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23/09/2010 | FRANCE | N°09VE04037

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 23 septembre 2010, 09VE04037


Vu la requête enregistrée le 10 décembre 2009, présentée pour M. Rabah A demeurant ..., par Me Lisita ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0912985 du 17 novembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 novembre 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une car

te de séjour temporaire dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrê...

Vu la requête enregistrée le 10 décembre 2009, présentée pour M. Rabah A demeurant ..., par Me Lisita ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0912985 du 17 novembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 novembre 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte du versement de la somme de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation de séjour et de réexaminer sa situation dans le même délai sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'entré en France le 28 avril 2003 avec un passeport, son entrée est régulière contrairement à l'un des motifs retenus par l'arrêté attaqué ; qu'il satisfait aux conditions posées pour une régularisation sur le fondement de l'article 40 de la loi du 27 novembre 2007 puisqu'il vit en France depuis plus de six ans et bénéficie d'une promesse d'embauche en qualité de plâtrier traditionnel ; que l'arrêté viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car son père, titulaire d'une carte de résident, réside en France depuis 1961 et sa soeur, chez laquelle il vit, a acquis la nationalité française ; qu'il n'a jamais constitué une menace pour l'ordre public ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi en date du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2010 :

- le rapport de M. Martin, magistrat désigné,

- et les conclusions de M. Davesne, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité marocaine, est entré en France le 12 avril 2003 sous couvert d'un passeport muni d'un visa Schengen d'une durée de validité de onze jours ; qu'à supposer qu'il soit entré en France pendant la période de vingt-trois jours d'extension de la durée de validité de son visa du 23 avril 2003 au 15 mai 2003 délivré à Düsseldorf, il ne pouvait donc faire l'objet, contrairement aux motifs retenus par l'arrêté du 11 novembre 2009 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a prononcé la reconduite à la frontière à son encontre, d'un arrêté pris sur le fondement du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, M. A s'étant maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a substitué, à la demande du préfet de la Seine-Saint-Denis, comme fondement de l'arrêté attaqué, aux dispositions du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile celles du 2° du II du même article ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le fondement légal de l'arrêté attaqué serait erroné est inopérant ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que si M. A, né le 16 janvier 1976, fait valoir qu'il est entré en France en 2003 et que ses attaches familiales se trouvent désormais en France où résident son père, depuis 1961, qui est titulaire d'une carte de résident et sa soeur, qui a acquis la nationalité française le 10 mai 2007, et chez laquelle il est hébergé, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans enfant, n'établit pas avoir en France le centre de sa vie privée et familiale et être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-sept ans ; que, par suite, la décision prononçant la reconduite à la frontière de M. A n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, cette décision n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auquel ne déroge pas l'accord franco-marocain : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ;

Considérant que l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer, de plein droit, un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; que toutefois, pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés lors de l'examen du moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. A ne peut prétendre à l'obtention de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, M. A pouvait légalement faire l'objet de la mesure de reconduite à la frontière prononcée à son encontre ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007 : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 ; que si M. A soutient qu'il a déposé une demande de titre de séjour à raison de son insertion professionnelle en France et qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche en qualité de plâtrier traditionnel et qu'il peut bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de cet article, ces dispositions ne prévoient pas, en tout état de cause, la délivrance de plein droit d'un titre de séjour qui entraînerait une protection à l'égard des mesures de reconduite à la frontière ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences que comporte la mesure de reconduite à la frontière de l'intéressé sur sa situation personnelle ;

Considérant, enfin, que la circonstance que M. A ne constitue pas une menace pour l'ordre public est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 09VE04037 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 09VE04037
Date de la décision : 23/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : LISITA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-09-23;09ve04037 ?
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