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21/02/2008 | FRANCE | N°07VE02199

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 21 février 2008, 07VE02199


Vu la requête, enregistrée le 10 août 2007 par télécopie et le 17 août 2007 en original, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0704935 en date du 11 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé sa décision du 18 avril 2007 en tant qu'elle oblige Mme X à quitter le territoire français dans le délai d'un mois à compter de sa notification et qu'elle désigne le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination et, d'autre part, a rejeté le

surplus des conclusions de la requête de Mme X ;

2°) de rej...

Vu la requête, enregistrée le 10 août 2007 par télécopie et le 17 août 2007 en original, présentée par le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0704935 en date du 11 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé sa décision du 18 avril 2007 en tant qu'elle oblige Mme X à quitter le territoire français dans le délai d'un mois à compter de sa notification et qu'elle désigne le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination et, d'autre part, a rejeté le surplus des conclusions de la requête de Mme X ;

2°) de rejeter la demande de Mme X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Il soutient que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision attaquée manque en fait ; que l'arrêté attaqué ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale ; que la requérante n'établit pas encourir de risques en cas de retour dans son pays d'origine ;
……………………………………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2008 :

- le rapport de M. Bélaval, président de la cour ;
- et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé à la demande de Mme X la décision du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE du 18 avril 2007 prononçant à l'encontre de l'intéressée une obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de Mme X, tendant à l'annulation de cette décision en tant qu'elle lui a refusé un titre de séjour ; que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE fait appel de ce jugement en tant qu'il a annulé l'obligation de Mme X de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination ; qu'en ce qui la concerne, Mme X conclut à l'annulation du jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre le refus de titre de séjour contenu dans cette décision ;

Sur les conclusions de Mme X tendant à l'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé :

Considérant que les conclusions contenues dans le mémoire enregistré le 7 septembre 2007, soit après l'expiration du délai d'appel applicable en l'espèce, doivent être regardées comme tendant, par la voie du recours incident, à l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle a opposé un refus de séjour à l'intéressée ;

Considérant en premier lieu que par un arrêté du 5 avril 2007, dont il n'est pas établi qu'il n'a pas été régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture dès le 15 avril 2007, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a accordé à M. Philippe Jouve, adjoint au chef du bureau des étrangers de la préfecture, une délégation de signature à l'effet de signer notamment les refus de délivrance ou de renouvellement de titres de séjour ; que la décision attaquée entrait dans le cadre de cette délégation ; qu'il n'est pas établi, qu'ainsi que le soutient Mme X, les membres du corps préfectoral de la direction de la population et de la citoyenneté de la préfecture n'étaient ni absents ni empêchés le jour de la signature de la décision litigieuse ; que par suite le moyen tiré de ce que le refus de séjour aurait été pris par une autorité incompétente ne saurait être accueilli ;

Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (…) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; » ; et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant que si Mme X fait valoir que sa fille unique s'est vu délivrer un titre de séjour à compter du 22 mars 2007, date de sa majorité, et que, poursuivant ses études et dépourvue de ressources, cette fille, désormais en situation régulière, a besoin de la présence de ses parents à ses côtés pour poursuivre ses études, cette circonstance n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de l'âge auquel Mme X est entrée sur le territoire français, du fait que son époux est également en situation irrégulière et de la très grande brièveté à la date de la décision attaquée du séjour régulier en France de sa fille, dont il n'est pas établi qu'elle ne puisse ni poursuivre ses études, ni exercer une activité professionnelle dans son pays d'origine, de nature à révéler une violation des dispositions et des stipulations précitées, non plus qu'une erreur manifeste commise par le préfet dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation des intéressés ;

Considérant en dernier lieu que si Mme X entend invoquer le bénéfice de la circulaire du 13 juin 2006, elle ne saurait le faire utilement dès lors que cette circulaire est dépourvue de toute portée réglementaire ;

Considérant enfin que le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, laquelle n'implique pas par elle-même l'éloignement de l'étranger vers son pays d'origine ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre le refus de séjour qui lui a été opposé ; que ce rejet n'impliquant aucune mesure d'exécution, elle n'est pas non plus fondée à demander qu'il soit enjoint au PREFET DES HAUTS-DE-SEINE de lui délivrer un titre de séjour ; que dès lors, à les supposer même recevables, les conclusions incidentes de Mme X ne sauraient en tout état de cause être accueillies ;

Sur la requête principale du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE :

Considérant que pour annuler la décision du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE en date du 18 avril 2007 en tant que cette décision a prononcé à l'encontre de Mme X une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois à compter de sa notification, le Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur la circonstance que l'arrêté du préfet n° 2006-035 du 20 mars 2006 n'avait pas donné délégation à M. Philippe Jouve, adjoint au chef du bureau des étrangers de la préfecture et signataire de la décision litigieuse, afin de signer au nom du préfet les décisions portant obligation de quitter le territoire français sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ; que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE fait cependant valoir à l'appui de son recours que par un arrêté du 5 avril 2007, dont il n'est pas établi qu'il n'a pas été régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture dès le 15 avril 2007, il a accordé à M. Jouve une nouvelle délégation de signature ; que cette délégation, si elle ne mentionne pas expressément les décisions portant obligation de quitter le territoire français au nombre des actes que M. Jouve est autorisé à signer, doit être regardée comme l'autorisant à signer, dans les conditions qu'il fixe, lesdites décisions, dès lors qu'elle précise que ce fonctionnaire est autorisé à signer notamment « tous les documents et pièces relevant des attributions des trois sections du bureau », et que, parmi les attributions du chef de la section « éloignement », les décisions de quitter le territoire français sont cette fois expressément mentionnées ; qu'il n'est pas établi qu'ainsi que le soutient Mme X, les membres du corps préfectoral et le directeur de la population et de la citoyenneté de la préfecture n'étaient ni absents ni empêchés le jour de la signature de la décision litigieuse ; que par suite le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a retenu l'incompétence dont serait entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de Mme X pour annuler cette décision ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués en première instance et en appel par Mme X à l'encontre des décisions annulées par le tribunal administratif ;

Considérant que, pour les motifs énoncés ci-dessus, Mme X n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination a été prise par une autorité incompétente ;

Considérant que pour les raisons également exposées ci-dessus, les moyens tirés de la violation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachées les décisions litigieuses, ne sauraient être accueillis ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains et dégradants » ; que si Mme X, dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par trois décisions de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date des 4 juillet 2002, 14 octobre 2002 et 7 novembre 2007, puis par la commission de recours des réfugiés les 3 décembre 2003 et 9 mars 2007, fait valoir que sa vie est menacée en Ukraine, les éléments produits par l'intéressée ne permettent pas de conclure à la réalité des risques auxquels elle serait exposée en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 18 avril 2007 en tant qu'il oblige Mme X à quitter le territoire français dans le délai d'un mois à compter de sa notification et qu'il fixe le pays de destination ;


Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X la somme que celle-ci réclame sur leur fondement ;

DECIDE :



Article 1er : L'article 1er du jugement n° 0704935 en date du 11 juillet 2007 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Versailles tendant à l'annulation de la décision portant l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 18 avril 2007 et de la décision fixant le pays de destination, ainsi que les conclusions de sa requête d'appel sont rejetées.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE02199
Date de la décision : 21/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BELAVAL
Rapporteur ?: M. Philippe BELAVAL
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : BOUDJELTI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-02-21;07ve02199 ?
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