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09/06/2008 | FRANCE | N°06VE00672

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 09 juin 2008, 06VE00672


Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2006 au greffe de la cour, présentée pour M. Gilles X, demeurant ..., par Me Pelloux-Célimène ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000425 en date du 9 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation du titre de perception d'un montant de 90 001 francs (13 720,56 euros) émis à son encontre le 31 mars 1999 par le directeur des services fiscaux de la Seine-Saint-Denis pour rupture de son engagement de servir l'Etat pendant une durée minimale de huit ans ; >
2°) d'annuler le titre de perception du 31 mars 1999 ;

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Vu la requête, enregistrée le 30 mars 2006 au greffe de la cour, présentée pour M. Gilles X, demeurant ..., par Me Pelloux-Célimène ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0000425 en date du 9 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation du titre de perception d'un montant de 90 001 francs (13 720,56 euros) émis à son encontre le 31 mars 1999 par le directeur des services fiscaux de la Seine-Saint-Denis pour rupture de son engagement de servir l'Etat pendant une durée minimale de huit ans ;

2°) d'annuler le titre de perception du 31 mars 1999 ;

3°) de poser une question préjudicielle à la Cour de justice des communautés européenne sur les moyens tirés de la violation du droit communautaire ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. X soutient que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a considéré que le remboursement des frais dus pour rupture d'engagement a été légalement prescrit par l'arrêté du 26 juin 1990 ; que cet arrêté ne constitue pas un titre de perception, mais n'est que sa radiation des cadres ; que le titre de perception n'a été émis que près de neuf ans plus tard et, par conséquent, l'action en recouvrement doit être considérée comme prescrite en application de l'article 2277 du code civil qui est applicable au présent litige ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne s'est pas prononcé sur ce point ; que le titre de perception est contraire au principe d'égalité et à des règles de droit communautaire telles que les principes de sécurité juridique et de confiance légitime ; que son acceptation de servir l'Etat pendant une durée minimum de 8 ans n'était pas libre, dès lors qu'un refus de sa part aurait conduit à l'impossibilité de travailler dans l'administration ; qu'il s'agit d'une entrave au droit du travail, par ailleurs contraire à la liberté d'établissement et au principe de libre circulation ; que le principe de proportionnalité des sanctions n'a pas été respecté ; que le titre de perception est contraire à l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; que les faits exposés par l'administration dans ce titre de perception sont erronés, puisqu'il indique qu'il a démissionné le 29 janvier 1990, ce qui est faux ; que l'administration a méconnu l'autorité de la chose jugée ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le code civil ;

Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

Vu le décret n° 57-986 du 30 août 1957 portant règlement d'administration publique pour la fixation du statut particulier des personnels de la catégorie A des services extérieurs de la direction générale des impôts ;

Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2008 :

- le rapport de M. Dhers, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le directeur des services fiscaux de la Seine-Saint-Denis a émis le 31 mars 1999 à l'encontre de M. X, ancien inspecteur des impôts, un titre de perception pour rupture de son engagement de servir l'Etat pendant une durée minimale de huit ans ; que M. X sollicite l'annulation du jugement en date du 9 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en annulation de ce titre de perception et l'annulation de ce dernier ;

Sur la demande d'annulation du titre de perception du 31 mars 1999 :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2227 du code civil : « L'Etat, les établissements publics et communes sont soumis aux mêmes prescriptions que les particuliers et peuvent légalement les opposer. » ; qu'aux termes de l'article 2262 du même code : « Toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter le titre, ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de sa mauvaise foi. » ; que la créance de l'Etat à l'encontre de M. X présente le caractère d'une indemnité pour rupture de l'engagement de servir ; qu'à défaut de dispositions prévoyant une prescription plus courte pour cette catégorie de créances, le reversement des sommes dues à l'Etat est soumis à la seule prescription trentenaire édictée à l'article 2262 du code civil ; que c'est à bon droit que le tribunal administratif a écarté l'application de l'article 2277 de ce code, répondant ainsi au moyen soulevé par M. X ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X ne saurait utilement soutenir que l'application de l'article 2262 du code civil constitue une « rupture du principe de confiance légitime » et du principe d'égalité, dès lors que les articles 1er, 2 et 3 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée, qui ont pour objet de prescrire au profit des collectivités publiques qui y sont visées les créances non payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis, ont été édictés dans un but d'intérêt général, en vue notamment de garantir la sécurité juridique des collectivités publiques en fixant un terme aux actions, sans préjudice des droits qu'il est loisible aux créanciers de faire valoir dans les conditions et les délais fixés par ces mêmes articles ;

Considérant, en troisième lieu, que si le Tribunal administratif de Paris a, par un jugement du 15 décembre 1998, annulé un précédent titre de perception émis à l'encontre de M. X pour défaut d'indication des bases de liquidation, cette annulation pour un motif de régularité en la forme n'interdisait pas au directeur des services fiscaux de la Seine-Saint-Denis d'émettre un nouveau titre de perception répondant aux exigences de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 : « Tout ordre de recette doit indiquer les bases de la liquidation (...) » ; que le titre exécutoire litigieux indique, notamment, que la somme de 90 001 francs (13 720,56 euros) réclamée à M. X correspond à l'indemnité pour rupture de l'engagement de servir l'Etat pendant la période minimale de huit ans prévue par l'article 13 du décret du 30 août 1957, indique la période de scolarité du requérant à l'Ecole nationale des impôts et opère une distinction entre les traitements et indemnités de résidence qu'il a perçus et le montant des dépenses engagées par l'école pour le former ; que les renseignements qui ont été ainsi fournis à M. X étaient de nature à lui permettre de discuter utilement les bases de calcul de la somme de 90 001 francs (13 720,56 euros) qui était mentionnée sur le titre exécutoire émis à son encontre ; que dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de ce titre exécutoire doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, que si le titre de perception indique par erreur que M. X a démissionné le 29 janvier 1990, cette erreur de plume, dont il n'est pas allégué qu'elle ait eu une influence sur la liquidation de la somme qui lui est réclamée, est sans incidence sur sa régularité ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aucune règle de droit communautaire ne reconnaît un « principe du droit au travail » ; que, par ailleurs, M. X ne peut utilement invoquer la violation des principes de liberté d'établissement, de liberté de circulation des travailleurs, de sécurité juridique et de confiance légitime, lesquels ne font pas obstacle à ce que le recrutement d'agents publics soit subordonné à l'engagement de servir pendant une durée minimale déterminée dans certaines fonctions ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 13 du décret du 30 août 1957 modifié : « Les candidats reçus au concours sont nommés inspecteurs élèves et astreints à rester au service de l'Etat ou de ses établissements publics à caractère administratif pendant une période minimum de huit ans, la durée de la formation ne pouvant être prise en compte au titre de cette période que dans la limite de deux ans. En cas de manquement à cette obligation plus de trois mois après la date d'installation en qualité d'inspecteur élève, les intéressés doivent, sauf si le manquement ne leur est pas imputable et sans préjudice des sanctions disciplinaires auxquelles ce manquement pourrait donner lieu, verser au Trésor une somme correspondant au traitement et à l'indemnité de résidence perçus en qualité d'inspecteur élève ainsi qu'aux dépenses de toute nature résultant du séjour à l'école (...) » ; que l'objet de ces dispositions à caractère statutaire est d'assurer que les fonctionnaires dont les frais de formation à l'Ecole nationale des impôts ont été pris en charge par l'Etat soient recrutés par lui et, dans l'intérêt du bon fonctionnement de l'administration, demeurent à son service pendant une durée minimale de huit années ; qu'il est prévu à cet effet que les fonctionnaires recrutés à l'issue de leur scolarité à l'Ecole nationale des impôts signent l'engagement de servir l'Etat pendant une durée minimale de huit années ; qu'ainsi l'indemnité dont, sur le fondement des dispositions réglementaires précitées, ces fonctionnaires sont redevables au Trésor, en cas de rupture de leur engagement de servir avant l'expiration de cette durée, ne revêt pas le caractère d'une sanction ; que, par suite, M. X ne peut utilement invoquer la violation du principe de proportionnalité des peines ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice des communautés européennes d'aucune question préjudicielle, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ; que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

06VE00672 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE00672
Date de la décision : 09/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BLIN
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : PELLOUX-CELIMENE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-06-09;06ve00672 ?
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