Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par une requête enregistrée sous le n° 1907183, M. D... A... et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012, 2013 et 2014 et des cotisations supplémentaires de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 et 2013. Par une réclamation adressée au directeur régional des finances publiques d'Occitanie et du département de la Haute-Garonne, transmise au tribunal administratif de Toulouse en application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales et enregistrée sous le n° 2002565, M. et Mme A... ont demandé la décharge de ces mêmes impositions, en droits et pénalités.
Par un jugement n° 1907183, 2002565 du 7 décembre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a, en son article 1er, réduit les bases d'imposition supplémentaire mises à la charge de M. et Mme A... au titre des années 2012, 2013 et 2014 à concurrence du montant des sommes portées au crédit des comptes courants d'associé des sociétés à responsabilité limitée Roques Restauration, Nha Trang et Vi Dai, en son article 2, déchargé M. et Mme A..., en droits et pénalités, des impositions à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales qui procèdent des rectifications correspondant aux sommes portées au crédit des comptes courants d'associé des sociétés à responsabilité limitée Roques Restauration, Nha Trang et Vi Dai auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012, 2013 et 2014 et, en son article 3, rejeté le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme A....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux le 4 février 2022 sous le n° 22BX00399, puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 22TL20399, et un mémoire enregistré le 3 septembre 2022, M. et Mme A..., représentés par Me Mairat, demandent à la cour :
1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
S'agissant de la régularité du jugement :
- les mémoires en défense présentés devant le tribunal administratif par l'administration dans le cadre des deux instances, les avis d'audience et les autres pièces des deux procédures n'ont été communiqués qu'à M. C..., mandataire n'ayant pas la qualité d'avocat, en méconnaissance des articles R. 431-1 et R. 431-2 du code de justice administrative et du premier alinéa de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales ;
- les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire en soulevant d'office un moyen de défense qui n'était pas d'ordre public ;
- le jugement est insuffisamment motivé dès lors que les motifs de son point 22 ne permettent pas chiffrer le montant de la décharge en procédant ;
- le jugement est entaché de contradiction de motifs ;
- le jugement est entaché de dénaturation et d'erreur de droit ;
- le jugement n'est pas revêtu des signatures prévues à l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- ils n'ont pas été informés des voies et délais de recours contre ce jugement ;
S'agissant de la procédure d'imposition :
- les relevés de comptes qu'ils ont transmis sont relatifs à des comptes courants d'associés collectifs ;
S'agissant du bien-fondé des impositions :
- les comptes courants d'associés ont un caractère collectif, de sorte que les sommes inscrites à leur crédit ne peuvent être regardées comme des revenus distribués à M. A... ;
- les rehaussements opérés au titre des années 2012 et 2013 dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée correspondent à des " virements de compte à compte ", à hauteur respectivement de 162 065 euros et de 298 794 euros ;
- le rehaussement opéré au titre de l'année 2014 dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée est injustifié dès lors que, compte tenu de l'existence de nombreux " virements de compte à compte ", la règle dite " du double " ne trouve pas à s'appliquer ;
- c'est à bon droit que le tribunal administratif a prononcé la décharge des impositions assises du chef de la réintégration dans leurs revenus des sommes portées au crédit des comptes courants d'associés des sociétés Roques Restauration, Nha Trang et Vi Dai.
Par deux mémoires, enregistrés le 18 juillet 2022 et le 27 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement attaqué ;
3°) à ce que soient remises à la charge de M. et Mme A... les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dont ils ont été indûment déchargés par le tribunal administratif.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par les époux A... à l'appui de leurs conclusions d'appel ne sont pas fondés ;
- les rectifications opérées dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers correspondant aux sommes portées au crédit des comptes courants d'associés des sociétés à responsabilité limitée Roques Restauration, Nha Trang et Vi Dai peuvent être fondés, à titre complémentaire, sur les dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts.
Par ordonnance du 10 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 4 décembre 2023.
Des pièces ont été produites par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique le 6 juin 2024, en vue de compléter l'instruction, et communiquées au titre des dispositions de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Restino,
- et les conclusions de M. Clen, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D... A... ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 2012 à 2014, à l'issue duquel leur ont été notifiés des rehaussements de leur revenus imposables, notamment dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée et dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Ils relèvent appel du jugement du 7 décembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il a, après avoir prononcé la décharge, en droits et pénalités, des impositions à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales procédant des rectifications résultant de la réintégration dans leurs revenus des sommes portées au crédit des comptes courants d'associé des sociétés à responsabilité limitée Roques Restauration, Nha Trang et Vi Dai, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012, 2013 et 2014, rejeté, à son article 3, le surplus des conclusions de leur demande. Par la voie de l'appel incident, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour d'annuler les articles 1er et 2 du même jugement.
Sur la régularité du jugement :
2. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles R. 711-2, R. 732-1, R. 431-1, R. 431-2, R. 431-4 et R. 431-5 du code de justice administrative, ainsi que de celles du premier alinéa de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales, que, si un requérant peut se faire représenter par un mandataire qui n'a pas la qualité d'avocat pour introduire sa demande devant le tribunal administratif dans un litige de plein contentieux fiscal, les communications de mémoires et les différents actes de procédure, y compris l'envoi de l'avis d'audience, ne peuvent être accomplis qu'à l'égard du requérant.
3. Dans l'instance enregistrée sous le n° 1907183, le tribunal administratif de Toulouse a communiqué au seul mandataire des appelants, qui n'avait pas la qualité d'avocat, les deux mémoires produits par l'administration le 15 juin 2020 et le 19 mars 2021. Dans l'instance enregistrée sous le n° 2002565, le tribunal administratif de Toulouse a informé le seul mandataire des appelants, qui n'avait pas la qualité d'avocat, de la soumission d'office de leur réclamation du 17 décembre 2019 par l'administration sur le fondement R. 199-1 du livre des procédures fiscales, et n'a communiqué qu'à ce dernier le mémoire présenté par l'administration le 19 mars 2021. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens tirés de son irrégularité, le jugement du tribunal administratif de Toulouse doit être annulé.
4. Il y a lieu pour la cour de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les demandes présentées par les époux A... et sur les conclusions du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
5. La demande enregistrée sous le n° 1907183 et la réclamation soumise d'office enregistrée sous le n° 2002565, présentées par les époux A..., sont relatives aux mêmes impositions. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la mise en demeure de déclarer les revenus de l'année 2012 :
6. Aux termes de l'article 170 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " 1. En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, toute personne imposable audit impôt est tenue de souscrire et de faire parvenir à l'administration une déclaration détaillée de ses revenus et bénéfices, de ses charges de famille et des autres éléments nécessaires au calcul de l'impôt sur le revenu (...) ". Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : / 1° à l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus (...) " et aux termes du premier alinéa de l'article L. 67 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (...) ".
7. Il est constant que, le 18 juillet 2013, les époux A... se sont vu remettre en mains propres une mise en demeure de déposer la déclaration de leurs revenus de l'année 2012. Il n'est pas contesté qu'ils n'ont pas régularisé leur situation dans les trente jours suivants cette notification. La circonstance que la mise en demeure leur ait été remise par la vérificatrice chargée d'un contrôle portant sur une autre période est sans incidence sur la régularité de la notification de cette mise en demeure. Par suite, l'administration était fondée à établir les impositions au titre de l'année 2012 suivant la procédure de taxation d'office.
En ce qui concerne la mise en demeure de déclarer les revenus de l'année 2013 :
8. Lorsque le contribuable soutient que l'avis de réception d'un pli recommandé portant notification d'une mise en demeure n'a pas été signé par lui, il lui appartient d'établir que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli dont il s'agit.
9. Il est constant que le pli recommandé contenant la mise en demeure du 16 juillet 2015 de déposer la déclaration des revenus de l'année 2013 a été distribué à l'adresse des époux A... le 18 juillet 2015. Ils soutiennent que ce pli a été remis à leur fils âgé de treize ans, qui était trop jeune pour apprécier la responsabilité qui pesait sur lui en acceptant ce pli et qu'il l'aurait égaré. Toutefois, à supposer même que le pli litigieux ait été réceptionné par le fils des époux A..., ce qu'ils n'établissent pas, celui-ci était d'un âge suffisant pour le leur remettre et entretenait avec eux des liens suffisants. Par suite, le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la durée de l'examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 2013 et 2014 :
10. Aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt (...) " et aux termes de l'article 50 du même livre : " Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des rectifications pour la même période et pour le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts ou que l'administration n'ait dressé un procès-verbal de flagrance fiscale dans les conditions prévues à l'article L. 16-0 BA, au titre d'une période postérieure (...) ".
11. Si les dispositions de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales interdisent à l'administration, lorsqu'elle a procédé à un examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable, et quels qu'aient été les résultats de ce contrôle, de procéder à de nouvelles rectifications pour la même période, il résulte des termes de cet article, combinés avec le principe de l'annualité de l'impôt, qu'il ne fait pas obstacle, en cas de contrôle portant sur une période couvrant plusieurs années d'imposition, à ce que l'administration procède à des notifications successives de propositions de rectification concernant des années différentes, notamment lorsque ces notifications ont pour but d'interrompre, au cours de l'examen de la situation fiscale personnelle, la prescription prévue à l'article L. 169 du même livre.
12. Il résulte de l'instruction que, par un avis en date du 21 juillet 2015, les époux A... ont été informés de l'engagement d'un examen de leur situation fiscale personnelle portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014. La proposition de rectification que leur a adressée l'administration, le 30 novembre 2015, précisait : " La présente proposition de rectification concerne l'année 2012. Elle est interruptive de prescription en ce qui concerne l'examen contradictoire de votre situation fiscale personnelle engagé au titre de l'année 2012 ". Ainsi, contrairement à ce que soutiennent les époux A..., cette proposition de rectification ne peut être regardée comme marquant l'achèvement de l'examen de leur situation fiscale personnelle des années 2013 et 2014. Par suite, l'administration a pu, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales, leur notifier, par la proposition de rectification du 7 juillet 2016, les rehaussements de leurs revenus imposables des années 2013 et 2014. Le moyen doit être écarté.
En ce qui concerne la demande d'éclaircissements ou de justifications relative aux revenus de l'année 2014 :
13. Aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. / Elle contrôle, également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements, ou d'acquitter tout ou partie d'une imposition au moyen d'une créance sur l'Etat. / A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés. (...) ". Aux termes de l'article L. 16 du même livre : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés, notamment lorsque le total des montants crédités sur ses relevés de compte représente au moins le double de ses revenus déclarés (...) / Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et mentionner à l'intéressé le délai de réponse dont il dispose en fonction des textes en vigueur. ", et aux termes de son article L. 69 : " Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ".
14. Lorsque l'administration a demandé des justifications à un contribuable sur le fondement de l'article L. 16, elle est fondée à l'imposer d'office, sans mise en demeure préalable, à raison des sommes au sujet desquelles il s'est abstenu de répondre dans le délai requis ou n'a apporté que des réponses imprécises ou invérifiables, sans les assortir d'éléments de justification.
15. Il résulte de l'instruction que l'administration a adressé aux époux A... une demande d'éclaircissements ou de justifications le 10 mars 2016 par un pli recommandé qui leur a été distribué le 11 mars 2016. Le délai de réponse de soixante jours mentionné par cette demande a été prolongé jusqu'au 9 juin 2016 par une seconde demande du 5 avril 2016, qui leur a été adressée par pli recommandé, distribué le 9 avril 2016. Les époux A... n'ont pas répondu à cette demande dans le délai qui leur était imparti. La circonstance qu'ils avaient déclaré leurs revenus de l'année 2014 ne faisait pas obstacle à la procédure de demande de justifications ou d'éclaircissements et était, au contraire, une condition pour que l'administration leur adresse une telle demande. Faute de réponse de la part des époux A..., c'est à bon droit que l'administration a établi, suivant la procédure de taxation d'office, les impositions assises du chef des sommes au sujet desquelles ils se sont abstenus de répondre.
En ce qui concerne la motivation des rehaussements établis suivant la procédure de taxation d'office :
16. Aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. (...) ".
17. Il résulte de l'instruction que les propositions de rectification du 30 novembre 2015 et du 7 juillet 2016 et leurs annexes mentionnent, pour chacune des années contrôlées, le détail des sommes retenues dans les bases d'imposition établies d'office par catégorie de revenus, ainsi que les modalités de calcul des impositions assises de leur chef. Dès lors, l'administration a satisfait à l'obligation de notification des bases et du calcul des impositions d'office prévue à l'article L. 76 du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen doit être écarté.
Sur le bien-fondé des impositions :
18. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". D'une part, les impositions supplémentaires au titre des années 2012 et 2013 ont été régulièrement établies suivant la procédure de taxation d'office sur le fondement des articles L. 66 et L. 67 du livre des procédures fiscales, faute pour les époux A... d'avoir souscrit leurs déclarations de revenus dans les trente jours suivant la notification d'une mise en demeure. D'autre part, les impositions supplémentaires au titre de l'année 2014 assises du chef de la réintégration de sommes regardées comme des revenus d'origine indéterminée ont été régulièrement établies suivant la procédure de taxation d'office sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales. Par suite, les époux A... supportent la charge de la preuve de l'exagération des impositions ainsi mises à leur charge.
En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :
19. En premier lieu, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / (...) 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
20. L'administration a rehaussé les revenus des époux A... des années 2012, 2013 et 2014, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, à hauteur respectivement de 620 518 euros, 165 369 euros et 49 457 euros, à raison de revenus distribués à M. A... et correspondant aux sommes portées au crédit des comptes courants d'associés ouverts dans les écritures des sociétés à responsabilité limitée Vi Long, Asian Pacific, Roques Restauration, Resolv Services, Marestan, Sushijo, Vi Dai, Nha Trang, Sohorest et Vinafin, et des sociétés civiles immobilières La Liberté, Croix de Pierre, Auterive Auriol, Seilh Immob, Roc Immob, A..., Perget Pibrac, TQP, La Méridienne.
21. Il résulte de l'instruction, notamment des comptes-rendus des entretiens qui ont eu lieu les 23 septembre et 17 novembre 2015, d'une part, que M. A... a indiqué être dirigeant, durant la période contrôlée, des sociétés à responsabilité limitée Vinafin, Vi Long et Asian Pacific, et des sociétés civiles immobilières La Liberté, La Méridienne, Croix de Pierre, TQP, Auterive Auriol, Seilh Immob et Roc Immob, et être associé des sociétés à responsabilité limitée Asian Pacific, Roques restauration, Resolv services, Marestan, Sohorest, et des sociétés civiles immobilières La Liberté, La Méridienne, Croix de Pierre, TQP, Auterive Auriol, Seilh Immob, Roc Immob, Fronton Martrat, A... et Perget Pibrac. D'autre part, ayant été invité, lors de l'entretien du 23 septembre 2015, à produire les copies des comptes-courants d'associés dont il était titulaire ainsi que ceux sur lesquels il procédait à des opérations à son nom, M. A... a adressé à l'administration, le 18 octobre 2015 et le 22 novembre 2015, la copie de comptes courants des sociétés à responsabilité limitée Asian Pacific, Roques restauration, Resolv Services, Marestan, Sushijo, Vi Long, Vi Dai, Nha Trang, et des sociétés civiles immobilières Auterive Auriol, Roc Immob, Seilh Immob, Perget Pibrac, A..., Croix de Pierre et La Liberté. Par ailleurs, lors de l'entretien du 17 novembre 2015, M. A... a indiqué produire les comptes courants des sociétés TQP, La Méridienne, Sohorest et Vinafin, sur lesquels il a procédé à des opérations. Il a adressé ces documents le 25 février 2016. Enfin, lors de l'entretien du 17 novembre 2015, M. A... a indiqué que certaines des sommes portées au crédit de ces comptes-courants correspondaient à des remboursements de charges qu'il avait personnellement acquittées pour le compte des sociétés. Il résulte ainsi de l'instruction que M. A... a présenté les comptes courants communiqués à l'administration, soit au nom de " A... " soit " compte courant " sans autre précision, comme des comptes courants d'associé dont il était titulaire ou sur lesquels il effectuait de nombreuses opérations.
S'agissant des sommes portées au crédit des comptes courants d'associés, à l'exception de ceux des sociétés Nha Trang, Vi Dai et Roques Restauration :
22. Les époux A... soutiennent que la présomption de distribution du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts trouve à s'appliquer seulement lorsque le compte-courant n'a qu'un seul titulaire identifié alors qu'en l'espèce, le compte courant d'associés de chaque société, selon les décisions prises en assemblée générale, est unique et collectif, n'est pas nominatif et est mouvementé par diverses personnes de la famille de M. A.... Ils soutiennent également que, si M. A... a reconnu être titulaire de ces comptes courants et les a communiqués à l'administration, c'est uniquement pour se plier aux demandes du service. Toutefois, en produisant, lors de l'examen de sa situation fiscale personnelle, les comptes courants de sociétés dont il avait auparavant indiqué à la vérificatrice qu'il en était associé et parfois dirigeant, M. A... s'est présenté à l'administration comme en étant titulaire. La circonstance que l'intitulé de ces comptes ne soit pas toujours nominatif n'est pas, à elle seule, suffisante pour établir qu'il s'agit de comptes collectifs d'associés, pas plus que ne le démontre la production d'extraits de procès-verbaux d'assemblées générales des sociétés ou de rapports de gérance, qui ne portent pas sur les sommes inscrites en compte-courant. Il en est de même de la mention dans la colonne " libellé " des relevés des comptes en face de sommes portées au débit, plus rarement au crédit, de noms d'autres membres de sa famille qui ne signifie pas, par elle-même, qu'ils seraient co-titulaires de ces comptes et qu'ils auraient pu disposer des sommes en litige. Il s'ensuit, d'une part, que les époux A... n'apportent pas la preuve, qui leur incombe comme exposé au point 18, de l'exagération des impositions procédant des rehaussements opérés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre des années 2012 et 2013. D'autre part, l'administration apporte la preuve de ce que M. A... a appréhendé les sommes portées au crédit des comptes-courants d'associés qui ont été réintégrées dans les revenus des époux A... de l'année 2014. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a imposé entre leurs mains, au titre des années 2012, 2013 et 2014, les sommes inscrites au crédit des comptes courants d'associés des sociétés mentionnées ci-dessus.
S'agissant des sommes portées au crédit des comptes courants d'associé des sociétés à responsabilité limitée Nha Trang, Vi Dai et Roques Restauration :
23. Il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les revenus des époux A..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes portées au crédit du compte-courant d'associé de la société Roques Restauration au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014, et des sommes portées au crédit des compte-courants d'associé des sociétés Vi Dai et Nha Trang au titre des exercices clos en 2012 et 2013. Or, par contrat d'apport du 1er juin 2011, M. A... a cédé à la société par actions simplifiée A... Thanh, devenue Vinafin, la totalité des parts qu'il détenait dans le capital des sociétés à responsabilité limitée Nha Trang, Vi Dai et Roques Restauration. Par suite, les sommes portées au crédit des comptes courants d'associé de ces trois sociétés ne pouvaient être regardées comme distribuées à M. A... sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts et, par suite, imposées entre les mains des époux A... sur ce fondement.
24. Toutefois, l'administration soutient que les rehaussements correspondant aux sommes portées au crédit des comptes courants d'associé de ces sociétés peuvent être fondés sur les dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts, aux termes desquelles : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".
25. L'administration est en droit d'invoquer, à un moment quelconque de la procédure contentieuse et sans être tenue d'adresser une nouvelle notification de redressement, tout moyen nouveau propre à donner un fondement légal à une imposition contestée devant le juge de l'impôt sous réserve de ne pas priver le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi. La substitution de base légale sollicitée par l'administration n'a pour effet de priver les époux A... d'aucune garantie de procédure.
26. En l'espèce, M. A... a indiqué, lors des opérations de contrôle, que les sommes en litige portées au crédit des comptes courants d'associé des sociétés Nha Trang, Vi Dai et Roques Restauration ont pour contrepartie des charges qu'il avait acquittées pour le compte de ces sociétés. Ainsi, alors que le ministre soutient, sans être contredit, que ces sommes ont été mises à la disposition de M. A..., les époux A... n'apportent pas la preuve, qui leur incombe comme exposé au point 18, de l'exagération des impositions procédant des rehaussements opérés dans leurs revenus au titre des années 2012 et 2013 sur ce nouveau fondement. Toutefois, l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que M. A... a appréhendé les sommes portées au crédit du compte-courant d'associé de la société Roques Restauration en 2014. Par suite, et dès lors que les époux A... n'ont été privés d'aucune garantie procédurale liée à la base légale substituée, il y a lieu de faire droit à la substitution demandée seulement pour ce qui concerne les revenus distribués au titre des années 2012 et 2013.
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
27. Il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les revenus des époux A... des années 2012, 2013 et 2014, des sommes regardées comme des revenus d'origine indéterminée pour des montants respectifs de 170 265 euros, 302 642 euros et 152 609 euros. D'une part, les époux A... ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré des impositions procédant des rectifications apportées à leurs revenus des années 2012 et 2013 en se bornant à soutenir, sans précision, que les sommes en cause correspondent à des virements " de compte à compte ", à hauteur de 162 065 euros au titre de 2012 et à hauteur de 298 794 euros au titre de 2013. D'autre part, l'appréciation de la règle " du double " prévue au troisième alinéa de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales est sans incidence sur le bien-fondé des impositions, de sorte que les époux A... ne rapportent pas la preuve, qui leur incombe, du caractère exagéré des impositions procédant des rectifications apportées à leurs revenus de l'année 2014 en se bornant à soutenir que la règle " du double " ne trouvait pas à s'appliquer car une partie des sommes réintégrées dans leurs revenus correspondent à des virements " de compte à compte ".
28. Les impositions en litige n'ont pas été établies sur le fondement de l'article 168 du code général des impôts. Par suite, le moyen tiré du caractère démesuré des rehaussements eu égard au train de vie des époux A... est inopérant et ne peut qu'être écarté.
29. Il résulte de tout ce qui précède que les époux A... sont seulement fondés à demander la réduction des cotisations supplémentaires, en droits et pénalités, d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 du chef de la réintégration dans leurs revenus, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes portées au crédit du compte-courant d'associé ouvert dans les comptes de la société Roques Restauration.
Sur les frais liés au litige :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1907183, 2002565 du 7 décembre 2021 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2. : M. et Mme A... sont déchargés, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 du chef de l'intégration dans leurs revenus, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes portées au crédit du compte courant d'associé de la société Roques Restauration.
Article 3 : Le surplus des demandes de M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Toulouse et des conclusions de leur requête d'appel est rejeté.
Article 4 : Le surplus des conclusions du ministre présentées par la voie de l'appel incident est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2024, où siégeaient :
- M. Barthez, président,
- M. Lafon, président assesseur,
- Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2024.
La rapporteure,
V. RestinoLe président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°22TL20399 2
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