actions Interclean, en raison du mécanisme de crédit vendeur mis en place par les fonds communs de placement à risque. Elle ajoute, enfin que l'absence de prise d'un risque capitalistique résulte également de ce que la mise de départ était minime par rapport au gain attendu.

4. M. B...soutient toutefois, à juste titre, qu'il n'était aucunement prémuni contre le risque d'une perte totale de son investissement, ayant versé une somme de 15 000 euros qu'il n'avait pas l'assurance de récupérer, son intérêt de lever l'option et donc de ne pas perdre l'indemnité d'immobilisation, étant subordonné au constat que le taux de rentabilité interne de la société LBO France Gestion du groupe Interclean soit au moins égal à 35 %, taux dont l'administration ne démontre pas ni même ne fait valoir qu'il serait nécessairement atteint.

Par ailleurs, si le service soutient, ainsi qu'il a été dit précédemment, que la mise de départ était infime, la seule circonstance invoquée mise en avant par l'administration tirée du caractère disproportionné du gain retiré de la levée de l'option d'achat des 194 663 actions acquises par

M. B...au prix d'un euro au regard de son investissement initial, n'est pas, en tout de cause, en soi de nature à démontrer l'absence d'un aléa suffisant caractérisant le risque économique pris. Ainsi, quand bien même, l'option d'achat qui lui a été consentie n'était pas sans lien avec le contrat de travail de M. B...ainsi que le soutient le service, l'écart entre le prix de cession des actions et le prix fixé dans la convention du 27 juin 2007 pour la levée de l'option n'a pas le caractère d'un avantage en argent imposable dans la catégorie des traitements et salaires.

5. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. et Mme B...de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1411305 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du

14 décembre 2016 est annulé.

Article 2 : M. et Mme B...sont déchargés de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui leur a été assignée au titre de l'année 2008.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme B...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

4

N° 17VE00212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE00212
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-07-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Traitements, salaires et rentes viagères. Personnes et revenus imposables.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Nathalie RIBEIRO-MENGOLI
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET ACTEMIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-01-22;17ve00212 ?
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