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13/05/2008 | FRANCE | N°07VE02006

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 13 mai 2008, 07VE02006


Vu la requête, enregistrée en télécopie le 3 août et en original le 29 août 2007, présentée pour M. Kamal X, demeurant au centre de rétention administrative, ..., par Me Taelman, avocat au barreau du Val-de-Marne ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707741 du 31 juillet 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2007 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du m

me jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annule...

Vu la requête, enregistrée en télécopie le 3 août et en original le 29 août 2007, présentée pour M. Kamal X, demeurant au centre de rétention administrative, ..., par Me Taelman, avocat au barreau du Val-de-Marne ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0707741 du 31 juillet 2007 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 2007 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 10 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre doit être annulée pour défaut de base légale ; qu'elle est entachée de défaut de motivation ; que le préfet ne pouvait décider de le reconduire à la frontière avant que l'office français de protection des réfugiés et apatrides n'ait statué sur sa demande de réexamen de sa situation ; qu'il entretient une relation depuis 2006 avec une ressortissante française avec laquelle il s'est fiancé en juin 2007 et qu'il a l'intention d'épouser ; que la mesure de reconduite prise à son encontre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le Bengladesh comme pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 avril 2008 :

- le rapport de Mme Garrec, magistrat désigné ;
- les observations de Me Taelman, avocat de M. X ;
- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;


Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi susvisée du 24 juillet 2006 et entrée en vigueur le 29 décembre 2006, date de la publication du décret du 23 décembre 2006 pris pour son application : «L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration.» et qu'aux termes du II du même article : «L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité» ;

Considérant qu'à compter de l'entrée en vigueur de ces dispositions, la procédure de l'obligation de quitter le territoire français est la seule applicable lorsque l'autorité administrative refuse à un étranger, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, ou lorsqu'elle lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte ou son autorisation provisoire de séjour ; qu'un arrêté de reconduite à la frontière peut toutefois être pris à l'encontre de l'étranger qui avait fait l'objet de l'une de ces mesures avant la publication du décret du 23 décembre 2006 si cet étranger entre par ailleurs dans le champ d'application du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 24 juillet 2006, qui vise le cas de l'étranger qui ne peut justifier être entré régulièrement en France à moins d'être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité bengladaise, ne justifie pas être entré régulièrement en France en 2001 ; que sa demande de statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 5 mai 2002, confirmée le 19 septembre 2003 par la commission des recours des réfugiés le 19 septembre 2003 ; qu'à la date de l'arrêté de reconduite à la frontière, il n'était pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté de reconduite à la frontière énonce les considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde ; qu'ainsi, il est suffisamment motivé ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 742-1 du même code : « Lorsqu'il est admis à séjourner en France en application des dispositions du chapitre 1er du présent titre, l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile se voit remettre un document provisoire de séjour lui permettant de déposer une demande d'asile auprès de l'office français de protection des réfugiés et apatrides. L'office ne peut être saisi qu'après la remise de ce document au demandeur. (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : « L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. (...) » ; qu'aux termes de l'article R. 723-3 du même code : « (...) Lorsque, à la suite d'une décision de rejet devenue définitive, la personne intéressée entend soumettre à l'office des éléments nouveaux, sa demande de réexamen doit être précédée d'une nouvelle demande d'admission au séjour et être présentée selon la procédure prévue à l'article R. 723-1. (...) » ;

Considérant que M. X, après s'être vu refuser la qualité de réfugié, comme il a été dit ci-dessus, par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 5 mai 2002, confirmée le 19 septembre 2003 par la commission des recours des réfugiés, a saisi directement l'office français de protection des réfugiés et apatrides d'une demande de réexamen de son dossier le 26 juillet 2007, sans la faire précéder d'une nouvelle demande d'admission au séjour comme le prévoient les dispositions de l'article R. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que les allégations de M. X selon lesquelles il se serait adressé à trois reprises sans succès aux services de la préfecture en vue d'obtenir une nouvelle demande d'admission au séjour ne sont pas établies ; qu'ainsi, la décision attaquée n'a pas été prise au terme d'une procédure irrégulière ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : «1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui» ;
Considérant que si M. X, entré en France en 2001, fait valoir qu'il entretient depuis 2006 une relation avec une ressortissante française, il ressort des pièces du dossier que cette relation, à la date de la décision attaquée, était récente et que son mariage avec celle-ci, le 6 octobre 2007, est postérieur à ladite décision ; que, compte tenu des conditions d'entrée et de séjour en France de M. X, l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 25 juillet 2007 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'ainsi, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants» ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1°) A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou la commission de recours des réfugiés lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2°) Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3°) Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 » ;

Considérant que si M. X soutient qu'il serait exposé, en cas de retour au Bengladesh, à des traitements inhumains et dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne fournit à l'appui de ses allégations aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques qu'il encourrait personnellement dans son pays d'origine en raison de son appartenance à la Ligue Awami ; que, par suite, la décision du préfet des Hauts-de-Seine fixant, notamment, le Bengladesh comme pays de renvoi, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de ladite convention ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. X aux fins d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ces conclusions ne peuvent également qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
N°07VE02006
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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07VE02006
Date de la décision : 13/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sylvie GARREC
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : TAELMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-05-13;07ve02006 ?
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