La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/04/2024 | FRANCE | N°22TL22472

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 25 avril 2024, 22TL22472


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la mise en demeure émise le 31 janvier 2019 de payer la somme de 52 585 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée dont il restait redevable au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et aux pénalités y afférentes, ainsi que la décision du 29 janvier 2020 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Vaucluse a rejeté sa réclamation préalable, et d'ordonne

r le sursis de paiement de la somme en cause.



Par un jugement n° 2001151 du 14 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la mise en demeure émise le 31 janvier 2019 de payer la somme de 52 585 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée dont il restait redevable au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et aux pénalités y afférentes, ainsi que la décision du 29 janvier 2020 par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Vaucluse a rejeté sa réclamation préalable, et d'ordonner le sursis de paiement de la somme en cause.

Par un jugement n° 2001151 du 14 octobre 2022, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions aux fins de sursis de paiement et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 décembre 2022, M. B..., représenté par Me Andjerakian-Notari, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'ordonner le sursis de paiement de la somme de la somme de 52 585 euros visée dans la mise en demeure émise le 31 janvier 2019 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'il n'était pas saisi de conclusions d'assiette ;

- il ne pouvait faire l'objet de rappels concernant une facture émise antérieurement à l'année 2014 ;

- les sommes taxées ne constituaient pas des honoraires et ne pouvaient être prises en compte dans le chiffre d'affaires taxable de son activité ;

- la rectification méconnaît les articles 256 et 267 du code général des impôts, ainsi que l'article 34 de la Constitution.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 avril 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande de sursis de paiement est dépourvue d'objet ;

- les moyens concernant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée assignés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016 sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par le requérant sont inopérants ou ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 4 octobre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 31 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon,

- et les conclusions de M. Clen, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui exerce une activité de marchand de biens et de gestion de patrimoine, fait appel du jugement du 14 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions aux fins de sursis de paiement de la somme de 52 585 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée dont il restait redevable au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et aux pénalités y afférentes et, s'estimant exclusivement saisi, pour le surplus, de conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer cette somme, procédant d'une mise en demeure émise le 31 janvier 2019, a rejeté les conclusions correspondantes.

Sur la régularité du jugement :

2. La demande déposée par M. B... devant le tribunal administratif de Nîmes, en vertu de laquelle il contestait son imposition et entendait obtenir l'annulation de la décision du 29 janvier 2020 rejetant sa réclamation préalable pour des motifs tenant au bien-fondé de la taxe sur la valeur ajoutée mise à sa charge, devait être regardée, eu égard à son contenu et afin de donner une portée utile à ses conclusions et moyens, non seulement comme tendant à la décharge de l'obligation de payer procédant de la mise en demeure émise le 31 janvier 2019 et explicitement contestée, mais aussi comme tendant à la décharge des rappels de taxe correspondants, en droits et pénalités. M. B... est, par suite, fondé à soutenir que le tribunal a omis de statuer sur une partie de ses conclusions. Le jugement attaqué doit, dès lors et dans cette mesure, être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions sur lesquelles le tribunal administratif de Nîmes n'a pas statué et de se prononcer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer.

Sur les conclusions d'assiette :

4. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I.- Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué (...) 2. La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services autres que celles visées au b bis, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits (...) ".

5. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 27 avril 2017, que plusieurs sommes créditées sur le compte bancaire professionnel de M. B... au cours des années 2014, 2015 et 2016, non déclarées, ont été considérées par l'administration fiscale comme des recettes encaissées relatives à ses prestations professionnelles. L'ensemble de ces sommes avaient d'ailleurs été, au cours des deux premières années, facturées et enregistrées comme étant des recettes professionnelles. En se bornant à alléguer que les sommes taxées ne constituaient pas des honoraires, mais des apports de fonds propres ou des remboursements d'avances, et qu'il n'avait " aucune connaissance " de l'une des sociétés qui est à l'origine d'une partie de ces encaissements, le requérant ne remet pas en cause ces constatations. Par ailleurs, la seule production d'une copie du grand livre général faisant apparaître, à la date du 2 mai 2014, une écriture de remise de chèque de 6 000 euros à laquelle a été ajoutée la mention manuscrite " remboursement frais de notaire " et d'un relevé de compte du notaire de la société civile immobilière Maréchal Leclerc, mentionnant un crédit de 6 000 euros le 14 avril 2014 portant le libellé " R. VIRT DE MR B... POUR CPTE DE LA SCI MARECHAL LECLERC PROV/FRAIS PRET ", ne permet pas de remettre en cause la comptabilisation de cet encaissement comme un règlement opéré par cette société, à laquelle une facture de prestations de la même somme avait été adressée le 17 avril 2014. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que l'ensemble des sommes en cause constituaient des honoraires versés par ses clients, devant être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. M. B... n'est donc pas fondé à soutenir que le service aurait taxé des apports de fonds propres à l'activité professionnelle d'un contribuable, en méconnaissance de l'article 267 du code général des impôts et de l'article 34 de la Constitution, qui dispose que la loi fixe les règles concernant l'assiette des impositions de toutes natures.

6. Aux termes de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts (...) ". Il ressort des écritures comptables de M. B... que ce dernier a encaissé le 1er janvier 2014 une somme de 60 900 euros provenant de la société .... Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a considéré que la taxe grevant cette somme, alors même qu'elle correspondrait à une facture émise avant le 1er janvier 2014, était à cette date devenue exigible au sens du c) du 2 de l'article 269 du code général des impôts. Il en résulte que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le droit de reprise de l'administration était prescrit lorsque lui a été notifiée la proposition de rectification du 27 avril 2017.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. B... n'est pas fondé à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016.

Sur les conclusions en recouvrement :

8. L'ensemble des moyens soulevés par M. B... pour contester l'obligation de payer procédant de la mise en demeure émise le 31 janvier 2019 sont des moyens relatifs au bien-fondé de l'imposition correspondante, qui sont inopérants dans le cadre d'un litige relatif au recouvrement de l'impôt. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer procédant de cette mise en demeure.

Sur les conclusions aux fins de sursis de paiement :

9. Aux termes de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. / L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent (...) ".

10. M. B... a présenté, le 9 décembre 2021, une réclamation régulière relative à l'assiette des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, assortie d'une demande de sursis de paiement et réceptionnée par l'administration fiscale le 21 décembre 2021. Il a contesté devant le tribunal administratif de Nîmes le rejet de cette réclamation, intervenu le 10 mars 2022. Il ne résulte pas de l'instruction qu'une décision définitive ait été prise par ce tribunal sur cette demande.

11. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point 10 que c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont estimé que M. B..., qui avait saisi le tribunal le 3 avril 2020, avait en conséquence bénéficié en cours d'instance du sursis de paiement de la somme de 52 585 euros en application de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales et prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant aux mêmes fins, ainsi devenues sans objet. D'autre part, pour les mêmes motifs, le requérant bénéficie toujours du sursis de paiement des rappels en litige. Ainsi, les conclusions correspondantes, qui étaient dépourvues d'objet à la date d'introduction de la requête d'appel, sont irrecevables.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2001151 du 14 octobre 2022 du tribunal administratif de Nîmes est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions d'assiette présentées par M. B....

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nîmes et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées et à la direction régionale des finances publiques d'Occitanie.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2024, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22TL22472 2


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22472
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. Barthez
Rapporteur ?: M. Nicolas Lafon
Rapporteur public ?: M. Clen
Avocat(s) : CABINET ANDJERAKIAN - NOTARI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-25;22tl22472 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award