Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 16 février 2023 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de renouveler son titre de séjour " étranger malade ", l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2301143 rendu le 17 octobre 2023, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 16 février 2023, a enjoint au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédures devant la cour :
I - Par une requête enregistrée le 13 novembre 2023 sous le n° 23TL02614, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour d'annuler le jugement du 17 octobre 2023.
Il soutient que :
- le tribunal administratif de Toulouse ne pouvait faire droit à la demande d'annulation sans que le rapport médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ait été versé au dossier et sans que l'Office ait été invité à présenter des observations ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le refus de séjour méconnaissait l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'absence de prise en charge médicale de M. C... ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé pourrait, en tout état de cause, bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 janvier 2024, M. D..., représenté par la SELARL Sylvain Laspalles, demande à être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et conclut :
1°) à la confirmation du jugement attaqué ;
2°) à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 16 février 2023 ;
3°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de trente jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il fait valoir que :
En ce qui concerne la recevabilité :
- la requête n'est pas recevable dès lors qu'il n'est pas justifié de la compétence de sa signataire pour la déposer auprès de la cour ;
En ce qui concerne la légalité externe :
- les décisions en litige sont insuffisamment motivées ;
- le refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le délai de départ volontaire ont été pris sans procédure contradictoire préalable et en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- le collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a émis son avis dans des conditions irrégulières ;
En ce qui concerne la légalité interne :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation et s'est cru lié par l'avis rendu par collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- la décision en litige est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation s'agissant de son état de santé : l'absence de prise en charge médicale entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité et il ne pourrait en outre pas bénéficier de soins appropriés en cas de retour dans son pays d'origine :
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision en litige se trouve privée de base légale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
S'agissant du délai de départ volontaire :
- la décision en litige se trouve privée de base légale en conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation et s'est placé à tort en situation de compétence liée ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un délai supérieur à trente jours ;
S'agissant de la fixation du pays de renvoi :
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par une ordonnance en date du 15 février 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 mars 2024.
Par une décision du 26 janvier 2024, M. C... a obtenu le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.
II - Par une requête enregistrée le 13 novembre 2023 sous le n° 23TL02615, le préfet de la Haute-Garonne demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du 17 octobre 2023 sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.
Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulouse n'a pas sollicité la production du rapport médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et qu'il a retenu que le refus de titre de séjour méconnaissait l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que ces moyens, sérieux, sont de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions en annulation de l'intimé.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 janvier 2024, M. D..., représenté par la SELARL Sylvain Laspalles, demande à être admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les moyens invoqués par le préfet de la Haute-Garonne au soutien de sa demande de sursis à exécution du jugement attaqué ne sont pas fondés ;
- le jugement en cause doit être confirmé au regard des illégalités entachant l'arrêté en litige, telles que visées ci-dessus au titre de l'instance n° 23TL02614.
Par une ordonnance en date du 15 février 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 8 mars 2024.
Par une décision du 26 janvier 2024, M. C... a obtenu le bénéfice du maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Jazeron, premier conseiller.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 15 décembre 1984, est entré sur le territoire français le 17 août 2018 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile, mais sa demande a été rejetée successivement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 23 novembre 2018 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 30 janvier 2020. L'intéressé a également présenté une demande de titre de séjour pour motif médical et il a bénéficié d'une carte temporaire de séjour à ce titre du 1er février 2021 au 31 janvier 2023. Il a sollicité le renouvellement de cette carte de séjour le 28 novembre 2022, mais, par un arrêté du 16 février 2023, le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé ce renouvellement, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 17 octobre 2023, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de réexaminer la situation de l'intéressé dans le délai de deux mois et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par la requête n° 23TL02614, le préfet de la Haute-Garonne relève appel de ce jugement et, par sa requête n° 23TL02615, il demande qu'il soit sursis à son exécution. Ces deux requêtes étant présentées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par deux décisions du 26 janvier 2024, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à l'intimé le maintien de plein droit de l'aide juridictionnelle totale dans le cadre des instances nos 23TL02614 et 23TL02615. Les demandes de l'intéressé tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont ainsi devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions en annulation présentées par le préfet de la Haute-Garonne dans la requête n° 23TL02614 :
En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par l'intimé :
3. Par un arrêté du 20 septembre 2021, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Haute-Garonne le lendemain, le préfet de ce département a donné délégation à Mme B... A..., adjointe à la cheffe du bureau de l'éloignement et du contentieux, pour signer les requêtes concernant les décisions prises en matière de droit des étrangers devant les juridictions administratives et judiciaires. Par voie de conséquence, la fin de non-recevoir soulevée par l'intimé, tirée de l'absence de qualité de la signataire de la requête n° 23TL02614 pour présenter cette requête au nom du préfet de la Haute-Garonne, doit être écartée.
En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le tribunal :
4. L'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mentionne que : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
5. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour à l'étranger. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'intéressé et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi.
6. Il ressort des pièces du dossier que, par un avis émis le 3 février 2023, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a considéré que, si l'état de santé de M. C... nécessitait bien une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'état de santé de l'intéressé lui permettait de voyager sans risque sont pays d'origine. Il ressort par ailleurs des termes de l'arrêté en litige que, pour refuser de renouveler le titre de séjour de l'intimé, le préfet de la Haute-Garonne, après s'est approprié l'appréciation ainsi portée par le collège de médecins, a estimé au surplus que M. C... ne justifiait pas être dans l'impossibilité d'accéder aux soins requis par son état de santé dans son pays d'origine.
7. D'une part, M. C..., levant le secret médical, a produit en première instance quatre certificats médicaux établis respectivement par un hépato-gastro-entérologue les 12 septembre 2022 et 27 mars 2023, par un médecin généraliste le 28 février 2023 et par un praticien exerçant en République démocratique du Congo le 14 avril 2023. Bien qu'ils soient postérieurs à l'arrêté en litige, les trois derniers de ces certificats se rapportent à une situation préexistante et peuvent donc être pris en compte pour apprécier l'état de santé de l'intéressé. Il ressort des indications portées sur l'ensemble de ces certificats que l'intimé est suivi pour une hépatite virale B chronique au titre de laquelle il bénéficie d'un traitement au long cours par le médicament Ténofovir et que l'interruption de ce traitement aurait pour effet une aggravation de son état de santé, avec l'apparition d'une fibrose hépatique, puis d'une cirrhose, ainsi qu'un risque de développement d'un cancer du foie. Les éléments ainsi apportés par l'intéressé sont suffisants pour retenir que, contrairement à ce qu'a estimé le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, l'absence de prise en charge de la pathologie de M. C... aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
8. D'autre part et en revanche, le préfet de la Haute-Garonne a versé au dossier d'appel la liste nationale des médicaments essentiels en République démocratique du Congo dont il ressort que le médicament Ténofovir est disponible dans ce pays. L'administration a également produit une page extraite du rapport " MedCoi " relatif au système de santé de ce pays, laquelle mentionne cinq établissements hospitaliers, parmi lesquels un établissement public, dotés de services spécialisés pour le suivi des hépatites. Dans les certificats médicaux évoqués au point précédent, l'hépato-gastro-entérologue indique ignorer si le traitement médicamenteux pris par M. C... existe dans son pays d'origine, alors que le praticien congolais précise seulement que ce traitement est coûteux avant de " suggérer " la poursuite de la prise en charge hors de ce pays. En se bornant à se prévaloir de deux articles de presse de portée générale et à invoquer certaines difficultés du système de santé de la République démocratique du Congo, sans même apporter d'élément de nature à laisser supposer qu'il ne pourrait pas se procurer des revenus, l'intimé n'établit pas qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement de soins adaptés pour la prise en charge de sa maladie infectieuse en cas de retour dans son pays natal.
9. Il résulte de ce qui vient d'être exposé que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté en litige, les premiers juges ont accueilli le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les autres moyens soulevés par M. C..., tant en première instance qu'en appel, à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 16 février 2023.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés par l'intimé :
S'agissant de la légalité externe :
11. En premier lieu, l'arrêté contesté énonce les circonstances de droit et de fait sur lesquelles le préfet de la Haute-Garonne s'est fondé pour prendre les décisions en litige et mentionne notamment les principaux éléments de la situation personnelle de l'intimé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions attaquées doit être écarté.
12. En deuxième lieu, l'intimé ne saurait utilement se prévaloir du non-respect de la procédure contradictoire préalable prévue par l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, laquelle n'est applicable ni à une décision portant refus de séjour, prise sur une demande, ni à une obligation de quitter le territoire français ou à une décision subséquente, intégralement régies par les dispositions particulières du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, l'intéressé a été mis à même de porter toutes informations nécessaires à la connaissance des services préfectoraux au cours de l'instruction de sa demande de titre de séjour et ne démontre pas avoir été empêché de communiquer des informations pertinentes avant l'édiction de la mesure d'éloignement. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de son droit d'être entendu ne peut qu'être écarté.
13. En troisième lieu, le préfet de la Haute-Garonne a produit devant les premiers juges l'avis rendu par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 3 février 2023 sur la demande de titre de séjour de M. C.... Il ressort des mentions portées sur cet avis, lesquelles font foi en l'absence de tout début de preuve contraire, qu'il a été rendu à l'issue d'une délibération collégiale. L'avis en cause est revêtu des signatures des trois médecins composant ledit collège et il ne résulte d'aucune disposition que le nom du médecin rapporteur aurait dû y figurer. Dès lors, l'intimé n'est pas fondé à soutenir que le collège de médecins se serait prononcé sur son état de santé dans des conditions irrégulières.
S'agissant de la légalité interne :
Quant au refus de titre de séjour :
14. En premier lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté litigieux ni des autres pièces du dossier que le préfet se serait estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ou qu'il n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de l'intimé avant de refuser le renouvellement de son titre de séjour.
15. En second lieu, selon les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
16. Il ressort des pièces du dossier que M. C... n'est présent que depuis le 17 août 2018 sur le territoire français, soit seulement quatre ans et demi à la date de l'arrêté en litige. Il n'a été admis à y séjourner qu'à titre provisoire pour l'examen de sa demande d'asile, puis à titre temporaire pendant deux ans pour motif médical. Il ne se prévaut d'aucune attache personnelle ou familiale particulière en France, alors qu'il a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de trente-quatre ans. Il n'établit pas son insertion sociale et professionnelle sur le territoire national en se bornant à se prévaloir, sans d'ailleurs en justifier, de l'exercice d'une activité de manutentionnaire et d'une formation en sécurité incendie. Ainsi, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et ne méconnaît donc pas les stipulations énoncées au point précédent. Pour les mêmes raisons, l'intimé n'est pas non plus fondé à soutenir que l'autorité préfectorale aurait commis une erreur manifeste au regard des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
Quant à l'obligation de quitter le territoire français :
17. En premier lieu, il résulte de tout ce qui précède que l'illégalité de la décision portant refus de séjour n'est pas démontrée. Par voie de conséquence, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale doit être écarté.
18. En second lieu, les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les motifs exposés au point 16.
Quant au délai de départ volontaire :
19. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français n'est pas démontrée. En conséquence, le moyen tiré de ce que la décision fixant le délai de départ volontaire serait dépourvue de base légale doit être écarté.
20. En second lieu, il ne ressort ni de la motivation de l'arrêté litigieux ni des autres pièces du dossier que le préfet se serait placé à tort en situation de compétence liée ou qu'il n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de M. C... avant de fixer le délai de départ volontaire à trente jours. L'intimé ne justifie d'ailleurs d'aucune circonstance particulière de nature à justifier un délai supérieur et le préfet n'a donc commis aucune erreur manifeste d'appréciation en lui octroyant ainsi le délai de départ de droit commun.
Quant au pays de renvoi :
21. L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". En l'espèce, alors que sa demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, l'intimé n'apporte pas la moindre précision sur les risques auxquels il pourrait se trouver exposé en cas d'éloignement vers son pays d'origine. Par conséquent, les stipulations précitées n'ont pas été méconnues.
22. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le moyen portant sur la régularité du jugement contesté, que le préfet de la Haute-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 16 février 2023, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. C... et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Sur la demande de sursis à exécution présentée par le préfet de la Haute-Garonne dans la requête n° 23TL02615 :
23. Le présent arrêt statuant sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du 17 octobre 2023, les conclusions du préfet tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement se trouvent dépourvues d'objet. Par conséquent et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense à ces conclusions, il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions en injonction présentées par l'intimé :
24. Le présent arrêt annule le jugement du 17 octobre 2023 et rejette la demande de l'intimé tendant à l'annulation de l'arrêté pris à son encontre et n'implique donc pas que le préfet de la Haute-Garonne délivre un titre de séjour à M. C.... En conséquence, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé doivent être rejetées.
Sur les frais liés aux litiges :
25. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, lequel n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, une somme quelconque au titre des frais exposés par l'intimé et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de M. C... tendant à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 17 octobre 2023 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Toulouse et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de sursis à exécution présentée par le préfet de la Haute-Garonne dans la requête n° 23TL02615.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. D... et à Me Laspalles.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 14 mai 2024, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
La greffière,
N. Baali
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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Nos 23TL02614, 23TL02615