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06/03/2007 | FRANCE | N°06VE00860

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 06 mars 2007, 06VE00860


Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2006, présentée pour Mlle Micheline X, demeurant chez M. Y, ..., par Me Piquot-Joly ; Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505662 du 20 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2005 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisi

ons ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autoris...

Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2006, présentée pour Mlle Micheline X, demeurant chez M. Y, ..., par Me Piquot-Joly ; Mlle X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0505662 du 20 mars 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2005 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer dans un délai d'un mois sur son droit à un titre de séjour ;

4°) de condamner l'Etat à verser à Me Piquot-Joly la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à la part contributive de l'Etat ;

Elle soutient que l'arrêté de reconduite à la frontière contesté a été pris par une autorité incompétente et n'est pas suffisamment motivé ; qu'il méconnaît les articles 3, 6, 10 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, elle a été menacée physiquement à plusieurs reprises en Haïti en raison de son appartenance au Mouvement national des mouvements démocratiques (KONAKOM) ; qu'elle craint de subir des représailles de la part de la famille de sa camarade avec laquelle elle s'est violemment disputée, de ne pas pouvoir bénéficier d'un procès équitable et d'être soumise à des conditions inhumaines de détention ;

………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2007 :

- le rapport de M. Davesne, magistrat désigné ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la notification du refus ou du retrait » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X, de nationalité haïtienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 30 décembre 2004, de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 27 décembre 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant, en premier lieu, que, par arrêté du 10 janvier 2005, publié au bulletin des informations administratives du département le 13 janvier 2005, M. Z, sous-préfet du Raincy, a reçu du préfet de la Seine-Saint-Denis délégation à l'effet de signer diverses décisions à l'exception de certaines d'entres elles au nombre desquelles ne figurent pas les arrêtés de reconduite à la frontière ; que la circonstance que l'ampliation de l'arrêté de délégation de signature a été signé par le chef du bureau de la coordination de la préfecture qui n'aurait pas lui-même agi dans le cadre d'une délégation de signature régulière est sans influence sur la légalité de cet arrêté ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose la publication d'un arrêté préfectoral de délégation de signature au journal officiel de la République française ;

Considérant, en second lieu, que l'arrêté attaqué, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains et dégradants » ;

Considérant que Mlle X fait valoir qu'elle a été menacée physiquement à plusieurs reprises dans son pays en raison de son appartenance au Mouvement national des mouvements démocratiques (KONAKOM) et que, s'étant disputée violemment avec une camarade de classe, elle craint de subir des représailles de la part de la famille de cette dernière qui est très influente en Haïti, de ne pas pouvoir bénéficier d'un procès équitable et d'être soumise à des conditions inhumaines de détention ; que, toutefois, en se bornant à produire une copie d'un mandat d'arrêt établi le 19 août 2001 et mentionnant une inculpation pour « rébellion et combat », d'une lettre du 20 septembre 2001 par laquelle l'intéressée a porté plainte auprès du juge de paix de la commune d'Aquin contre les personnes qui auraient perturbé une réunion politique qu'elle avait organisée, d'un procès-verbal de constat de cambriolage du salon de beauté de la requérante dressé le 10 août 2001 par ce même juge et d'un témoignage d'une camarade de classe, Mlle X n'établit pas la réalité des risques auxquels elle serait personnellement exposée en cas de retour en Haïti ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que Mlle X ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, des articles 6, 10 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatifs respectivement au droit à un procès équitable, à la liberté d'expression et à la liberté de réunion et d'association ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer dans un délai d'un mois sur son droit à un titre de séjour, ne peuvent qu'être rejetées ; qu'enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mlle X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.

N°06VE00860

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 06VE00860
Date de la décision : 06/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : PIQUOT-JOLY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-03-06;06ve00860 ?
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