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05/06/2014 | FRANCE | N°12VE02573

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 05 juin 2014, 12VE02573


Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2012, présentée pour M. B...C...demeurant..., par Me Sebban, avocat ; M. C... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1106398 du 22 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté en date du 20 mai 2011 par lequel le maire de la commune de Saint-Leu-la-Forêt lui a accordé un permis de construire pour la reconstruction d'une maison d'habitation située 92 rue du Château sur le territoire de ladite commune ;

2° de rejeter la demande de M. et Mme E...;

3° de mettre à la charge

de toute partie succombante la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article ...

Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2012, présentée pour M. B...C...demeurant..., par Me Sebban, avocat ; M. C... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1106398 du 22 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté en date du 20 mai 2011 par lequel le maire de la commune de Saint-Leu-la-Forêt lui a accordé un permis de construire pour la reconstruction d'une maison d'habitation située 92 rue du Château sur le territoire de ladite commune ;

2° de rejeter la demande de M. et Mme E...;

3° de mettre à la charge de toute partie succombante la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens ;

Il soutient que :

- le dossier de demande de permis de construire, qui porte sur la reconstruction à l'identique d'une construction existante dont la commune avait une parfaite connaissance, remplit les conditions des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- le projet remplit les conditions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme dans la mesure où contrairement à ce qu'a jugé le tribunal le bâtiment a été détruit ou démoli depuis moins de dix ans ;

- l'article U1/2 du plan local d'urbanisme (PLU) n'est pas applicable en l'absence de destruction liée à un sinistre ;

- les articles U1/6 et U1/7 du plan local d'urbanisme et l'obligation jurisprudentielle de ne pas aggraver la non-conformité d'un bâtiment avec le plan local d'urbanisme actuel sont sans effet sur le cas d'espèce ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 mai 2014 :

- le rapport de Mme Ribeiro-Mengoli, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour M. C...et de MeD..., pour M. et MmeE... ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 22 mai 2014, présentée pour M.C... ;

1. Considérant que M. C...a déposé le 11 avril 2011 une demande de permis de construire portant sur la reconstruction à l'identique, sur le fondement des dispositions du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, d'une ancienne maison de gardien de type R+1 sise sur un terrain situé 92 rue du Château sur le territoire de la commune de

Saint-Leu-la-Forêt, ayant fait l'objet d'un arrêté de péril imminent en date du 22 décembre 2003 ordonnant à son propriétaire de procéder à " l'arasement de tous les murs périphériques et intérieurs de la maison objet du sinistre jusqu'à l'ancien plancher bas du 1er étage " et dont le maire de la commune de Saint-Leu-la-Forêt avait refusé la reconstruction à l'identique sur le fondement des dispositions de l'article U1/2 du règlement du plan local d'urbanisme par un arrêté du 16 juillet 2005 au motif qu'il ne s'agissait pas d'un bâtiment détruit après sinistre au sens desdites dispositions mais d'un " bâtiment abandonné et en ruine depuis des décennies " d'après le rapport d'expertise dressé le 16 décembre 2003 par un expert près le Tribunal d'instance de Montmorency ; que par un arrêté du 20 mai 2011, modifié par un permis modificatif délivré le 29 juin suivant, le maire de la commune de Saint-Leu-la-Forêt a accordé à M. C...le permis de construire sollicité ; que M. C...relève appel du jugement en date du

22 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé, à la demande de ses voisins immédiats, M. et MmeE..., le permis de construire qui lui a été accordé le

20 mai 2011 ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel formées par la commune de

Saint-Leu-la-Forêt :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4. " ; qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 22 mai 2012 a été notifié à la commune de Saint-Leu-la-Forêt par un courrier recommandé dont elle a accusé réception le 24 mai 2012 ; qu'il en résulte que l'appel formé par la commune de

Saint-Leu-la-Forêt à l'encontre dudit jugement dans son mémoire enregistré le

29 novembre 2012 est tardif et, par suite, irrecevable ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier " ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, lorsque le tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé des différents motifs d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges, dès lors que ceux-ci sont contestés devant lui, et d'apprécier si l'un au moins de ces motifs justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; que dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; qu'il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges ;

4. Considérant que les premiers juges ont annulé le permis de construire en litige au motif, d'une part, qu'il méconnaissait les dispositions du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme dans la mesure où il n'était pas établi que la destruction ou démolition de la maison aurait eu lieu moins de dix ans avant la date de délivrance du permis de construire, et d'autre part qu'il méconnaissait les dispositions des articles U1/6 et U1/7 du règlement du plan local d'urbanisme ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié. " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la maison de gardien que M. C... a acquise en 2001 était à l'état d'abandon depuis plusieurs années, comme cela ressort du constat d'huissier établi le 30 décembre 1996 mentionnant l'existence d'une " vieille bâtisse extrêmement vétuste ", envahie par la végétation, présentant une " toiture extrêmement endommagée ", dépourvue de fenêtres et présentant, outre une façade arrière en très mauvais état, d'importantes fissures et cassures ; que ces constatations sont corroborées par les photographies jointes à ce constat ; qu'un nouveau constat d'huissier établi plus de trois ans après, le 24 juillet 2000, confirme que la construction en litige était à cette époque une bâtisse " en état d'abandon et de vétusté avancée ", et a notamment fait le constat " qu'une ouverture béante s'est formée dans la toiture et qu'en conséquence, l'étage de la maison est partiellement à ciel ouvert, que " la toiture est manquante sur environ 80% de sa surface ", que " le plancher haut de la bâtisse est à l'état de délabrement et partiellement effondré ", " qu'une large porte aménagée en façade arrière, est tombée sur le sol " et " qu'une végétation dense et sauvage a poussé à l'intérieur de la maison " ; qu'il ressort également de ce constat que les façades de la bâtisse comportaient d'importantes lézardes en de multiples endroits ; qu'un rapport de visite des services techniques de la ville établi le 7 mai 2001 a confirmé " le manque de solidité du bâtiment " ; qu'il en résulte que la maison de gardien acquise par M.C..., dont la quasi totalité de la toiture avait disparu, qui ne présentait plus de fenêtres, dont l'étage était effondré, dont les murs extérieurs étaient parcourus d'importantes lézardes et qui était envahie par une végétation dense, devait être regardée comme détruite depuis plus de dix ans au sens et pour l'application des dispositions susvisées de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme à la date à laquelle le maire de la commune de Saint-Leu-la-Forêt a autorisé sa reconstruction ou, en tout état de cause, à la date de la demande de permis de construire, ce même si elle avait conservé ses murs extérieurs jusqu'à ce que leur arasement au niveau de l'ancien plancher bas du 1er étage soit ordonné en 2003 en raison du risque que la construction faisait courir pour la sécurité publique ; que c'est donc à bon droit et sans ajouter une condition à l'application du 1er alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a retenu que le projet de construction en litige n'entrait pas dans le champ d'application de ces dispositions ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article U1/6 du règlement du plan local d'urbanisme : " Règle générale - Lorsque aucun recul n'est indiqué au plan de zonage, les constructions doivent être édifiées à une distance d'au moins 5 m de l'alignement des voies publiques ou de la limite d'emprise des voies privées, existantes ou à créer. (...) " ; qu'il n'est pas contesté que, ainsi que l'ont retenu les premiers juges, aucun recul n'est indiqué au plan de zonage du plan local d'urbanisme s'agissant de la parcelle située 92 rue du Château ; que la construction projetée, qui constitue une construction nouvelle dès lors qu'elle n'entre pas dans les prévisions du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ainsi qu'il a été dit au point 6 et ainsi que l'ont retenu à... ; que c'est par suite à bon droit que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que la construction projetée méconnaissait ces dispositions ;

8. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article U1/7 du règlement du plan local d'urbanisme : " Terrains situés en secteur U1a ou U1c, dont la largeur de façade est supérieure à 12 m et terrains situés en secteur U1b " : Dans la bande constructible de 20 m de profondeur définie au paragraphe 2) de l'article U1/6, les constructions peuvent être édifiées sur l'une des limites latérales. Dans ce cas, elles ne devront pas comporter de baies éclairant les pièces d'habitation ou des locaux de travail à l'exclusion des baies dont l'appui est situé à plus de 1,90 m au-dessus du plancher. / A défaut d'implantation sur cette limite, les marges d'isolement par rapport à celle-ci s'appliquent. / Les marges d'isolement doivent également être respectées par rapport aux autres limites séparatives. / (...) La largeur (L) des marges d'isolement est au moins égale à la hauteur (H) de la construction par rapport au niveau naturel au droit des limites avec un minimum de 4m. / (...) Cette largeur (L) peut être réduite à la moitié de la hauteur (H/2) avec un minimum de 1,90 m, si le mur qui fait face à la limite séparative ne comporte pas de baie éclairant des pièces d'habitation ou des locaux de travail à l'exclusion des baies dont l'appui est situé à plus de 1,90 m au-dessus du plancher. (...) " ; que l'annexe dudit règlement précise, s'agissant de la notion de marges d'isolement, que : " c) Pièces d'habitation ou de travail : (bon droit les premiers juges sans entacher leur jugement d'une contradiction de motifs, est implantée à l'alignement de la voie publique et ne respecte donc pas les dispositions précitées de l'article U1/6 du règlement du plan local d'urbanisme) Ne sont pas prises en compte les baies dont l'appui est situé à plus de 1,90 m au-dessus du plancher de la pièce, ainsi que les jours de souffrance à châssis fixe et verre translucide " ;

9. Considérant que si la façade nord-est de la construction autorisée par le permis de construire modificatif délivré le 29 juin 2011 ne présente plus que deux ouvertures en pavé de verre, elle est implantée à 1,40 m de la limite séparative latérale, soit à une distance inférieure à la marge d'isolement de 1,9 m minimum fixée par les dispositions susvisées ; que c'est par suite à bon droit que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a jugé que la construction projetée méconnaissait les dispositions de l'article U1/7 du règlement du plan local d'urbanisme ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté en date du 20 mai 2011 par lequel le maire de la commune de Saint-Leu-la-Forêt lui a accordé un permis de construire pour la reconstruction d'une maison d'habitation située

92 rue du Château ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de

M. et Mme E...la somme que M. C...et la commune de Saint-Leu-la-Forêt réclament au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a en revanche lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme E...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Leu-la-Forêt sont rejetées.

Article 3 : M. C...versera à M. et Mme E...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 12VE02573


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02573
Date de la décision : 05/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Nathalie RIBEIRO-MENGOLI
Rapporteur public ?: Mme AGIER-CABANES
Avocat(s) : SCP RICARD, DEMEURE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-06-05;12ve02573 ?
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