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02/04/2024 | FRANCE | N°23TL01486

France | France, Cour administrative d'appel de TOULOUSE, Magistrat statuant seul, 02 avril 2024, 23TL01486


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SCM Cerix a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision n° 2020-2456 du 27 août 2020 du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie ayant délivré au GIE Diagnoscan l'autorisation d'exploiter un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la clinique mutualiste La Catalane à Perpignan, ensemble la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique devant le ministre des solidarités et de

la santé et de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros sur le fondement des di...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCM Cerix a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision n° 2020-2456 du 27 août 2020 du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie ayant délivré au GIE Diagnoscan l'autorisation d'exploiter un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la clinique mutualiste La Catalane à Perpignan, ensemble la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique devant le ministre des solidarités et de la santé et de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2103983 du 22 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision n° 2020-2456 du 27 août 2020 du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie ayant délivré au GIE Diagnoscan l'autorisation d'exploiter un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la clinique mutualiste La Catalane à Perpignan, ensemble la décision implicite de rejet du recours hiérarchique de la SCM Cerix, mis à la charge solidaire de l'agence régionale de santé Occitanie et du GIE Diagnoscan une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juin 2023, et des mémoires enregistrés le 17 octobre 2023 et le 10 novembre 2023, l'agence régionale de santé Occitanie, représentée par Me Porte, de la Selarl d'avocats Houdart et associés, demande à la cour :

1°) d'ordonner, à titre principal sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, ou, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article R. 811-17 du même code, le sursis à exécution de ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la SCM Cerix la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir de la SCM Cerix ; elle n'a jamais prétendu que le dossier de la société requérante était incomplet au regard des dispositions de l'article R 6122-32-1 du code de la santé publique mais fait valoir qu'elle avait été trompée par la SCM Cérix qui n'avait pas l'accord de la clinique du Vallespir pour implanter sur son site l'équipement matériel lourd ; sa demande d'autorisation présentait donc un caractère frauduleux dès lors que l'adossement à un établissement de santé constituait un élément essentiel dans l'appréciation des trois demandes concurrentes dans le département des Pyrénées orientales ; il s'agit de l'un des objectifs qualitatifs du volet imagerie médicale du schéma régional de santé d'Occitanie ; sans ces déclarations mensongères, elle n'avait aucune chance d'obtenir l'autorisation sollicitée ; si elle avait obtenu cette autorisation, elle aurait pu être retirée ou abrogée à tout moment après la découverte de la fraude ; la fraude de la SCM Cérix prive celle-ci de son intérêt à agir inhérent à sa qualité de candidate évincée ; cette fraude entache également la décision par laquelle son dossier a été déclaré complet à la date du 6 mars 2020 ; elle entend donc la retirer de l'ordonnancement juridique ; l'accord donné par la clinique du Vallespir en juillet 2023 ne permet pas d'établir qu'il aurait été donné en 2020 ; un nouveau projet devra être déposé par la SCM Cerix selon les dispositions du nouveau schéma régional de santé 2023-2028 ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de l'atteinte au principe d'impartialité ; si M. B... avait exercé les fonctions de directeur de la clinique mutualiste catalane, il avait quitté ces fonctions le 26 novembre 2019, soit sept mois avant la réunion, le 10 juillet 2020, de la commission spécialisée de l'organisation des soins ; en outre, il n'était pas présent lors de cette réunion et il n'est pas établi que M. A... à qui il avait donné procuration, aurait effectivement voté pour lui ; enfin le tribunal aurait dû faire application de la jurisprudence Danthony et neutraliser un éventuel vote dès que la commission a donné un avis favorable aux trois dossiers qui lui étaient soumis et que le classement n'aurait pas été modifié, même en neutralisant trois votes ;

- l'exécution du jugement attaqué aurait des conséquences irréparables pour la continuité des soins dès lors qu'il empêche le GIE Diagnoscan d'exploiter son appareil d'IRM ; si elle a délivré, le 13 juin 2023, au GIE Diagnoscan une autorisation à titre dérogatoire qui lui permet d'exploiter effectivement son appareil IRM dans l'attente de l'arrêt de la cour, celle-ci n'a pas vocation à perdurer et il est souhaitable que l'exploitation puisse se faire sur la base d'une autorisation de droit commun.

Par des mémoires en défense enregistrés le 4 août 2023 et le 23 octobre 2023, la SCM Cerix, représentée par Me Contis conclut au rejet de la requête de l'agence régionale de santé Occitanie et à ce que soit mise à sa charge une somme de 2500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- son intérêt à agir est constitué dès lors qu'un refus d'autorisation lui a été opposé ; la commission médicale d'établissement de la clinique du Vallespir avait approuvé son projet dans sa séance du 14 février 2018 ; le dirigeant du groupe Elsan n'a jamais fait connaître son opposition au projet ;

- la demande de l'agence régionale de santé Occitanie tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle entend retirer de l'ordonnancement juridique, en application de l'article L.242-1 du code des relations entre le public et l'administration, la décision par laquelle elle a déclarée recevable et complète la demande présentée par la SCM Cerix ne pourra qu'être rejetée ;

- aucun moyen n'est de nature à justifier l'annulation du jugement contesté ; l'absence d'impartialité de la commission spécialisée de l'organisation des soins doit être retenue dès lors que trois de ses membres se trouvaient en situation de conflit d'intérêt, ce qui a nécessairement eu une influence sur les décisions de l'agence régionale de santé Occitanie puisqu'elle a eu un avis favorable mais avec trois votes contre alors que le projet du GIE Diagnoscan a obtenu l'unanimité des votes en sa faveur ; en outre, le président de séance a fait clairement allusion à la nomination comme premier ministre du maire de Prades, ville d'implantation d'un projet concurrent ; le principe d'impartialité est d'application générale et l'article L. 1451-1 du code de la santé publique est bien applicable à l'espèce ;

- ses autres moyens de première instance étaient également de nature à justifier l'annulation de la décision contestée comme l'avait conclu le rapporteur public ;

- enfin, l'agence régionale de santé Occitanie a délivré, le 13 juin 2023, au GIE Diagnoscan une autorisation à titre dérogatoire qui lui permet d'exploiter effectivement son appareil IRM dans l'attente de l'arrêt de la cour, qui n'a été publiée que le 25 septembre 2023 ; elle n'a toujours pas procédé au réexamen de sa demande d'autorisation, en méconnaissance de l'injonction prononcée par le tribunal ;

- la clinique du Vallespir a approuvé, le 14 juin 2023, un projet de travaux porté par la SCM Coradix, constituée des mêmes personnes que la SCM Cerix en vue de l'installation d'une IRM, en sa qualité de sous-locataire des locaux distincte de porteur de projet.

Par un mémoire enregistré le 27 septembre 2023, le GIE Diagnoscan, représenté par Me Duhil de Bénazé, conclut au sursis à exécution du jugement et à ce que soit mise à la charge de la SCM Cerix la somme de 3500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- si le tribunal a retenu l'intérêt à agir de la SCM Cerix à l'encontre du refus d'autorisation qui lui a été opposé, il a omis de statuer sur la fin de non-recevoir qu'il a opposée à sa demande dirigée contre l'autorisation délivrée au GIE Diagnoscan ; le caractère frauduleux de son dossier de demande d'autorisation fait obstacle à ce que son intérêt à agir soit reconnu ;

- le moyen tiré du défaut d'impartialité de la commission spécialisée de l'organisation des soins ne pouvait être retenu sur le fondement de l'article L. 1451-1 du code de la santé publique non applicable à l'espèce ; en tout état de cause, le tribunal aurait dû faire application de la jurisprudence Danthony ;

- les autres moyens de la SCM Cerix n'étaient pas de nature à entraîner l'annulation de l'autorisation délivrée au GIE Diagnoscan ; la décision d'autorisation qui lui a été accordée n'était entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle répondait aux besoins définis par le Schéma régional de santé et aux critères de priorisation notamment l'adossement à une structure ayant une activité prépondérante en cancérologie, ce qui n'était pas le cas de la clinique du Vallespir.

Par une ordonnance en date du 10 novembre 2023 la date de clôture d'instruction de l'affaire a été reportée au 1er décembre 2023 à 12 heures.

Vu :

- la requête au fond enregistrée sous le n° 23TL01473 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret, présidente de la 2ème chambre,

- les observations de Me Porte, représentant l'agence régionale de santé Occitanie, de Me Contis, représentant la SCM Cerix et Me Sorano substituant Me Duhil de Bénazé, représentant le GIE Diagnoscan.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

1. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17. ".

2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ". L'article R. 811-17 du même code dispose que : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. ".

3. En application de ces dispositions, lorsque le juge d'appel est saisi d'une demande de sursis à exécution d'un jugement prononçant l'annulation d'une décision administrative, il lui incombe de statuer au vu de l'argumentation développée devant lui par l'appelant et par le défendeur et en tenant compte, le cas échéant, des moyens qu'il est tenu de soulever d'office. Après avoir analysé dans les visas ou les motifs de sa décision les moyens des parties, il peut se borner à relever qu'aucun des moyens n'est de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué et rejeter, pour ce motif, la demande de sursis. Si un moyen lui paraît, en l'état de l'instruction, de nature à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, il lui appartient de vérifier si un moyen est de nature, en l'état de l'instruction, à infirmer ou à confirmer l'annulation de la décision administrative en litige, avant, selon le cas, de faire droit à la demande de sursis ou de la rejeter.

4. En l'état de l'instruction, les moyens soulevés par l'agence régionale de santé Occitanie, et sus analysés, ne paraissent pas de nature à justifier l'annulation du jugement n° 2103983 du 22 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision n° 2020-2456 du 27 août 2020 du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie ayant délivré au GIE Diagnoscan l'autorisation d'exploiter un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la clinique mutualiste La Catalane à Perpignan, ensemble la décision implicite de rejet du recours hiérarchique de la SCM Cerix. Il en résulte que l'agence régionale de santé Occitanie n'est pas fondée à demander le sursis à exécution de ce jugement sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative ni, en tout état de cause, sur celui de l'article R. 811-17 du même code.

Sur les frais liés au litige :

5. D'une part, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes demandées par l'agence régionale de santé Occitanie et le GIE Diagnoscan soient mises à la charge de la SCM Cerix, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la SCM Cérix à l'encontre de l'agence régionale de santé Occitanie sur le même fondement.

D É C I D E :

Article 1er : La requête l'agence régionale de santé Occitanie est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SCM Cerix et du GIE Diagnoscan tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'agence régionale de santé Occitanie, à la SCM Cérix et au GIE Diagnoscan.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2024.

La présidente de la 2ème chambre,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23TL01486 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : Magistrat statuant seul
Numéro d'arrêt : 23TL01486
Date de la décision : 02/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-03-06 Procédure. - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Armelle GESLAN-DEMARET
Avocat(s) : DUHIL DE BENAZE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-02;23tl01486 ?
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