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05/07/2005 | FRANCE | N°05VE00149

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 05 juillet 2005, 05VE00149


Vu la requête, enregistrée le 2 février 2005 en télécopie et le 4 février 2005 en original, présentée pour M. Y... , élisant domicile chez Me X..., immeuble les Cormeilles, impasse de la croix blanche à Montigny les Cormeilles (95370), par Me X... ; M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0410004 du 3 janvier 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 octobre 2004 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière

;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à l'admin...

Vu la requête, enregistrée le 2 février 2005 en télécopie et le 4 février 2005 en original, présentée pour M. Y... , élisant domicile chez Me X..., immeuble les Cormeilles, impasse de la croix blanche à Montigny les Cormeilles (95370), par Me X... ; M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0410004 du 3 janvier 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 octobre 2004 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre à l'administration d'organiser son retour en France ;

Il soutient que l'arrêté ne pouvait lui être opposé sans lui avoir été préalablement notifié ; qu'en exécutant l'arrêté litigieux avant l'audience, l'administration l'a privé de la possibilité d'organiser sérieusement sa défense et de former les voies de recours qui lui sont offertes par la loi ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2005 :

- le rapport de Mme Grand d'Esnon, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I. de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relatif à la reconduite à la frontière, l'audience devant le tribunal administratif « se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou à son délégué qu'il en désigne un d'office. » ; qu'aux termes du II. du même article, l'arrêté par lequel le préfet décide qu'un étranger sera reconduit à la frontière « ne peut être exécuté avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative ou de sept jours lorsqu'il est notifié par voie postale ou, si le président du tribunal administratif ou son délégué est saisi, avant qu'il n'ait statué. » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'audience est tenue dans des conditions irrégulières si l'étranger dont le recours est examiné a été empêché d'y assister par le fait de l'administration, alors même qu'il y est représenté par un avocat ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, le 29 décembre 2004, M. , ressortissant algérien, qui s'était présenté à la préfecture du Val-d'Oise pour s'informer de l'état de l'instruction d'une demande de titre de séjour qu'il avait déposée, a été placé en rétention, l'administration ayant estimé qu'il s'était soustrait à la notification, et par suite à l'exécution, tant de l'invitation à quitter le territoire français en date du 22 juin 2004 que de l'arrêté en date du 12 octobre 2004 prononçant sa reconduite à la frontière ; que toutefois ces décision lui avaient été notifiées à une ancienne adresse alors que l'intéressé avait dûment fait connaître son changement d'adresse ; que le conseil de M. a, dès le 29 décembre 2004, informé l'administration qu'il formait immédiatement un recours contre l'arrêté prononçant la reconduite, ce qu'il a effectivement fait dans la soirée ; que cet arrêté a néanmoins été exécuté le lendemain, 30 décembre 2004 ; qu'en exposant que l'administration l'a ainsi privé de la possibilité d'organiser sérieusement sa défense et de former les voies de recours qui lui sont offertes par la loi, M. doit être regardé comme soulevant un moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivi par le magistrat délégué qui a statué sur sa demande d'annulation nonobstant l'impossibilité pour lui de se défendre à l'audience du fait de l'exécution de l'arrêté qu'il contestait ; qu'il est constant que M. a été empêché d'assister à l'audience ; qu'il suit de là que le jugement attaqué a été rendu selon une procédure irrégulière alors même que l'avocat de M. a pu assister à l'audience ; que ce jugement doit, par suite, être annulé ;

Considérant que M. demande, par voie de conséquence de l'annulation de l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière pris à son encontre, qu'il soit enjoint à l'administration d'organiser son retour sur le territoire métropolitain ; que, toutefois, la présente décision, qui ne se prononce pas sur la légalité de cet arrêté mais se borne à constater l'irrégularité du jugement et à en prononcer pour ce motif l'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution telle que prévu aux articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer M. devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise afin que ce dernier statue sur sa demande après s'être assuré que M. n'est pas empêché de se présenter à l'audience du fait de son éloignement du territoire français ; qu'il appartiendra au tribunal administratif, le cas échéant, d'enjoindre à l'administration de lever, pour ce faire, tout obstacle éventuel au retour de l'intéressé ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0410004 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 3 janvier 2005 est annulé.

Article 2 : M. est renvoyé devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise pour qu'il soit statué sur sa demande.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 05VE00149
Date de la décision : 05/07/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-03 ÉTRANGERS. - RECONDUITE À LA FRONTIÈRE. - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES. - AUDIENCE - ETRANGER EMPÊCHÉ D'ASSISTER À L'AUDIENCE PAR LE FAIT DE L'ADMINISTRATION - AUDIENCE TENUE DANS DES CONDITIONS IRRÉGULIÈRES, ALORS MÊME QUE LE REQUÉRANT ÉTAIT REPRÉSENTÉ PAR SON AVOCAT - CONSÉQUENCE - IRRÉGULARITÉ DU JUGEMENT [RJ1].

z335-03-03z Aux termes du I de l'article 22 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relatif à la reconduite à la frontière, l'audience devant le tribunal administratif « se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président ou à son délégué qu'il en désigne un d'office ». Aux termes du II du même article, l'arrêté par lequel le préfet décide qu'un étranger sera reconduit à la frontière « ne peut être exécuté avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification lorsque l'arrêté est notifié par voie administrative ou de sept jours lorsqu'il est notifié par voie postale ou, si le président du tribunal administratif ou son délégué est saisi, avant qu'il n'ait statué. ». Il résulte de ces dispositions que l'audience est tenue dans des conditions irrégulières si l'étranger dont le recours est examiné a été empêché d'y assister par le fait de l'administration, alors même qu'il y est représenté par un avocat. Cette irrégularité de l'audience entraîne celle du jugement.


Références :

[RJ1]

Rapp. CE, 15 avril 1992, Timera, T. p. 982 et 1179.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Jenny GRAND D'ESNON
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : DELAISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-07-05;05ve00149 ?
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