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04/11/2004 | FRANCE | N°02VE03148

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2eme chambre, 04 novembre 2004, 02VE03148


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Jean-François X ;

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour adminis

trative d'appel de Paris le 23 août 2002, présentée pour M. Jean-Fr...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. Jean-François X ;

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris le 23 août 2002, présentée pour M. Jean-François X, demeurant ..., par Me Aittouares ; M. Jean-François X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0005431 en date du 24 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 août 2000 par laquelle le maire de la commune de Sartrouville l'a suspendu de ses fonctions de directeur de l'école de musique municipale à titre conservatoire pour une période de quatre mois, à sa réintégration dans ses fonctions et à la condamnation de la commune de Sartrouville au paiement d'une somme de 8 000 francs sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler la décision du maire de Sartrouville du 8 août 2000 ;

3°) de condamner la commune de Sartrouville à lui verser une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le tribunal s'est abstenu de vérifier la matérialité des faits ; qu'aucun des faits reprochés n'est susceptible de constituer une violation du devoir de réserve ; que le tribunal n'a pas examiné si la gravité des faits reprochés justifiait la suspension ordonnée alors qu'il s'agit là d'une exigence posée par l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 ; qu'à supposer que lesdits faits soient constitutifs d'une faute, celle-ci ne possède pas le caractère de faute grave, ainsi que le corrobore la circonstance que le conseil de discipline ait émis un avis d'exclusion temporaire pour une durée d'un mois seulement ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2004 :

- le rapport de Mme Grand d'Esnon, premier conseiller ;

- les observations de Me de Villèle, avocat, pour la commune de Sartrouville ;

- et les conclusions de M. Pellissier, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 8 août 2000 :

Considérant qu'après un entretien préalable le 13 juillet 2000, et par courrier en date du 8 août 2000, le maire de Sartrouville a suspendu de ses fonctions M. X, alors directeur de l'école de musique de Sartrouville, à titre conservatoire pour une durée de quatre mois ; que le conseil de discipline, dans sa séance du 20 octobre 2000, s'est prononcé pour que soit infligée à l'intéressé une exclusion de fonctions d'un mois, en raison du manquement au devoir de réserve constitutif d'une faute qui lui était reproché ; que, par arrêté en date du 12 décembre 2000, le maire de Sartrouville a prononcé la révocation et la radiation des cadres de M. X à compter du 13 décembre 2000 ; que le 28 décembre 2000 une transaction était signée entre les parties aux termes de laquelle la commune s'engageait à verser à l'intéressé une indemnité et à retirer ses décisions en date des 8 août et 12 décembre 2000 et M. X s'engageait à renoncer à toute action en dommages- intérêts, à se désister de sa requête et à demander sa mutation ; que toutefois ladite transaction n'a pas été appliquée ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de la décision du 8 août 2000 ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 30 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : En cas de faute grave commise par un fonctionnaire qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit sans délai le conseil de discipline... Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois. Si à l'expiration de ce délai, aucune décision n'a été prise par l'autorité ayant le pouvoir disciplinaire, l'intéressé, sauf s'il est l'objet de poursuites pénales , est rétabli dans ses fonctions. ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de la lettre en date du 26 juin 2000 par laquelle la directrice générale adjointe des services a saisi le maire de Sartrouville du dossier, que la suspension de M. X a été motivée, d'une part, par la circonstance que l'intéressé aurait organisé plusieurs rendez-vous avec des élus de l'opposition du conseil municipal pour leur faire part de ses critiques à l'encontre de la politique culturelle de la commune et, d'autre part, par le fait que, lors de la cérémonie de remise des diplômes de l'école de musique, l'intéressé aurait acquiescé aux critiques formulées publiquement par des représentants de parents d'élèves du conservatoire ;

Considérant, en premier lieu, que, si la lettre susmentionnée en date du 26 juin 2000 se réfère aux dires d'un élu qui serait prêt à attester la réalité des rendez-vous avec des élus de l'opposition municipale, aucune attestation en ce sens n'a été produite par l'administration, en sorte que ces allégations ne peuvent être regardées comme établies ; qu'il est seulement établi que le requérant a pris contact avec un élu proche de la majorité municipale pour s'ouvrir de ses inquiétudes concernant le devenir de l'école de musique ; que, s'agissant de l'attitude de M. X lors de la cérémonie de remise des diplômes, il résulte des attestations produites que l'intéressé, à la suite de l'intervention du président de l'association des parents d'élèves du conservatoire, s'est interrogé publiquement sur le devenir de l'école de musique compte tenu des arbitrages budgétaires décidés par la majorité municipale ; que si M. X soutient qu'il aurait ensuite invité une élue appartenant à la majorité du conseil municipal à prendre la parole et que cette dernière aurait refusé de répondre aux critiques énoncées par les parents, il demeure qu'il a admis devant le conseil de discipline sinon la totalité des griefs énoncés à son encontre, du moins avoir déclaré publiquement lors de ladite réunion qu'il comprenait les critiques des parents et était inquiet de l'avenir de l'école ; que ces propos tenus en public doivent être regardés comme contenant à l'égard de la municipalité de Sartrouville des imputations excédant le droit de libre commentaire et constituent par suite, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, un manquement au devoir de réserve qui incombe à tout fonctionnaire ;

Considérant, toutefois, que pour apprécier la gravité de ce manquement il y lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances de l'espèce ; qu'il ne ressort pas des attestations produites que les propos de M. X aient été empreints d'une virulence particulière ; que si l'administration a reçu de multiples courriers début juin 2000 demandant des moyens supplémentaires et critiquant l'attitude de la commune, cette circonstance ne saurait suffire à établir que l'ensemble de ces critiques auraient été suggérées par M. X, lequel avait régulièrement informé sa hiérarchie des difficultés de fonctionnement de l'école de musique ; que si la directrice générale adjointe fait état des difficultés à établir avec M. X de bonnes relations de travail au motif que celui-ci se prévaudrait de manière vague de rumeurs et d'appuis, cette seule circonstance ne saurait également, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, être de nature à établir que le manquement à l'obligation de réserve reproché à M. X serait d'une gravité justifiant la suspension temporaire de ses fonctions pour une durée de quatre mois ;

Considérant, enfin, que la commune ne saurait utilement invoquer la transaction, qui n'a jamais été exécutée, pour affirmer que M. X a reconnu la gravité de la faute qu'il avait commise ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions de M. X tendant à ce que la commune de Sartrouville lui verser une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant en revanche que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que M. X, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, soit condamné à verser à la commune de Sartrouville la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°0005431 du Tribunal administratif de Versailles en date du 24 juin 2002 est annulé.

Article 2 : La décision en date du 8 août 2000 par laquelle le maire de la commune de Sartrouville a prononcé la suspension temporaire de M. X de ses fonctions de directeur d'école de musique pour une durée de quatre mois est annulée.

Article 3 : La commune de Sartrouville versera à M. X une somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE03148
Date de la décision : 04/11/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: Mme Jenny GRAND D'ESNON
Rapporteur public ?: M. PELLISSIER
Avocat(s) : AITTOUARES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2004-11-04;02ve03148 ?
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