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26/05/2006 | FRANCE | N°05VE01142

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 26 mai 2006, 05VE01142


Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2005, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Mehmet X, demeurant ..., par Me Savignat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503919 en date du 9 mai 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2005 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'ann

uler l'arrêté en date du 25 avril 2005 ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la ...

Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2005, au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Mehmet X, demeurant ..., par Me Savignat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503919 en date du 9 mai 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 avril 2005 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 25 avril 2005 ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que c'est à tort que le magistrat délégué a considéré qu'en application du décret du 29 avril 2004 le secrétaire général de la préfecture pouvait signer l'arrêté attaqué sans justifier de l'absence ou de l'empêchement du préfet ; que, n'ayant jamais été entendu par les services de la préfecture des Hauts-de-Seine depuis l'année 2000, il n'a pas été procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle avant d'ordonner sa reconduite à la frontière ; que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la décision fixant le pays de renvoi devra être annulée car un retour dans son pays d'origine l'exposerait, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à un risque de traitement inhumain ou dégradant ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers en France et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2006 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 12 octobre 2004, de la décision en date du 11 octobre 2004 l'invitant à quitter le territoire après que sa demande d'asile ait été rejetée ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 susvisé : « Le préfet de département peut donner délégation de signature : / 1° En toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services des administrations civiles de l'Etat dans le département, au secrétaire général et aux chargés de mission (…) » ; qu'aux termes de l'article 45 du même décret : « I. - En cas d'absence ou d'empêchement du préfet, sans que ce dernier ait désigné par arrêté un des sous-préfets en fonction dans le département pour assurer sa suppléance, celle-ci est exercée de droit par le secrétaire général de la préfecture. (…) » ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté n° 2004-30 du 2 juin 2004, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département du mois de juin 2004 : « Délégation de signature est donnée à Monsieur Vincent Y, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département des Hauts-de-Seine, à l'exception des : / Mesures de réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 , / Déclinatoires de compétence / Arrêtés de conflit sauf en cas d'empêchement du préfet » ; que les décisions relatives aux « attributions de l'Etat dans le département » comprennent, sauf s'il en est disposé autrement par l'arrêté portant délégation de signature, les décisions préfectorales en matière de police des étrangers ; qu'il résulte de la rédaction des dispositions en cause que la délégation consentie à M. Y s'entend y compris en dehors des périodes où le préfet des Hauts-de-Seine est empêché ou absent ; que les dispositions précitées de l'arrêté du 2 juin 2004 donnaient dès lors à M. Y compétence pour signer l'arrêté de reconduite à la frontière visant M. X ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas procédé à l'examen particulier et complet de la situation personnelle de M. X avant d'ordonner sa reconduite à la frontière ou qu'il se serait fondé sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si le requérant fait notamment valoir qu'il vit en France depuis cinq ans et y a tissé des liens, cette seule circonstance, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour et aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière n'est pas de nature à faire regarder ladite mesure comme ayant porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet des Hauts-de-Seine n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité, ou qui lui a délivré un titre de voyage en cours de validité ou encore à destination de tout autre pays dans lequel il est légalement admissible, que le préfet des Hauts-de-Seine doit être regardé comme ayant ainsi décidé que ce dernier pourrait être reconduit, notamment, dans le pays dont il a la nationalité ;

Considérant que le dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose qu'un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce dernier texte énonce que : «Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants» ;

Considérant que si M. X dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 31 juillet 2002, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 18 novembre 2003 soutient qu'il craint des poursuites et des traitements dégradants en cas de retour en Turquie en raison de ses origines kurdes et de son militantisme au sein d'un parti d'opposition favorable à l'indépendance du Kurdistan, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité des risques encourus en cas de retour en Turquie ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2005 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a ordonné sa reconduite à la frontière et fixé le pays à destination duquel il sera reconduit ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

05VE01142 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE01142
Date de la décision : 26/05/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : SAVIGNAT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-05-26;05ve01142 ?
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