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13/11/2007 | FRANCE | N°07VE00125

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 13 novembre 2007, 07VE00125


Vu le recours, enregistré à la Cour administrative d'appel de Versailles le 18 janvier 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505898 en date du 21 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société anonyme Médicamat la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle

a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 pour un montant de 64 283 eu...

Vu le recours, enregistré à la Cour administrative d'appel de Versailles le 18 janvier 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505898 en date du 21 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société anonyme Médicamat la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et aux contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 pour un montant de 64 283 euros ;

2°) de remettre à la charge de la société anonyme Médicamat les droits supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles, ainsi que des pénalités y afférentes, mis à sa charge au titre de l'exercice clos en 1999, dans la limite d'une réintégration dans ses résultats imposables déclarés de la somme de 1 050 000 F (160 071, 46 euros) ;

Il soutient :

- que la réglementation comptable commande de ne pas provisionner un risque contentieux dans les situations où la mise en cause de la responsabilité civile est couverte par une police d'assurance ; que ce n'est que dans l'hypothèse d'une couverture partielle, ou d'une incertitude quant à la couverture même dudit risque, qu'une provision peut être constatée sous réserve que la charge soit suffisamment probable à la clôture de l'exercice, en application l'article 39-1 5° du code général des impôts ; que cette situation se justifie par le fait qu'un contrat d'assurance transfère l'indemnisation du risque de la personne de l'assuré vers celle de l'assureur, lequel au demeurant constitue des provisions pour risques en cours ;

- que le courrier du GAN en date du 26 octobre 1999 révèle la prise en charge par ce dernier du sinistre née de l'introduction d'une instance judiciaire en dommages et intérêts devant les tribunaux canadiens de la part de Mme Rudnik ; que les réserves d'usage de cette lettre doivent s'envisager seulement comme la possibilité, pour la compagnie d'assurance, de refuser a posteriori à la société le bénéfice de la garantie prévue dans la police ; qu'ainsi, jusqu'à signification du contraire de la part du GAN, la société Médicamat devait regarder le litige comme étant pris en charge par l'assureur ; que le courrier du GAN en date du 7 mars 2006, qui renvoie à celui du 5 août 2002, confirme l'analyse du service ; qu'en outre, la réalisation directement par le GAN d'une transaction avec la partie adverse en lieu et place de la société Médicamat implique nécessairement que l'assureur a agi dans le cadre contractuel de la police d'assurance ;

- que la société Médicamat n'établit pas avoir repris la provision litigieuse au cours de l'exercice où elle a eu connaissance de la mise en oeuvre effective de la garantie ;

- qu'ainsi, le risque inhérent à la procédure engagée par cette dernière pouvait seulement être considéré comme éventuel, et non probable ;

- que le montant de la provision à réintégrer s'établit à 1 050 000 F, déduction faite de la franchise laissée à la charge de la société dans le cadre de la police d'assurance ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2007 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller ;

- les observations de Me Fouché ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Vu, enregistrée le 23 octobre 2007, la note en délibérée adressée par la société Médicamat ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant [...] notamment : […] 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables [...]» ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

Considérant que la SA Médicamat a enregistré à la clôture de l'exercice, au 31 décembre 1999, une provision d'un montant de 1 150 000 F en vue de faire face au risque constitué par l'action juridictionnelle introduite le 2 juillet 1999 par une résidente canadienne à raison du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait de l'utilisation des matériels médicaux vendus par la société Médicamat ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité portant notamment sur cet exercice, l'administration a réintégré l'intégralité de la provision dans les résultats de la requérante au motif qu'un contrat d'assurance souscrit auprès de l'assureur GAN stipulait couvrir « la société pour les exportations vers le marché nord américain, assortie d'un plafond de garantie de 5 millions de francs, avec franchise de 100 000 francs, sur l'ensemble des dommages corporels matériels et immatériels, y compris les frais de défense » ;

Considérant qu'il appartient au juge de l'impôt de vérifier que le contribuable qui constitue une provision en vue de se garantir contre un risque de perte ou de charges pour lequel il a souscrit un contrat d'assurance, apporte la preuve que le risque objet de la provision n'est pas couvert par ce contrat, dès lors que seule une exclusion de la garantie d'assurance est de nature à rendre probable la survenance de ce risque et, par suite, à autoriser la constitution d'une provision à la clôture de l'exercice ;

Considérant que, pour prononcer la décharge des impositions litigieuses, les premiers juges, en affirmant que la souscription d'une police d'assurance « en vue de se garantir contre la condamnation au paiement de dommages et intérêts prononcés par une juridiction ne préjuge ni du montant, ni de l'existence même d'une telle garantie », sans vérifier si les clauses contractuelles de la police d'assurance souscrite entendaient exclure en totalité ou partiellement de sa couverture le risque contentieux en cours, ont commis une erreur de droit ; que, par suite, il y a lieu d'annuler le jugement qui en procède ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Médicamat devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le contrat d'assurance souscrit par la société Médicamat auprès du GAN garantissait l'assuré contre le risque d'avoir à indemniser les utilisateurs de ses matériels médicaux exportés vers le marché nord américain, dans la limite d'un plafond de 5 000 000 F et d'une franchise de 100 000 F ; que, par suite, ledit contrat était, à preuve du contraire, présumé couvrir la société contre le risque d'avoir à régler cette somme pour la part qui excède la franchise de 100 000 F prévue au contrat ; que si la société Médicamat invoque un courrier de son assureur en date du 26 octobre 1999, ce courrier se borne à informer l'assuré de ce que la déclaration de sinistre est transmise à un cabinet d'expertise ; qu'ainsi, le risque allégué d'une défaillance de l'assureur n'est pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE l'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont intégralement déchargé la société des cotisations litigieuses alors même qu'elle était seulement fondée à constituer une provision de 100 000 F, correspondant au montant de la franchise laissée à sa charge au contrat d'assurance ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que la somme de 3 000 euros réclamée par la société Médicamat soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 21 septembre 2006 est annulé.

Article 2 : Le bénéfice de la société Médicamat au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1999, sera calculé, pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés, en ajoutant au montant des résultats déclaré la somme de 1 050 000 F.

Article 3 : L'impôt sur les sociétés et les contributions additionnelles à cet impôt au titre de l'année 1999, calculés conformément aux bases définies à l'article 1er, sont remis à la charge de la société Médicamat, ainsi que les pénalités correspondantes.

Article 4 : Les conclusions de la société Médicamat tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administratif sont rejetées.

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N° 07VE00125


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE00125
Date de la décision : 13/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : FOUCHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-11-13;07ve00125 ?
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