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23/04/2024 | FRANCE | N°22TL20791

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 23 avril 2024, 22TL20791


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite de rejet prise par le directeur du centre hospitalier universitaire de Toulouse sur sa demande en date du 30 janvier 2020 tendant à l'attribution d'un local syndical distinct doté d'un mobilier suffisant sur le site de l'Institut universitaire du cancer Toulouse - Oncopôle, et d'enjoindre au centre hospitalier universitaire de Toulouse de

lui attribuer un local distinct sur ce site, doté d'un mobilier suffisant et d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite de rejet prise par le directeur du centre hospitalier universitaire de Toulouse sur sa demande en date du 30 janvier 2020 tendant à l'attribution d'un local syndical distinct doté d'un mobilier suffisant sur le site de l'Institut universitaire du cancer Toulouse - Oncopôle, et d'enjoindre au centre hospitalier universitaire de Toulouse de lui attribuer un local distinct sur ce site, doté d'un mobilier suffisant et d'installer des panneaux syndicaux à disposition des agents au sein de l'ensemble des services de soins, respectant la réglementation en vigueur en termes de dimension, et de conservation des documents, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2002063 du 10 février 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande présentée par le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 mars 2022, le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse, représenté par Me Panfili, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 février 2022 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet du directeur du centre hospitalier universitaire de Toulouse née le 14 avril 2020 ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier universitaire de Toulouse, à titre principal, d'instruire sa demande d'attribution d'un local syndical sur le site de l'Institut universitaire du cancer Toulouse - Oncopôle dans le cadre du groupement de coordination sanitaire de moyens dont il est membre et de le doter d'un mobilier suffisant et d'installer des panneaux syndicaux à disposition des agents au sein de l'ensemble des services de soins, respectant la réglementation en vigueur en termes de dimension, et de conservation des documents et, à titre subsidiaire, de rechercher et de lui attribuer des locaux situés en dehors de l'enceinte des bâtiments de l'établissement à proximité, en en supportant la charge, comportant les équipements indispensables après avis du comité technique d'établissement et, en toute hypothèse, de lui attribuer le mobilier suffisant nécessaire, dans un délai de six mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable en ce que le secrétaire général dispose de la capacité et de l'intérêt à agir au nom du syndicat ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que l'institut universitaire du cancer était décisionnaire et s'est déclaré incompétent, dès lors que le personnel du centre hospitalier universitaire mis à disposition de l'institut se trouve toujours sous autorité hiérarchique du centre hospitalier et reste régi par le statut de la fonction publique ;

- il appartient au centre hospitalier de régler la question d'attribution de locaux par activation de l'instance de coordination du groupement de coordination sanitaire prévue à l'article 6.3.5 du règlement intérieur ;

- la juridiction administrative est compétente pour connaître de sa demande au visa de l'article 4 du décret n°86-660 du 19 mars 1986 ;

- le refus du centre hospitalier porte atteinte à l'exercice de la liberté syndicale dans la fonction publique hospitalière.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2023, le centre hospitalier universitaire de Toulouse, représenté par Me Sabatté, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge du syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la demande du syndicat ressort de la seule compétence de la juridiction judiciaire dès lors qu'elle n'a pas pour objet de régir l'organisation même du service public, ni ne traduit l'exercice de prérogatives de puissance publique ;

- la requête est irrecevable en ce que le secrétaire général du syndicat ne pouvait être légalement habilité à introduire l'action que par le seul congrès ;

- les moyens invoqués sont inopérants ;

- en toute hypothèse, le syndicat ne peut prétendre à un quelconque droit à bénéficier d'un local distinct en vertu des dispositions du décret du 19 mars 1986 compte-tenu des effectifs de l'établissement.

Par ordonnance du 28 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 5 septembre 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 86-660 du 19 mars 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Arslan El Yacoubi substituant Me Sabatté, représentant le centre hospitalier universitaire de Toulouse.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse a sollicité auprès du directeur de cet établissement l'octroi d'un local syndical distinct doté d'un mobilier suffisant sur le site de l'Institut universitaire du cancer Toulouse - Oncopôle, dont l'activité est gérée par le groupement de coopération sanitaire de moyens " Institut universitaire du cancer Oncopôle ". En l'absence de réponse à cette demande, ledit syndicat a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé sur sa demande par le directeur du centre hospitalier universitaire de Toulouse. Le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse relève appel du jugement du 10 février 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 100-3 du code des relations entre le public et l'administration : " Au sens du présent code et sauf disposition contraire de celui-ci, on entend par : " 1° Administration : les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements publics administratifs et les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d'une mission de service public administratif, y compris les organismes de sécurité sociale ; / 2° Public : a) Toute personne physique ; b) Toute personne morale de droit privé, à l'exception de celles qui sont chargées d'une mission de service public lorsqu'est en cause l'exercice de cette mission. " Selon l'article L. 114-2 du même code : " Lorsqu'une demande est adressée à une administration incompétente, cette dernière la transmet à l'administration compétente et en avise l'intéressé. ". Enfin, son article L. 114-3 dispose : " Le délai au terme duquel est susceptible d'intervenir une décision implicite de rejet court à compter de la date de réception de la demande par l'administration initialement saisie. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 6133-3 du code de la santé publique : " I. Le groupement de coopération sanitaire de moyens peut être constitué avec ou sans capital. Sa convention constitutive, signée par l'ensemble de ses membres, est soumise à l'approbation du directeur général de l'agence régionale de santé, qui en assure la publication. Ce groupement acquiert la personnalité morale à dater de cette publication. 1. Le groupement de coopération sanitaire de moyens est une personne morale de droit public lorsqu'il est constitué exclusivement par des personnes de droit public, ou par des personnes de droit public et des personnes physiques ou morales exerçant une profession de santé à titre libéral. 2. Le groupement de coopération sanitaire de moyens est une personne morale de droit privé lorsqu'il est constitué exclusivement par des personnes de droit privé. Dans les autres cas, sa nature juridique est fixée par les membres dans la convention constitutive (...) ".

4. Il résulte des termes de l'article 2 de la convention constitutive du groupement de coopération sanitaire de moyens dénommé " Institut universitaire du cancer - Oncopôle " signée le 23 décembre 2013 entre le centre hospitalier universitaire de Toulouse et l'Institut Claudius Regaud, personne morale de droit privé, que ce groupement a la nature d'une personne morale de droit privé. Selon l'article 3 de ce document, le groupement de coopération sanitaire de moyens a pour objet, dans le cadre des orientations définies par l'Institut universitaire du cancer de Toulouse, de faciliter, de développer ou d'améliorer l'activité de ses membres dans le domaine des soins, de la recherche et de 1'enseignement en cancérologie. En outre, selon son article 15, ses charges d'exploitation sont couvertes principalement par les participations des membres, en numéraire ou en nature. Il constitue dès lors une personne morale de droit privé chargée d'une mission de service public administratif qui doit être regardée comme une administration au sens des dispositions de l'article L. 100-3 du code des relations entre le public et l'administration.

5. En application des dispositions citées au point 2 du code des relations entre le public et l'administration, le centre hospitalier universitaire de Toulouse, destinataire d'une demande émanant du syndicat CGT de cet établissement tendant à ce que lui soit octroyé un local distinct doté d'un mobilier suffisant pour l'exercice de ses activités sur le site de l'Institut universitaire du cancer Toulouse - Oncopôle, qu'il a réceptionnée le 14 février 2020, est réputé avoir transmis cette demande au groupement de coopération sanitaire de moyens, seul habilité à statuer sur sa demande en sa qualité de gestionnaire des locaux, dès sa réception, alors même qu'en vertu des dispositions de l'article 7 de la convention constitutive du groupement les personnels mis à disposition par les membres dudit groupement restent sous l'autorité de leur établissement d'origine. En l'absence de réponse de ce dernier à cette demande dans un délai de deux mois, une décision implicite de rejet est née le 14 avril 2020. Par suite, les conclusions de la requête doivent être regardées comme étant dirigées contre la décision implicite de rejet prise par l'administrateur du groupement de coopération sanitaire de moyens Institut universitaire du cancer - Oncopôle.

6. Le syndicat requérant se prévaut des dispositions prévues à l'article 7 de la convention constitutive du groupement de coopération sanitaire de moyens, selon lesquelles " les personnels mis à disposition du groupement par les établissements membres restent régis, selon le cas, par leur contrat de travail, les conventions ou accords collectifs qui leur sont applicables ou leur statut " et qui reprennent les dispositions prévues à l'article R. 6133-6 du code de la santé publique, ainsi que des dispositions énoncées par le règlement intérieur dudit groupement, en particulier de celles de l'article 6.3.5 relatives à l'instance de coordination des instances sociales des deux établissements. Toutefois, la décision portant refus de mise à disposition d'un local syndical distinct au bénéfice du syndicat CGT du centre hospitalier universitaire, prise par l'Institut universitaire du cancer - Oncopôle, personne privée chargée d'une mission de service public, n'emporte aucune définition générale des conditions matérielles d'exercice du droit syndical des agents de droit public mis à la disposition du groupement de coopération sanitaire. Ainsi, cette décision qui concerne le seul fonctionnement interne de ce groupement n'a ni pour objet de régir l'organisation même du service public, ni ne révèle la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique. Le présent litige ne relève dès lors pas de la compétence de la juridiction administrative.

7. Il résulte de ce qui précède que le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse une somme de 1 200 euros à verser au centre hospitalier universitaire de Toulouse au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse est rejetée.

Article 2 : Le syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse versera au centre hospitalier universitaire de Toulouse une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat CGT du centre hospitalier universitaire de Toulouse, au groupement de coopération sanitaire de moyens " Institut universitaire du cancer Oncopôle " et au centre hospitalier universitaire de Toulouse.

Délibéré après l'audience du 26 mars 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 avril 2024.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A. Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°22TL20791 2


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20791
Date de la décision : 23/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Droit syndical.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : PANFILI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-23;22tl20791 ?
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