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25/01/2011 | FRANCE | N°10VE01298

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 25 janvier 2011, 10VE01298


Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2010, présentée pour M. Mohamed A, demeurant chez M. B, ..., par Me Cohn, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001722 du 8 mars 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;
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Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2010, présentée pour M. Mohamed A, demeurant chez M. B, ..., par Me Cohn, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001722 du 8 mars 2010 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2010 par lequel le préfet de l'Essonne a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Essonne de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il est arrivé sur le territoire français en 2002 et il a épousé religieusement une compatriote ; un enfant est né de cette union le 10 juillet 2009 ; son épouse connaît de graves problèmes de santé qui rendent sa présence indispensable auprès d'elle et de son enfant ;

- pour les mêmes motifs l'arrêté du 4 mars 2010 est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- il a également méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ; le jeune âge de l'enfant nécessite la présence de son père, en raison de la grande fragilité de l'état de santé de la mère ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 janvier 2011 :

- le rapport de M Brumeaux, magistrat désigné,

- les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public,

- et les observations de Me Delegiewicz, substituant Me Cohn, pour M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 4 mars 2010 et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant malien, né le 30 novembre 1978 à Mopi (Mali), ne justifie pas de son entrée régulière sur le territoire français et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'ainsi, il se trouvait, dans un des cas où le préfet peut légalement faire application des dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la compagne de M. A souffre d'une grave infection virale et qu'elle a obtenu en raison de son état de santé un titre de séjour valide jusqu'au 2 novembre 2010 ; que dans ces conditions particulières, la présence de M. A est nécessaire auprès d'elle, notamment pour prendre soin de leur fille née le 10 juillet 2009 ; que dès lors l'arrêté du 4 mars 2010 du préfet de l'Essonne décidant sa reconduite à la frontière est entaché d'une erreur d'appréciation des conséquences qu'il entraîne sur sa situation personnelle et familiale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances particulières de l'espèce, il y a lieu de faire droit à ces conclusions et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant qu'il incombe à l'autorité administrative, en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce, comme en l'espèce, l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée ;

Considérant que le présent arrêt qui prononce l'annulation de l'arrêté du 4 mars 2010 implique, en application des dispositions précitées, que le préfet de l'Essonne délivre à M. A une autorisation provisoire de séjour, mais aussi qu'il se prononce sur le droit de l'intéressé à la délivrance d'un titre de séjour ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre à cette autorité de délivrer à M. A une telle autorisation et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il soit besoin de l'assortir d'une astreinte ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 8 mars 2010, l'arrêté du 4 mars 2010 du préfet de l'Essonne décidant la reconduite à la frontière de M. A et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, la situation administrative de l'intéressé.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 10VE01298 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 10VE01298
Date de la décision : 25/01/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme JARREAU
Avocat(s) : COHN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-01-25;10ve01298 ?
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