La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/12/2015 | FRANCE | N°14VE03208

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 31 décembre 2015, 14VE03208


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005, à concurrence d'une somme de 18 797 euros.

Par un jugement n° 1005451 du 19 septembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 novembre 2014, M.B..., représenté par Me Cosich, avocat, demande à la

Cour :

1° à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale en c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2005, à concurrence d'une somme de 18 797 euros.

Par un jugement n° 1005451 du 19 septembre 2014, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 novembre 2014, M.B..., représenté par Me Cosich, avocat, demande à la Cour :

1° à titre principal, de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale en cours ;

2° à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement ;

3° de le décharger des impositions en litige ;

4° de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code justice administrative.

M. B...soutient que :

- l'instance pénale en cours, engagée par l'EURL SGI, devrait apporter des éléments utiles au présent litige ; il y a donc lieu de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de cette procédure ;

- la proposition de rectification du 6 octobre 2008 est insuffisamment motivée dès lors qu'elle procède par affirmations, sans être accompagnée des pièces nécessaires, en ce qui concerne la date de livraison des matériels et leur valeur d'acquisition ;

- c'est à tort que l'administration, se référant à sa propre doctrine, qui est contraire à l'article 199 undecies B du code général des impôts, et qu'elle applique au surplus de façon aléatoire, soutient que le seuil de l'agrément préalable doit s'apprécier aussi au niveau de l'exploitant des matériels acquis par l'investisseur ;

- les investissements en cause doivent être regardés comme réalisés, au sens de la loi fiscale, en 2005 et non en 2006, ainsi qu'en font foi les procès-verbaux de livraison ; la notion de livraison peut, au demeurant, être déconnectée de celle de livraison matérielle du bien, eu égard aux termes de l'article 1606 du code civil, ou de ceux d'une réponse ministérielle faite à M. A..., sénateur, le 19 janvier 1989, qui admet que le seul consentement des parties peut valoir livraison du bien acheté ;

- à défaut d'être acceptée sur l'année 2005, la réduction d'impôt pourrait être admise sur l'année 2006 ;

- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve que les matériels auraient été surfacturés aux sociétés en participation (SEP) ayant réalisé les investissements ; le service des douanes a, d'ailleurs, validé les montants déclarés ;

- le principe de proportionnalité, principe général du droit communautaire, est méconnu par le rappel contesté, qui donne lieu à des reprises, amendes ou remboursements réclamés à l'investisseur, au locataire exploitant final des matériels, et au fournisseur ; une réforme des textes régissant les réductions d'impôt pour investissements outre-mer est, pour cette raison, envisagée.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bergeret,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.

1. Considérant que M.B..., en sa qualité d'associé des sociétés en participation (SEP) Clématite 1, 2, 3, 4 et 5, gérées par l'EURL SGI, dont l'objet est la réalisation d'investissements défiscalisés dans les départements d'outre-mer en application des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, a déduit de ses revenus de l'année 2005, à proportion de ses droits dans ces sociétés, le montant des investissements réalisés par ces dernières et a ainsi bénéficié d'une réduction d'impôt de 21 424 euros ; qu'à la suite notamment de la vérification de comptabilité de l'EURL SGI, l'administration a, selon la procédure contradictoire, remis en cause la réduction d'impôt afférente aux investissements réalisés par les SEP Clématite 1, 2, 3 et 5, à hauteur de 16 850 euros ; que M. B...relève appel du jugement du 19 septembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et intérêts de retard auxquelles il a été ainsi assujetti au titre de l'année 2005 ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que, par décision en date du 30 avril 2015, la directrice départementale des finances publiques de l'Essonne a accordé à M. B...un dégrèvement de 5 111 euros, correspondant au rappel de la réduction d'impôt sur le revenu, outre intérêts de retard, afférente à l'investissement réalisé par le contribuable en sa qualité d'associé de la SEP Clématite 5 ; qu'il n'y a pas lieu, dans cette mesure, de statuer sur les conclusions de la requête ;

Sur les conclusions principales à fin de sursis à statuer :

3. Considérant que M. B...conclut à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue d'une instruction pénale ouverte à la suite d'une plainte déposée notamment par

l'EURL SGI pour faire reconnaître des fraudes dont elle prétend avoir été victime ; que, toutefois, si, au vu des pièces produites au dossier, une information judiciaire a en effet été confiée au juge d'instruction du Tribunal de grande instance de Saint-Denis de la Réunion, pour des chefs de faux et usage de faux, escroquerie et association de malfaiteurs sur plainte, notamment, de l'EURL SGI, cette procédure destinée à mettre en évidence des responsabilités pénales, voire civiles n'apparaît pas susceptible d'avoir une incidence sur le bien-fondé de l'imposition mise à la charge de M. B... ; que dès lors, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions aux fins de sursis à statuer ;

Sur les conclusions subsidiaires aux fins de décharge des impositions en litige :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations ; que le caractère suffisant de la motivation d'une proposition de rectification est, en tout état de cause, indépendant de la teneur de ses motifs ;

5. Considérant que la proposition de rectification adressée à M. B...le

6 octobre 2008 précise la nature, le montant ainsi que les motifs des rehaussements envisagés au titre de l'impôt sur le revenu et mentionne les articles du code général des impôts servant de base légale aux redressements ; qu'elle précise notamment qu'à la suite de la vérification de comptabilité de l'EURL SGI, gérante des SEP Clématite 1 à 5, et de ces dernières, elle a remis en cause le déficit industriel et commercial non professionnel déclaré par les SEP ainsi que la réduction d'impôt correspondante déclarée par M. B...; qu'elle fournit, par ailleurs, toutes les précisions chiffrées et comprend en annexe les propositions de rectification adressées aux SEP et un tableau récapitulant les documents obtenus par l'exercice du droit de communication ; que l'ensemble des éléments ainsi notifiés au contribuable était, dans ces conditions, suffisamment précis pour lui permettre d'engager une discussion contradictoire avec l'administration et de présenter utilement ses observations ; qu'enfin, le caractère suffisant de la motivation d'une proposition de rectification ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification était insuffisamment motivée, notamment du fait qu'elle n'aurait pas été assortie des pièces justificatives nécessaires, doit être écarté ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) / La réduction d'impôt est de 50 % du montant hors taxes des investissements productifs (...) Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissement réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 (...) dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. / La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au code général des impôts : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est crée par l'entreprise ou lui est livrée (...) " ;

7. Considérant que pour remettre en cause la réduction d'impôt dont le contribuable s'était prévalu au titre de l'année 2005 pour des investissements réalisés à la Réunion par les SEP Clématite 1, 2 et 3, le service a initialement fait valoir que les investissements n'ont pas été réalisés au cours de l'année 2005, mais en 2006 ;

8. Considérant, d'une part, que si les matériels acquis par les SEP Clématite 1, 2 et 3 ont été facturés le 31 octobre 2005 par la société IPC International Process Co Ltd, ont donné lieu à des " procès-verbaux de réception " sur lesquels le seul fournisseur a porté la date du

17 novembre 2005, et ont fait l'objet de contrats de location à l'entreprise de Mme D...en date du 31 octobre 2005, les documents douaniers concernant l'expédition de ces matériels attestent de leur arrivée sur l'île de la Réunion en février 2006 ; qu'en l'état de ces pièces versées au dossier, l'administration est fondée à faire valoir que l'opération matérielle de livraison n'a pu avoir lieu au cours de l'année 2005 ; que, d'autre part, M. B...ne peut utilement soutenir, eu égard aux termes de l'article 1606 du code civil, que la délivrance des biens doit néanmoins être regardée comme intervenue en 2005, à la date de la réalisation de la vente par le seul consentement des parties, en raison de l'impossibilité de transporter immédiatement le matériel, dès lors que le fait générateur du droit à la réduction d'impôt ne résulte pas de la délivrance des biens au sens du code civil mais, par application des dispositions précitées du code général des impôts, de leur livraison effective au destinataire, laquelle conditionne la réalisation de l'investissement ; qu'il suit de là que M.B..., qui ne peut, par ailleurs, se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales de la réponse ministérielle du 19 janvier 1989 faite à M.A..., sénateur, qui n'a pas été prise pour l'application des dispositions établissant la réduction d'impôt dont il demande le bénéfice mais est relative au 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, et qui invoque en vain les instructions fiscales référencées 5 B-15-99 du 20 juillet 1999 et 4 H-2-07 n° 15 du 30 janvier 2007 qui ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ci-dessus, n'est pas fondé à soutenir que la réduction d'impôt lui a été refusée à tort en application des dispositions précitées du code général des impôts, sans qu'il soit besoin de statuer sur le

bien-fondé des motifs par ailleurs avancés par l'administration pour fonder tout ou partie des rappels, tirés de ce que le prix d'achat des matériels aurait été considérablement surfacturé aux seules fins de bénéficier indûment d'une réduction d'impôt sur un investissement largement fictif, ou que ces opérations n'avaient pas bénéficié de l'agrément préalable qu'elles auraient nécessité ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance, à la supposer établie, que M. B... aurait pu bénéficier au titre de l'année 2006 de la réduction d'impôt qui lui a été refusée au titre de l'année 2005 est en tout état de cause sans incidence dans le présent litige portant uniquement sur son impôt sur le revenu de l'année 2005 ;

10. Considérant, en troisième lieu, que le principe de proportionnalité, issu du droit communautaire, ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit de l'Union européenne ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant de la réduction d'impôt prévue pour les investissements réalisés outre-mer, dès lors que les avantages en litige ne sont pas établis dans le cadre des pouvoirs que les directives communautaires confèrent aux États membres ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance d'un tel principe est inopérant ; que, de même, M. B...ne peut utilement se prévaloir ni des principes dégagés dans un arrêt rendu le 21 février 2008, Netto Supermarkt, par la Cour de justice de l'Union européenne, lesquels concernent l'application de la sixième directive du Conseil du 17 mars 1977 prise en matière de taxe sur la valeur ajoutée ni, à l'appui du moyen tiré du caractère disproportionné de l'imposition qui lui est réclamée, de ce qu'il serait pénalisé pour des agissements réalisés à son insu, ni de ce que l'administration aurait tiré avantage du système de fraude qu'elle a mis à jour, notamment en infligeant à plusieurs des acteurs ayant sciemment participé à la mise en place de cette fraude l'amende prévue par l'article 1740 du code général des impôts ; qu'enfin, la double circonstance que d'autres acteurs d'un système de fraude similaire auraient bénéficié d'une remise partielle de cette amende, et que des modifications du code général des impôts ont été adoptées ou envisagées, pour améliorer la sécurité de plusieurs régimes de réduction d'impôt, ne sont pas davantage utilement invoquées par M.B..., qui au demeurant ne s'est pas vu infliger l'amende précitée ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que M. B...n'étant pas la partie principalement gagnante dans la présente instance, il n'y a pas lieu de faire droit à ses conclusions tendant à ce que soit mis à la charge de l'État le versement de la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu qui lui ont été réclamées au titre de

l'année 2005, à hauteur du dégrèvement de 5 111 euros, en droits et intérêts de retard, accordé par l'administration en cours d'instance.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. B...est rejeté.

''

''

''

''

1

3

N° 14VE03208


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14VE03208
Date de la décision : 31/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Yves BERGERET
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : CABINET COSICH AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-12-31;14ve03208 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award