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26/04/2005 | FRANCE | N°05VE00022

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 26 avril 2005, 05VE00022


Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2005 par télécopie et le 12 janvier 2005 en original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406569 du 30 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du

11 août 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme Ana Tereza X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal Administratif de Cergy ;

Il soutient qu

e l'époux de Mme X se trouve lui-même en situation irrégulière, que l'arrêté de reconduite n'e...

Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2005 par télécopie et le 12 janvier 2005 en original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0406569 du 30 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du

11 août 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme Ana Tereza X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal Administratif de Cergy ;

Il soutient que l'époux de Mme X se trouve lui-même en situation irrégulière, que l'arrêté de reconduite n'empêche pas Mme X et son mari de mener une vie familiale normale avec leurs trois enfants dans leur pays d'origine et que l'état de santé de Mme X ne fait plus obstacle à l'exécution de l'arrêté de reconduite ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 février 2005 en télécopie et le 14 février 2005 en original, présenté pour Mme X, par Me Gondard ;

Mme X conclut :

1°) au rejet du recours du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ;

2°) à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 1 200 € sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la décision de refus de titre de séjour en date du 23 juin 2004 est illégale et peut être contestée par la voie de l'exception d'illégalité ; que cette décision est entachée de vice de procédure et d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision du Président de la Cour administrative d'appel de Versailles, en date du 3 janvier 2005, donnant délégation à M. Bresse pour l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article R. 776-19 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2005 :

- le rapport de M. Bresse, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité capverdienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 25 juin 2004, de la décision du préfet du 23 juin 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que si Mme X, entrée en France le 30 mars 1998, fait valoir notamment que deux de ses enfants mineurs, Régis Amarildo et Rui Iliano, âgés de 10 ans et 5 ans, sont parfaitement intégrés à la société française où ils sont scolarisés, et qu'elle dispose de l'ensemble de ses attaches en France, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de Mme X, et en particulier des circonstances qu'elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches au Cap-Vert et que son mari fait également l'objet d'une décision de refus de titre de séjour, l'arrêté attaqué n'a pas porté eu égard aux buts en vue desquels il a été pris, une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale, dès lors qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que la requérante ne pourrait pas poursuivre avec son époux et ses enfants une vie familiale normale dans leur pays d'origine ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour prononcer l'annulation de l'arrêté de reconduite du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS en date du 11 août 2004 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et devant la cour ;

Considérant que Mme X se prévaut, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision du 23 juin 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que cette décision n'était pas devenue définitive à la date du 30 juillet 2004, date à laquelle elle a introduit sa demande au Tribunal administratif de Versailles ; que l'exception d'illégalité présentée est, par suite, recevable ;

Considérant que Mme X soutient que cette décision est entachée d'un vice de procédure du fait de la non-consultation préalable par le préfet de la commission du titre de séjour ; que, toutefois, Mme X a fait une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article 12 bis 11 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ; qu'il ressort du certificat médical en date du 26 avril 2004 établi par le médecin inspecteur de santé publique que l'état de santé de Mme X nécessite une prise en charge médicale, existante dans son pays d'origine et dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que Mme X ne remplit pas les conditions de l'article 12 bis 11 de l'ordonnance précitée ; que par suite, le préfet n'était pas tenu de convoquer la commission du titre de séjour ; que la décision de refus de titre de séjour n'est donc pas entachée d'un vice de procédure ;

Considérant que Mme X, mariée à un compatriote en situation irrégulière, mère de trois enfants, n'apporte pas la preuve de son absence d'attaches au Cap-Vert ; qu'elle ne saurait dès lors se prévaloir de l'article 12 bis 7 de l'ordonnance précitée ou de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'établit pas que la décision de refus de titre serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de cette convention soulevée à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour est inopérante ; que par conséquent, la décision de refus de titre de séjour du 23 juin 2004 ne peut être déclarée illégale par voie d'exception ;

Considérant que Mme X n'apporte aucun élément suffisamment probant pour justifier que son état de santé exigerait son maintien sur le territoire français ; qu'elle n'est dès lors pas fondée, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, à soutenir que l'arrêté attaqué est entaché d'une méconnaissance des dispositions de l'article 12 bis 11 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à demander l'annulation du jugement du 30 novembre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy a annulé son arrêté du 11 août 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme X ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions mêmes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui ne saurait être regardé comme la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme X la somme que celle-ci réclame sur leur fondement ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n°0406569 en date du 30 novembre 2004 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par Mme X et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative devant la Cour sont rejetées.

N°05VE00022

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE00022
Date de la décision : 26/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : GONDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-04-26;05ve00022 ?
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