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21/11/2006 | FRANCE | N°06VE00370

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 21 novembre 2006, 06VE00370


Vu la requête, enregistrée le 20 février 2006, présentée par le PREFET DES HAUTS- DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600641 du 24 janvier 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté, en date du 21 janvier 2006, décidant la reconduite à la frontière de M. Adil X et lui a enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée

par M. Adil X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Il soutient que c'es...

Vu la requête, enregistrée le 20 février 2006, présentée par le PREFET DES HAUTS- DE-SEINE ; le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600641 du 24 janvier 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté, en date du 21 janvier 2006, décidant la reconduite à la frontière de M. Adil X et lui a enjoint de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Adil X devant le Tribunal administratif de Versailles ;

Il soutient que c'est à tort que le premier juge n'a pas substitué, comme fondement légal de l'arrêté de reconduite à la frontière contesté, les dispositions du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à celles du 2° de ce même article, alors que M. X s'est maintenu plus d'un mois après la notification, le 10 octobre 2005, de la décision du 5 octobre 2005, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que la circonstance que l'intéressé a présenté, le 1er décembre 2005, un recours gracieux contre cette décision, qui n'était ainsi pas devenue définitive à la date de l'arrêté contesté, ne faisait pas obstacle à la mesure de reconduite à la frontière ; que, contrairement à ce qu'a estimé le magistrat délégué du Tribunal administratif de Versailles, l'arrêté de reconduite à la frontière n'a pas été pris en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, M. X n'est arrivé en France, selon ses propres déclarations, qu'en août 2000, qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays où réside l'un de ses frères et qu'il est célibataire et sans charge de famille ; que le moyen, soulevé en première instance, tiré de l'incompétence dont serait entaché l'arrêté contesté manque en fait ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2006 :

- le rapport de M. Davesne, magistrat délégué ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté, en date du 21 janvier 2006, par lequel le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a décidé de reconduire à la frontière M. X, de nationalité marocaine, le premier juge a estimé, d'une part, que les dispositions du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent être substituées, comme fondement légal de cet arrêté, à celles du 2° du même article et, d'autre part, que cet arrêté a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

Sur le fondement légal de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation de visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 10 octobre 2005, de la décision du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE du 5 octobre 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; qu'ainsi, alors même que l'intéressé avait présenté un recours gracieux contre cette décision sur lequel le préfet n'avait pas statué à la date de l'arrêté contesté, il entrait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où le préfet peut décider de reconduire à la frontière un étranger ; que la circonstance que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE a pris l'arrêté contesté sur la base, non de ces dispositions, mais de celles du 2° de ce même article, n'est pas de nature à entacher cet arrêté d'illégalité dès lors que les deux dispositions permettent au préfet de prendre la même mesure et que la substitution de la première à la seconde n'a pas pour effet de priver l'intéressé des garanties de procédure qui lui sont offertes par la loi ; qu'ainsi, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur l'erreur commise par le préfet quant au fondement légal de la mesure de reconduite à la frontière et a refusé de procéder à une substitution de base légale ;

Sur le droit au respect de la vie privée et familiale :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X est entré en France en 2000, alors qu'il était âgé de treize ans et a été, depuis lors, régulièrement scolarisé jusqu'à l'obtention, en juillet 2005, de son diplôme de certificat d'aptitude professionnelle d'installateur sanitaire ; qu'il vit auprès de ses parents, qui résident régulièrement en France, ainsi que l'un de ses deux frères ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, alors même que son deuxième frère résiderait au Maroc et qu'il est célibataire et sans charge de famille, l'arrêté de reconduite à la frontière a porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le premier juge s'est fondé sur la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté contesté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES HAUTS-DE-SEINE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement contesté, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté du 21 janvier 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

D E C I D E

Article 1er : La requête du PREFET DES HAUTS-DE-SEINE est rejetée.

N°06VE00370

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 06VE00370
Date de la décision : 21/11/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-11-21;06ve00370 ?
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