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23/09/2010 | FRANCE | N°09VE03710

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 23 septembre 2010, 09VE03710


Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0910046 du 24 septembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 24 août 2009 décidant la reconduite à la frontière de M. Jovenal A et la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Jovenal A devant le Tribunal administratif d

e Cergy-Pontoise ;

Il soutient que M. A ne peut bénéficier des dispositions du 6°...

Vu la requête, enregistrée le 6 novembre 2009, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0910046 du 24 septembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 24 août 2009 décidant la reconduite à la frontière de M. Jovenal A et la décision du même jour fixant le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Jovenal A devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que M. A ne peut bénéficier des dispositions du 6° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la communauté de vie avec Mme Augusta B n'est pas établie eu égard aux déclarations contradictoires de M. A ; que ni la nationalité française de sa concubine, ni celle de ses deux enfants, ni la preuve de ce qu'il contribue à l'entretien de ses enfants n'est rapportée ; que l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. A est suffisamment motivé ; que cet arrêté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car la communauté de vie avec sa concubine n'est pas avérée ; que l'arrêté portant reconduite à la frontière ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2010 :

- le rapport de M. Martin, magistrat désigné,

- les conclusions de M. Davesne, rapporteur public,

- et les observations de Me De Guéroult, substituant Me Ivaldi, pour M. Jovenal A ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ; que M. A, en invoquant la méconnaissance des dispositions précitées du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être regardé comme invoquant la circonstance qu'il se serait trouvé, à la date à laquelle l'arrêté attaqué a été pris, dans la situation visée par ces dispositions lui permettant de prétendre, de plein droit, à la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale et que cette situation faisait obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à son encontre ; que, si M. A établit être le père de deux enfants mineurs français nés respectivement les 5 mai 2001 et 14 janvier 2005, toutefois, les documents produits par l'intéressé, constitués d'une seule attestation émanant de la mère de ses enfants rédigée le 12 mars 2010 et d'une lettre de la directrice de l'école élémentaire Almont 2 de Melun en date du 18 mars 2010 aux termes de laquelle celle-ci atteste que l'aînée des enfants a été scolarisée dans cette école et a effectué la rentrée des classes en présence de ses deux parents, ne suffisent pas à établir qu'il contribue effectivement à leur entretien et à leur éducation ; que, dès lors, l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué n'a pas méconnu lesdites dispositions ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a estimé que l'arrêté attaqué méconnaissait les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire et s'opposait, ainsi, à l'édiction d'une mesure d'éloignement ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité cap-verdienne, a reconnu être en situation irrégulière et ne pouvoir justifier être entré régulièrement sur le territoire français ; qu'il entrait, ainsi, dans le champ d'application de la disposition précitée permettant au préfet de prononcer un arrêté de reconduite à la frontière à son encontre ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet (...) d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 6° L'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans. (...) ; qu'aux termes de l'article 371-2 du code civil : Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. (...) ;

Considérant que, pour le même motif que celui retenu ci-dessus pour répondre au moyen tiré de la méconnaissance du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de M. A ne viole pas les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du même code ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 24 août 2009 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a ordonné la reconduite à la frontière de M. A comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est suffisamment motivé ; que le moyen tiré du défaut de motivation ne saurait être accueilli ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que si M. A fait valoir qu'il réside en France depuis neuf ans et vit avec sa compagne, de nationalité française, qui est la mère de ses enfants, depuis la naissance de sa première fille en 2001, il ne l'établit pas ; qu'il ressort des pièces du dossier, comme il a été dit précédemment, que l'intéressé n'établit pas, à la date d'édiction de l'arrêté de reconduite à la frontière, participer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants ; que l'attestation de sa compagne, au demeurant postérieure à l'arrêté de reconduite à la frontière, ne saurait, à elle seule, être suffisamment probante ; que, dans les circonstances de l'affaire, et compte tenu notamment de la durée et des conditions du séjour de M. A en France et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du 24 août 2009 par lequel le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a décidé la reconduite à la frontière n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention sur les droits de l'enfant signée à New York le 20 novembre 1989 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; que, dès lors, comme il a été dit ci-dessus, qu'il ne peut être considéré comme établi que M. A assure l'entretien et l'éducation de ses enfants, la mesure de reconduite à la frontière ne saurait être considérée comme contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 24 août 2009 ;

Sur les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 24 septembre 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par

M. A et le surplus des conclusions de sa requête devant la Cour sont rejetés.

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N° 09VE03710 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 09VE03710
Date de la décision : 23/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : IVALDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-09-23;09ve03710 ?
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