Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Sète à lui verser la somme de 49 687 euros à titre de provision.
Par ordonnance n° 2401299 du 12 mars 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, des pièces et un mémoire, enregistrés les 22 et 28 mars et le 27 mai 2024, Mme A..., représentée par Me d'Albenas, demande au juge des référés de la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 12 mars 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de condamner la commune de Sète à lui payer à titre provisionnel une somme de 49 687 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2023 et capitalisation à la date du 8 novembre 2024, puis à chaque échéance annuelle ultérieure ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Sète une somme de 1 813 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance attaquée méconnaît les dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative dès lors que la responsabilité sans faute de la commune de Sète est engagée et qu'elle dispose d'une créance indemnitaire non sérieusement contestable sur la commune de Sète ;
- elle est fondée à mettre en jeu la responsabilité sans faute de la commune de Sète sur le terrain des dommages de travaux publics ;
- la créance n'est pas sérieusement contestable dès lors que les dommages invoqués font suite à une forte baisse de la fréquentation des chambres d'hôtes en raison des nuisances sonores et des nuisances liées aux travaux de l'école des Beaux-Arts de Sète ;
- les nuisances sonores et environnementales causées par les travaux en cause apparaissent susceptibles d'avoir entraîné des conséquences dommageables constitutives d'un préjudice grave et spécial ;
- elle a subi un préjudice commercial, un préjudice d'anxiété et un préjudice d'image.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2024, la commune de Sète, représentée par Me Cros, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'appelante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative.
Elle soutient que :
- la responsabilité sans faute de la commune ne peut être engagée ;
- les préjudices allégués ne sont pas établis.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Vu la décision du 1er septembre 2022 par laquelle le président de la cour a désigné M. Éric Rey-Bèthbéder, président de la 3ème chambre, pour statuer sur les demandes en référé en application des dispositions de l'article L. 555-1 du code de justice administrative.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... est propriétaire d'un immeuble situé à Sète (Hérault), cadastré section AP n° 127, au sein duquel elle propose une activité de chambres d'hôtes. La commune de Sète est propriétaire de la parcelle cadastrée section AP n° 124, située en contre-bas de la propriété de Mme A..., et sur laquelle se trouve l'école des Beaux-Arts. En 2017, la commune a annoncé que l'école ferait l'objet de travaux de restauration. Ces travaux ont été entamés à la fin de l'année 2021.
2. Mme A... relève appel de l'ordonnance du 12 mars 2024 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Sète soit condamnée à lui verser une provision d'un montant de 49 687 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subi du chef des travaux entrepris par la commune pour la rénovation de l'école des Beaux-Arts.
3. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge des référés, dans le cadre de cette procédure qu'elles instituent, de rechercher si, en l'état du dossier qui lui est soumis, l'obligation du débiteur éventuel de la provision est ou n'est pas sérieusement contestable sans avoir à trancher ni de questions de droit se rapportant au bien-fondé de cette obligation ni de questions de fait soulevant des difficultés sérieuses et qui ne pourraient être tranchées que par le juge du fond éventuellement saisi. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant.
4. La responsabilité de la puissance publique peut se trouver engagée, même sans faute, sur le fondement du principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques, lorsqu'une mesure légalement prise a pour effet d'entraîner, au détriment d'une personne physique ou morale, un préjudice grave et spécial, qui ne peut être regardé comme une charge lui incombant normalement.
5. Il résulte de l'instruction que les travaux cités au point 1 ayant eu un éventuel impact sur la fréquentation des chambres d'hôtes exploitées par l'appelante n'ont débuté, au plus tôt, qu'en septembre 2021, de sorte que la requérante ne peut valablement soutenir avoir subi un préjudice commercial à compter du 1er février 2021. En outre, les photographies, vidéos, attestations, échanges de courriels et relevés de comptes annuels versés au débat ne sont pas suffisants pour établir, d'une part, que les nuisances alléguées excèdent les sujétions normales imposées au voisinage dans l'intérêt de l'école des Beaux-Arts et, d'autre part, que le préjudice commercial prétendument subi par la requérante présenterait un lien de causalité direct et certain avec les travaux, alors en outre qu'il résulte de l'instruction que le chiffre d'affaires de l'établissement n'a cessé de diminuer depuis l'année 2018. Enfin, les pièces produites ne permettent ni de justifier le préjudice d'anxiété, ni le préjudice d'image allégués par Mme A..., alors d'ailleurs que les avis internet relatifs aux chambres d'hôtes sont, pour la plupart, élogieux, y compris ceux écrits par des vacanciers ayant séjourné au sein de l'établissement durant les périodes de travaux. Dès lors, les créances invoquées par l'appelante paraissent sérieusement contestables dans leur principe et, au demeurant, dans leurs montants.
6. Il suit de ce qui vient d'être exposé que Mme A... ne saurait soutenir détenir à l'encontre de la commune de Sète une créance de 49 687 euros non sérieusement contestable. Par conséquent, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune de Sète, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, à verser à Mme A.... Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette dernière une somme de 1 500 euros à verser à la commune de Sète sur le même fondement.
ORDONNE :
Article 1er : La requête n° 24TL00709 de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Mme A... versera la somme de 1 500 euros à la commune de Sète au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... et à la commune de Sète.
Fait à Toulouse, le 13 août 2024.
Le juge d'appel des référés,
Éric Rey-Bèthbéder
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.
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No 24TL00709