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17/05/2023 | FRANCE | N°23TL00998

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, Juge des référés, 17 mai 2023, 23TL00998


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Domaine de Massillan a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2003887 du 10 mars 2023, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé la décharge de la majoration pour manquement délibérée appliquée à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la sociét

é Domaine de Massillan a été assujettie et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Domaine de Massillan a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 2003887 du 10 mars 2023, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé la décharge de la majoration pour manquement délibérée appliquée à la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la société Domaine de Massillan a été assujettie et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2023, la société Domaine de Massillan, représentée par Me Chetail, demande au juge des référés de la cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre la mise en recouvrement de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 et des intérêts de retard correspondant ;

2°) de mettre à la charge de l'état la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie dès lors que le paiement des impositions contestées dépasse ses capacités financières, étant donné le haut niveau de son endettement et la difficulté à obtenir des concours bancaires, et menace ainsi la poursuite de son activité dans le domaine de l'hôtellerie de luxe ;

- il existe un doute sérieux quant à la régularité de la procédure d'imposition, la proposition de rectification portant l'entête de la direction départementale des finances publiques de l'Ardèche alors qu'elle n'était pas territorialement compétente, ce qui l'a privée d'une garantie ;

- il existe un doute sérieux quant au bien-fondé de l'imposition contestée, la somme de 650 000 euros que la société civile immobilière Kadi lui a versée en 2014 étant un prêt et ne pouvant ainsi être regardée comme un avantage ou une rémunération occulte au sens du c de l'article 111 du code général des impôts.

Par un mémoire, enregistré le 15 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas établie dès lors qu'un établissement bancaire a déjà accepté de se porter caution pour le paiement des impôts contestés et que l'associé majoritaire à 98,99% de la société Domaine de Massillan est tenu à la participation solidaire au paiement de la dette de sa filiale et a donné à cette société les ressources financières nécessaires à son développement pour des montants qui excèdent celui des impôts contestés ;

- les moyens que la société Domaine de Massillan soulève ne sont pas propres à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la régularité de la procédure d'imposition et au bien-fondé des impôts contestés.

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2023 sous le n° 23TL00991, par laquelle la société Domaine de Massillan demande à la cour d'annuler le jugement du 10 mars 2023 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Le président de la cour a, par une décision du 4 janvier 2023, désigné M. Alain Barthez, président de la 1ère chambre, pour statuer sur les demandes de référé.

Vu les autres pièces du dossier, notamment les pièces produites par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et enregistrées le 16 mai 2023 à 12 heures 04.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 16 mai 2023 :

- le rapport de M. Barthez, juge des référés ;

- les observations de Mme A..., représentant le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens.

La clôture immédiate de l'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience à 16 heures 05.

Considérant ce qui suit :

1. La société Kadi, ayant pour objet social la location de locaux professionnels, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité concernant la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014. A la suite de ce contrôle, une proposition de rectification du 1er août 2016 a été adressée à la société Domaine de Massillan, l'administration fiscale estimant que la somme de 650 000 euros que lui a versée la société Kadi en 2014 constituait pour elle un avantage occulte imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application du c de l'article 111 du code général des impôts. La société Domaine de Massillan a contesté devant le tribunal administratif de Nîmes la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2014 et les pénalités correspondantes et, par un jugement du 10 mars 2023, ce tribunal a seulement prononcé la décharge de la majoration pour manquement délibérée dont cette cotisation supplémentaire était assortie mais a rejeté le surplus de la demande. La société Domaine de Massillan, qui a saisi la cour administrative d'appel d'une requête tendant à l'annulation de ce jugement en tant qu'il lui est défavorable et à la décharge des impositions encore à sa charge, demande à la cour de prononcer la suspension de leur mise en recouvrement.

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation au en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ". L'article L. 522-1 du même code dispose que : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. / Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique. / Sauf renvoi à une formation collégiale, l'audience se déroule sans conclusions du rapporteur public ".

3. Le contribuable qui a saisi le juge de l'impôt de conclusions tendant à la décharge de tout ou partie d'une imposition à laquelle il a été assujetti est recevable à demander au juge des référés, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la mise en recouvrement de l'imposition dont il s'agit, dès lors que celle-ci est exigible. Le prononcé de cette suspension est subordonné à la double condition, d'une part, qu'il soit fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la régularité de la procédure d'imposition ou sur le bien-fondé de l'imposition et, d'autre part, que l'urgence justifie la mesure de suspension sollicitée.

4. L'urgence s'apprécie objectivement et compte-tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce. En cas de demande de suspension de la mise en recouvrement d'impositions, pour vérifier si la condition d'urgence est satisfaite, le juge des référés doit apprécier la gravité des conséquences que pourraient entraîner, à brève échéance, l'obligation de payer sans délai l'imposition ou les mesures mises en œuvre ou susceptibles de l'être pour son recouvrement, eu égard aux capacités du contribuable à acquitter les sommes demandées. Pour apprécier la faculté du contribuable de se libérer de sa dette, il y a lieu de prendre en compte l'ensemble de son patrimoine et des fonds dont il dispose.

5. La société Domaine de Massillan, qui produit le bilan comptable au 31 décembre 2022 et le compte de résultat de cet exercice, se prévaut du niveau élevé tant de ses pertes pour cet exercice que son endettement pour estimer qu'un concours bancaire, qui serait nécessaire en raison du faible montant des disponibilités pour payer les droits et intérêts de retard restant à sa charge, risquerait de ne pas être obtenu, menaçant la poursuite de son activité. Toutefois, il résulte également de ces mêmes pièces que la société dispose d'un actif immobilisé et circulant supérieur à ses dettes. En outre, la société Domaine de Massillan bénéficie d'un engagement de caution de la part d'un établissement bancaire pour le paiement de la somme de 143 587 euros correspondant aux droits en litige. Au regard de l'ensemble de ces éléments, il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante ne pourrait obtenir un prêt bancaire pour le paiement de la somme de 152 202 euros correspondant aux droits et intérêts de retard restant dus à la suite du jugement du tribunal administratif. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la régularité de la procédure d'imposition et au bien-fondé des impositions, la condition d'urgence n'est pas satisfaite.

6. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter les conclusions à fin de suspension de la mise en recouvrement des impositions contestées.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à la société Domaine de Massillan au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la société Domaine de Massillan est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Domaine de Massillan et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Fait à Toulouse, le 17 mai 2023.

Le juge des référés,

A. Barthez

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°23TL00998


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 23TL00998
Date de la décision : 17/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués.

Procédure - Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000 - Référé suspension (art - L - 521-1 du code de justice administrative) - Conditions d'octroi de la suspension demandée.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Avocat(s) : LEGI AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-05-17;23tl00998 ?
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