Vu la requête et le mémoire ampliatif, respectivement enregistrés les 2 mars 2009 et 23 avril 2010, présentée pour Mlle Ndeye Marietou A, demeurant chez Mme B, ..., par Me Mendel-Riche, avocat à la Cour ; Mlle A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0806371 en date du 3 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 1er février 2008 portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Mendel-Riche d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Elle soutient que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour a été signée par une autorité incompétente et qu'elle méconnaît les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; que l'exposante a été élevée par la famille de son père ; que sa plus proche famille réside régulièrement en France ; qu'elle est arrivée sur le territoire français à l'âge de quinze ans et a vécu depuis cette date avec sa grand-mère et ses tantes paternelles ainsi qu'avec ses oncles ; que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont donc été méconnues ; qu'elle souffre d'une maladie rénale rare ; que le retour dans son pays d'origine, dès lors qu'elle est malade et sera isolée, constitue un traitement inhumain ; que la mesure d'éloignement viole donc les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, pour les mêmes motifs, la décision fixant le pays de destination doit également être annulée ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2010 :
- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Jarreau, rapporteur public ;
Considérant que Mlle A, ressortissante sénégalaise, fait appel du jugement du 3 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 1er février 2008 portant refus de délivrance d'un titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant que Mlle A, née le 6 janvier 1985, soutient, sans être contestée, qu'elle est entrée en France en décembre 2000, alors qu'elle était âgée de quinze ans, et qu'elle n'a pas quitté le territoire français depuis lors ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par décision du 15 janvier 2002, le juge des tutelles du Tribunal d'instance de Saint-Ouen, constatant que son père était décédé le 22 février 2001 et que sa mère avait disparu, a fixé la composition du conseil de famille dont les membres ont désigné en qualité de tuteur Mme Seydi épouse B, tante paternelle de Mlle A ; que la requérante établit, par la production d'un certificat de décès, que sa mère est décédée le 13 septembre 2003 ; que sa plus proche famille, composée d'une autre tante et de trois oncles, réside régulièrement en France ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée du séjour en France de Mlle A et de l'intensité de ses attaches familiales dans ce pays, la décision du 1er février 2008, par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et a, ainsi, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en raison de l'illégalité affectant le refus de délivrer un titre de séjour à Mlle A, les décisions faisant obligation à l'intéressée de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle devra être reconduite sont dépourvues de base légale ; que, par suite, Mlle A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 1er février 2008 ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'eu égard au motif énoncé ci-dessus, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre un titre de séjour à Mlle A dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'à la date de la présente décision, des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que le préfet oppose à la demande de l'intéressée une nouvelle décision de refus ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mlle A une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que Mlle A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que le conseil de Mlle A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Mendel-Riche de la somme de 1 500 euros ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement n° 0806371 du 3 novembre 2008 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du 1er février 2008 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mlle A, une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Mendel-Riche la somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mlle A est rejeté.
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N° 09VE00710 2