Vu les ordonnances en date du 16 août 2004, enregistrées au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par lesquelles le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles les requêtes présentées pour M. René X, demeurant ... et SARL GRIGNY PIÈCES AUTO dont le siège est RN 7 à Grigny (91350), par Me Le Goff ;
Vu 1°), sous le numéro 02VE03315, la requête enregistrée le 6 septembre 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle M. René X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0103158-0103168-0103171 en date du 9 juillet 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 mai 2001 par laquelle le maire de la commune de Grigny a décidé d'exercer le droit de préemption urbain pour l'acquisition de la parcelle cadastrée section AB n°5 et l'a condamné à verser à la commune une somme de 300 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Il soutient que la décision est entachée d'un vice de procédure en ce qu'elle a été prise sur la base d'un avis des domaines sollicité avant que la délibération fixant les pouvoirs du nouveau maire ne soit devenue exécutoire ; que les premiers juges ont commis une erreur en considérant que la construction édifiée sur le terrain objet de la décision de préemption était achevée depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée, en sorte que la décision manque de base légale puisqu'elle ne pouvait être prise sur le fondement de l'article R . 213-24 du code de l'urbanisme ; que, compte tenu de l'absence de but précis fixé par la décision attaquée, les premiers juges ne pouvaient affirmer qu'elle ne s'inscrivait pas dans le cadre des opérations pour lesquelles existe une obligation de relogement en application des dispositions de l'article L. 314-1 du code de l'urbanisme ; que le tribunal ne pouvait légalement juger que la décision pouvait être fondée sur l'objectif d'aménagement des espaces situés le long de la nationale 7 en vue de leur requalification et d'un développement durable des activités économiques ; que le terrain se trouve hors du projet d'aménagement, ainsi que le prouve la circonstance que la société a acquitté la taxe locale d'équipement ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu la mise en demeure adressée le 11 juin 2003 à la commune de Grigny en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative et l'avis de réception en date du 16 juin 2003 ;
Vu l'ordonnance en date du 8 avril 2004 par laquelle le président de la première chambre de la Cour administrative d'appel de Paris a prononcé la clôture de l'instruction à la date du 31 août 2004 à midi ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2005 :
- le rapport de Mme Grand d'Esnon, premier conseiller ;
- les observations de Me Tchatat substituant Me Ghaye pour la COMMUNE DE GRIGNY ;
- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées tendent à l'annulation du même jugement ; qu'il y a lieu des les joindre afin d'y statuer par un même arrêt ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête de M. X ;
Considérant qu'aux termes d'un acte en date du 23 mars 2001, la société Compagnie Industrielle Maritime a promis de vendre à M. X pour un prix de 335 387,84 euros soit (2 200 000 francs) un terrain cadastré AB n°5 situé sur le territoire de la commune de Grigny en bordure de la nationale 7, au lieudit la Plaine Basse ; que la décision d'intention d'aliéner a été notifiée le 28 mars 2001 au maire de la commune de Grigny, lequel a décidé, par arrêté en date du 25 mai 2001, d'exercer le droit de préemption urbain au prix de 182 938, 82 euros (1 200 000 francs), décision notifiée à M. X le 5 juin 2001 ; que ce terrain était loué depuis le 1er octobre 1976 par la société Compagnie Industrielle Maritime à la SARL GRIGNY PIECES AUTO, dont M. X est gérant, bail renouvelé en 1994 pour neuf ans ; que la SARL GRIGNY PIECES AUTO, qui a pour objet l'achat et la vente de tous matériels et accessoires quelconques destinés à l'automobile et d'une manière générale toutes activités s'y rattachant, avait fait édifier des constructions industrielles à son usage en 1976 et les avait agrandies en 1997 ;
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant qu'aucun texte de principe ne prohibe, de solliciter ainsi que le maire de Grigny l'a fait, l'estimation du service des domaines avant l'entrée en vigueur de la délibération du conseil municipal fixant ses pouvoirs ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que la décision de préemption serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant en premier lieu, qu'en vertu des dispositions du c) de l'article L. 211-4 du code de l'urbanisme, le droit de préemption urbain n'est pas applicable à l'aliénation d'un immeuble bâti, pendant une période de 10 ans à compter de son achèvement, la date d'achèvement étant, d'après les dispositions de son article R. 213-24, celle de la déclaration d'achèvement intervenue en application de l'article R. 460-1 et en l'absence de déclaration, la preuve de l'achèvement pouvant être apportée par tout moyen ; que, d'une part, les requérants qui n'allèguent pas que la construction ne serait pas achevée, ne sauraient utilement arguer de la circonstance qu'ils n'ont pas déposé de déclaration d'achèvement de travaux autorisés par le permis de construire délivré le 16 septembre 1976 à la SARL GRIGNY PIECES AUTO pour soutenir que l'atelier ainsi édifié ne pouvait être regardé comme construit depuis plus de 10 ans au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme ; que, d'autre part, si la SARL GRIGNY PIECES AUTO a obtenu le 18 avril 1997 un second permis de construire ayant fait l'objet d'une déclaration d'achèvement de travaux le 5 octobre 1998, toutefois, compte tenu de la nature de ces travaux, simple agrandissement de l'atelier préexistant, de la superficie limitée sur laquelle ils portaient et de leur destination identique au reste du bâtiment, l'achèvement des travaux autorisés par ce permis de construire ne saurait être regardé comme conférant à l'immeuble en cause la qualité d'immeuble bâti achevé depuis moins de dix ans au sens des dispositions susmentionnées du c) de l'article L. 211-4 du code de l'urbanisme ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce qu'en raison de la déclaration de travaux du 5 octobre 1998, antérieure de moins de dix ans à la décision de préemption, la décision attaquée serait entachée d'illégalité ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en valeur les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement./ Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 300-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objet de mettre en oeuvre une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre la restructuration urbaine, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels ; qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, d'une part, que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain ; qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle sur laquelle a porté la décision de préemption fait partie du quartier de la Basse Plaine, zone de terrains vagues enserrés entre la voie ferrée et la route nationale 7 ; que la commune qui a dû renoncer à aménager le secteur dans le cadre d'une déclaration d'utilité publique a poursuivi son projet de développement des équipements de ce secteur et de requalification de son environnement en adoptant, en 1988, un programme d'aménagement d'ensemble et en délivrant l'année suivante à une société d'économie mixte, la SAIEM, un arrêté de lotissement artisanal et commercial portant sur les terrains voisins de la parcelle préemptée ; qu'il ressort d'un plan produit par la commune que la quasi totalité des terrains de ce secteur ont d'ores et déjà été acquis par la SAIEM, en sorte que l'acquisition du terrain en litige permettrait de parachever la requalification du secteur en assurant une cohérence d'ensemble ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision attaquée ne reposerait pas sur des motifs de nature à la justifier doit être écarté ;
Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 314-1 du code de l'urbanisme, La personne publique qui a pris l'initiative de la réalisation de l'une des opérations d'aménagement définies dans le présent livre ou qui bénéficie d'une expropriation est tenue, envers les occupants des immeubles intéressés aux obligations prévues ci-après ; que si les lotissements font partie des opérations d'aménagement au sens de ces dispositions, et si ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le projet en vue duquel la décision de préemption a été prise concerne la réalisation d'un lotissement commercial, toutefois à la date de la décision litigieuse, aucune demande de lotissement n'avait été présentée par la commune ; que, dès lors, la préemption ne constituant pas une opération d'aménagement au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme, à la date de la décision de préemption la commune de Grigny ne pouvait être regardée comme ayant pris l'initiative de la réalisation de l'une des opérations d'aménagement définies par le livre III du code de l'urbanisme ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que, les premiers juges ont écarté le moyen tiré de ce que la commune était tenue de faire à la SARL GRIGNY PIECES AUTO une proposition de relogement sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 314-1 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X et la SARL GRIGNY PIÈCES AUTO ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Grigny qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. X et à la SARL GRIGNY PIÈCES AUTO la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X à verser à la commune de Grigny une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes présentées par M. X et par la SARL GRIGNY PIÈCES AUTO sont rejetées.
Article 2 : M. X versera à la commune de Grigny une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;