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08/12/2011 | FRANCE | N°10VE03342

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 08 décembre 2011, 10VE03342


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 17 octobre 2010, présentée pour M. Marouane A, demeurant chez Mme Dominique B, ..., par Me Ajabi ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005848 en date du 15 septembre 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 septembre 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l

'arrêté susvisé ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de réexaminer sa situat...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 17 octobre 2010, présentée pour M. Marouane A, demeurant chez Mme Dominique B, ..., par Me Ajabi ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005848 en date du 15 septembre 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 septembre 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté susvisé ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il a demandé au premier juge un renvoi d'audience au motif qu'il devait comparaître, avec son conseil, devant la Cour d'appel de Paris le même jour à la même heure ; qu'en refusant de faire droit à sa demande alors que le requérant justifiait de motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire, le premier juge a entaché son jugement d'irrégularité ; qu'en prenant à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière, par ailleurs insuffisamment motivé, alors qu'il était sur le point d'épouser une ressortissante française, le préfet de l'Essonne a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation et a méconnu l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien, et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2011 :

- le rapport de Mme Corouge, magistrat désigné,

- les conclusions de Mme Courault, rapporteur public,

- et les observations de M. et Mme A ;

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement, en présence de l'intéressé sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un (...) ; que ces dispositions spéciales imposent une convocation personnelle à l'audience du requérant, même assisté d'un avocat, dans les litiges relatifs aux arrêtés de reconduite à la frontière portés devant les tribunaux administratifs ; que, par ailleurs, le juge, auquel il incombe de veiller à la bonne administration de la justice, est tenu de faire droit à une demande de report de l'audience formulée par une partie, dans le cas où des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire l'imposent ;

Considérant qu'il ressort du dossier de première instance que l'audience au cours de laquelle devait être examinée la demande de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 10 septembre 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière a été fixée au 15 septembre 2010 à 9 heures ; que M. A a demandé un report d'audience au motif que, le préfet de l'Essonne ayant interjeté appel de l'ordonnance du juge des libertes et de la détention d'Evry ordonnant la remise en liberté de l'intéressé, il était appelé à comparaître, avec son conseil, devant la Cour d'appel de Paris le 15 septembre 2010 à 9 heures ; qu'étant convoqué le même jour à la même heure devant deux juridictions, M. A est fondé à soutenir que des motifs exceptionnels tirés des exigences du débat contradictoire imposaient au magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles de faire droit à sa demande de report ; que dès lors, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Considérant qu'au cours de l'enquête diligentée par le procureur de la République le 8 septembre 2010 pour vérifier la sincérité du projet de mariage prévu le 11 septembre 2010 entre M. A et une ressortissante française, l'intéressé s'est rendu le 9 septembre 2010 à la gendarmerie nationale de Gif-sur-Yvette où il avait été convoqué ; qu'il a alors été placé en garde à vue et s'est vu notifier à l'issue de sa garde à vue un arrêté de reconduite à la frontière pris par le préfet de l'Essonne le 10 septembre 2010 et un arrêté du même jour le plaçant en rétention administrative ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de reconduire M. A à la frontière a été prise après que les services préfectoraux ont été informés du projet de mariage de l'intéressé et qu'ils ont estimé qu'il pouvait revêtir un caractère frauduleux ; qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, notamment à la précipitation avec laquelle l'administration a agi, l'arrêté doit être regardé comme ayant eu pour motif déterminant de prévenir le mariage de M. A avec une ressortissante française ; que cet arrêté est pour ce motif entaché de détournement de pouvoir ; que, par suite, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêté en date du 10 septembre 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ; qu'il y a lieu, par application de ces dispositions, d'enjoindre au préfet de l'Essonne de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour, et de réexaminer sa situation administrative au regard du droit au séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 1005848 en date du 15 septembre 2010 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles et l'arrêté en date du 10 septembre 2010 du préfet de l'Essonne sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice.

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N° 10VE03342


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 10VE03342
Date de la décision : 08/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Reconduite à la frontière - Règles de procédure contentieuse spéciales.

Procédure - Jugements - Tenue des audiences.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Elise COROUGE
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : AJABI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-12-08;10ve03342 ?
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