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22/01/2025 | FRANCE | N°24TL00566

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, Juge des référés, 22 janvier 2025, 24TL00566


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Viviers-lès-Montagne à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 15 000 euros et de mettre à la charge de la commune de Viviers-lès-Montagnes une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Par une ordonnance n° 2307007 du 1

9 février 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Viviers-lès-Montagne à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 15 000 euros et de mettre à la charge de la commune de Viviers-lès-Montagnes une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 2307007 du 19 février 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2024, M. B..., représenté par Me Geraud-Linfort, demande au juge des référés de la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de condamner la commune de Viviers-lès-Montagne à lui verser, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, une provision de 15 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Viviers-lès-Montagnes une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le juge des référés, il n'a pas demandé la réparation d'un harcèlement moral, mais la réparation des préjudices résultant des différents manquements commis par l'administration ;

- il est le seul agent à ne pas bénéficier de la participation de 25 euros versée par la commune au titre de la mutuelle alors qu'il en bénéficiait l'année précédente ;

- le maire lui a enjoint de rester en arrêt maladie, ce qui l'a contraint à ne percevoir qu'un demi-traitement, au motif que le médecin du travail n'aurait pas été disponible et n'a pas répondu à sa demande d'explications ;

- une procédure disciplinaire abusive a été engagée à son encontre, en l'accusant à tort de vol, sur laquelle le conseil de discipline a émis en avis défavorable, mais après cette procédure humiliante et diffamatoire, la commune a continué ses actes de harcèlement ;

- le jour de sa reprise de travail, le 4 octobre 2021, il a subi une modification importante de ses horaires qui étaient identiques depuis 20 ans sans consultation préalable du comité technique paritaire, dans le but de le punir ainsi que les agents ayant témoigné en sa faveur ; malgré la demande de son syndicat, le maire a persisté dans son refus de saisir le comité ; il s'agit d'une sanction déguisée ;

- le même jour, le maire lui a indiqué que dorénavant il devrait, au quotidien, se rendre dans les locaux de l'hôtel de ville pour prendre ses fonctions dans le périmètre restreint de la mairie et du cimetière avec interdiction de se rendre aux ateliers municipaux et il l'a menacé d'abandon de poste s'il se rendait là-bas ; le maire lui a attribué, à titre de vestiaire, un cabinet de toilette situé juste à côté de son bureau municipal ; ses fonctions ont été réduites au désherbage à la main et au ramassage des feuilles mortes ; le maire lui a donné des gants en latex, inutilisables pour la mission de désherbage et du gel hydro alcoolique, ainsi qu'une brouette, une pelle, un balai et des sacs poubelle pour y mettre les feuilles à la main ; il lui a été interdit d'entrer en contact avec ses collègues ; le maire n'a pas agi ainsi dans l'intérêt du service ;

- le mardi 5 octobre 2021, il s'est blessé gravement au point d'être transporté par les pompiers car son dos n'a pas tenu ; il a chuté, sa tête a cogné le trottoir ce qui révèle un manquement aux obligations de sécurité et de santé, car le maire n'a pas tenu compte des restrictions posées par le médecin du travail ; il a refusé de reconnaître l'accident comme étant imputable au service malgré l'avis du médecin agréé et du comité médical ; il s'agit d'un détournement de pouvoir ;

- ses nombreuses demandes adressées par mail à la mairie restent toujours sans réponse ;

- il a reçu un courrier recommandé du maire discriminatoire au regard de son état de santé et lui reprochant à tort une absence injustifiée ;

- il s'est vu abusivement refuser la prise de ses congés payés ;

- ces agissements ont eu pour effet une altération immédiate de sa santé physique et mentale et l'ont contraint à se mettre en disponibilité pour se protéger ;

- il a présenté le 15 septembre 2022 une demande indemnitaire préalable à laquelle il n'a pas été répondu.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2024, la commune de Viviers-lès-Montagne conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... une somme de 3000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est manifestement irrecevable en ce qu'elle ne contient aucune critique du bien-fondé des motifs de l'ordonnance contestée ;

- la demande indemnitaire était irrecevable pour avoir été présentée plus de dix mois après le rejet implicite de la demande préalable, ce qu'a retenu à bon droit le juge des référés et que le requérant ne conteste pas ;

- si le requérant soutient en appel que sa demande tendait à mettre en cause la responsabilité de la commune en raison de divers manquements, sa demande tant préalable indemnitaire qu'en référé provision se limitait à invoquer des faits de harcèlement moral ; il invoque en tout état de cause les mêmes griefs ;

- il n'a remis que tardivement, le 4 octobre 2021, l'attestation de prise en charge de sa mutuelle ; ses droits lui ont été ouverts après cette date ;

- l'imputabilité au service de l'accident déclaré le 5 octobre 2021 n'ayant été reconnue, il s'est vu placer en demi-traitement à l'expiration du délai légal de trois mois ; il n'y a pas eu d'ordre illégal de rester en arrêt maladie, la reprise ne pouvant intervenir qu'après accord du médecin du travail ;

- le caractère abusif de la procédure disciplinaire n'est pas établi ; elle a été engagée à la suite d'une dénonciation de vol par un de ses voisins ; la procédure suivie a été régulière ; elle n'a pas abouti, la commune ayant suivi l'avis du conseil de discipline alors même qu'elle n'y était pas tenue ;

- la durée hebdomadaire du travail du requérant est restée inchangée, la modification du planning, qui avait pour objet de respecter les préconisations du médecin du travail, ne nécessitait pas la consultation du comité technique paritaire ; l'intéressé a accepté ce nouveau planning en y apposant sa signature ; les aménagements de son temps de travail respectent les dispositions du décret du 12 juillet 2020 applicables aux fonctionnaires territoriaux ;

- le " retrait " de ses missions correspond aux prescriptions du médecin du travail d'éviter les antéflexions du tronc prolongé et l'utilisation des engins vibrants et son lieu de travail a été adapté ;

- ces modifications ne caractérisent pas de harcèlement moral ;

- c'est à bon droit que l'imputabilité au service de l'accident déclaré le 5 octobre 2021 n'a pas été reconnu, les circonstances de cet accident n'étant pas établies ;

- la protection fonctionnelle n'avait pas à lui être accordée ;

- ni l'absence de réponse à toutes ses sollicitations sur une courte période de temps, ni la réponse du maire critiquée ne sont constitutives de faits de harcèlement moral ;

- l'absence injustifiée du requérant qui aurait dû reprendre son service après la visite médicale de reprise du 20 janvier 2022 aurait pu donner lieu à sanction disciplinaire, ce qui lui a été à bon droit rappelé par courrier du 25 janvier suivant ;

- le lien entre le suivi psychologique qu'il suit et les agissements reprochés à la commune n'est pas établi.

Par une ordonnance du 15 juin 2024, la date de clôture d'instruction a été fixée au 19 août 2024.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 86-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., adjoint technique territorial de 2ème classe, exerce les fonctions de cantonnier au sein de la commune de Viviers-Lès-Montagnes (Tarn). Par une demande du 13 décembre 2021, il a sollicité auprès du maire la protection fonctionnelle en invoquant des faits répétés de harcèlement moral et des infractions aux règles de sécurité. Par ailleurs, il a adressé au maire une demande préalable d'indemnisation datée du 15 novembre 2022 à raison des manquements reprochés à la commune constitutifs selon lui d'une situation de harcèlement et sollicité à ce titre une somme de 10 000 euros pour préjudice moral. A défaut de réponse, il a saisi le tribunal administratif de Toulouse, le 15 novembre 2023, d'une part, d'une demande indemnitaire au fond, d'autre part, d'une demande en référé de condamnation de la commune à lui verser une indemnité provisionnelle de 15 000 euros en réparation des préjudices résultant des manquements imputés à la commune de Viviers-Lès-Montagnes. Par une ordonnance n° 2307007 du 19 février 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande de provision. M. B... relève appel de cette ordonnance.

Sur l'existence d'une obligation non sérieusement contestable :

2. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude.

3. En premier lieu, il est constant que dans sa demande préalable indemnitaire, M. B... a invoqué différents manquements reprochés à la commune constitutifs selon lui d'une situation de harcèlement. Il s'agit du non versement par la commune de la participation de 25 euros au titre de la mutuelle, de son maintien illégal en demi-traitement en raison d'une injonction du maire de rester en arrêt-maladie, d'une procédure disciplinaire abusive, d'une modification importante et irrégulière de ses horaires de travail et de ses missions, après sa reprise du travail, le 4 octobre 2021, de l'absence de prise en compte des restrictions posées par le médecin du travail, du refus infondé de la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident déclaré le 5 octobre 2021, de l'absence de réponse de la commune à ses nombreux courriers, d'une réponse du maire lui reprochant à tort une absence injustifiée et d'un refus abusif de congés payés.

4. En second lieu, au regard des explications apportées en défense par la commune de Viviers-Lès-Montagnes, non contredites par le requérant, aucun des éléments avancés n'est de nature à caractériser une faute ouvrant droit à réparation. Au demeurant, la plupart de ces éléments invoqués par M. B... à l'appui de sa contestation du rejet de sa demande de protection fonctionnelle fondée sur ces faits n'ont pas été regardés comme constitutifs du harcèlement moral allégué par le tribunal administratif de Toulouse dans son jugement n° 2201259 du 19 avril 2024 que l'intéressé n'a pas contesté.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir, que l'existence de l'obligation de la commune de Viviers-Lès-Montagnes envers M. B... ne présente pas, en l'état de l'instruction, un caractère non sérieusement contestable au sens de l'article R. 541-1 du code de justice administrative. Par suite, sa demande de provision doit être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

6. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme sollicitée par M. B... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge de la commune de Viviers-Lès-Montagnes, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune de Viviers-Lès-Montagnes présentées sur le même fondement.

ORDONNE

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Viviers-Lès-Montagnes présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et à la commune de Viviers-Lès-Montagnes.

Fait à Toulouse, le 22 janvier 2025.

La juge d'appel des référés,

A. Geslan-Demaret

La République mande et ordonne au préfet du Tarn en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

N°24TL00566 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 24TL00566
Date de la décision : 22/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-015 Procédure. - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : GERAUD-LINFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-22;24tl00566 ?
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