Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 7 juillet 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2309834 du 4 juillet 2024, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 août 2024, M. A..., représenté par Me Semak, demande à la juge des référés de la cour, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution de la décision du 7 juillet 2023 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour ;
2°) d'enjoindre à toute autorité compétente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dès la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, dans l'attente de l'arrêt à intervenir au fond ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'urgence, présumée en cas de refus de renouvellement d'un titre de séjour, est en l'espèce constituée dès lors que la décision attaquée fait obstacle à la poursuite de son activité professionnelle ;
- sont de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, les moyens tirés de ce que la décision :
- est entachée d'un défaut de motivation et d'examen de sa situation personnelle ;
- est entachée d'une erreur de droit, le préfet s'étant estimé lié, à tort, par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;
- méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour, alors qu'il justifie de douze années de résidence continue sur le territoire français ;
- méconnaît les dispositions des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il justifie d'une présence en France de douze années, qu'il justifie de liens familiaux intenses et stables sur le territoire français, son père et cinq de ses frères et sœurs résidant sur le territoire français, sous couvert de cartes de résident ou comme ressortissants français, d'une forte intégration professionnelle et d'une maîtrise de la langue française ;
- est entachée d'une erreur de fait en l'absence de prise en compte de son état de santé ;
- méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation de son état de santé, dès lors que l'hépatite B chronique dont il souffre nécessite un traitement par Baraclude, qui n'est pas disponible dans son pays d'origine le Mali, lequel se caractérise, par ailleurs, par d'importantes carences de son système de soins.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 août 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la condition d'urgence n'est pas remplie et qu'aucun des moyens invoqués n'est propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.
L'Office français de l'immigration et de l'intégration a produit des pièces enregistrées le 14 août 2024.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- la requête n°24PA03454, enregistrée le 31 juillet 2024 par laquelle M. A... demande l'annulation de la décision attaquée.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la cour a, par une décision du 2 janvier 2024, désigné Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure de la 3ème chambre, pour statuer sur les demandes de référé.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 27 septembre 2023.
Ont été entendu au cours de l'audience publique, tenue en présence de Mme Agnès Maignan, greffière d'audience :
- le rapport de Mme Julliard, juge des référés ;
- les observations de Me Ben Gadi substituant Me Semak, représentant M. A... ;
La clôture d'instruction a été prononcée à l'issue de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien, entré en France le 2 janvier 2011 selon ses déclarations. Il a été titulaire, en dernier lieu, d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en raison de son état de santé, valable du 19 juillet 2021 au 18 juillet 2022, dont il a sollicité le renouvellement, en assortissant cette demande d'une demande de titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale. Par décision du 7 juillet 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté l'ensemble de ses demandes. M. A... demande au juge des référés, statuant par application des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de cette décision.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) ". Aux termes de l'article L. 522-1 du même code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique. (...) ". Enfin, aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article R. 522-1 du même code : " La requête visant au prononcé de mesures d'urgence doit (...) justifier de l'urgence de l'affaire ".
3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension de l'exécution d'une décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate sur la situation concrète de l'intéressé. Cette condition d'urgence sera en principe constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour, comme d'ailleurs d'un retrait de celui-ci. Dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse.
4. D'une part, M. A... soutient que travaillant en intérim de manière continue depuis 2019, la décision du 7 juillet 2023 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour fait obstacle à la signature de contrats de mission et met en péril sa situation professionnelle. Si le préfet soutient dans son mémoire en défense que l'intéressé est titulaire d'une autorisation provisoire de séjour valable du 31 mai au 30 novembre 2024 lui permettant d'occuper un emploi, il n'en justifie pas. Par suite, il n'établit pas l'existence d'une circonstance de nature à faire échec à la présomption d'urgence exposée au point 3, en cas de refus de renouvellement d'un titre de séjour. La condition d'urgence doit, par conséquent, être regardée comme remplie.
5. D'autre part, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, compte tenu des éléments produits par M. A..., notamment la Nomenclature nationale des médicaments à usage humain autorisés au Mali datée de mai 2022 sur laquelle n'apparaît pas le traitement antiviral Baraclude suivi par M. A... depuis 2018 et dont plusieurs ordonnances médicales produites au dossier indiquent le caractère non substituable, tendant à établir l'indisponibilité du médicament nécessaire au traitement de la pathologie de M. A... dans son pays d'origine, éléments non sérieusement contredits en défense, est de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée.
6. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que les deux conditions prévues par l'article L. 521-1 du code de justice administrative sont remplies. Il y a lieu, en conséquence, de prononcer la suspension de l'exécution de la décision du 7 juillet 2023 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler le titre de séjour de M. A..., jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa légalité.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
7. La suspension de la décision de refus de renouvellement de son titre de séjour à M. A... implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis, ou tout préfet territorialement compétent, délivre à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour, valable jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur sa requête, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente ordonnance. Dans les circonstances de l'espèce, il n'est pas nécessaire d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions relatives aux frais de l'instance :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros, application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
ORDONNE :
Article 1er : L'exécution de la décision du 7 juillet 2023 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler le titre de séjour de M. A... est suspendue jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa légalité.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis, ou à tout préfet territorialement compétent, de délivrer à M. A... une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'à ce qu'il ait été statué au fond sur sa requête, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente ordonnance.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A... et au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Copie en sera adressée à l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration.
Fait à Paris, le 30 août 2024.
La juge des référés,
M. Julliard La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°24PA03569 2