Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... C... et Mme D... E... épouse C... ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les deux arrêtés du 17 mai 2021 par lesquels le préfet de police a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2123230-2123234 du 25 janvier 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces, enregistrés le 20 mai 2022, le 30 mai 2022 et le 18 juillet 2022, M. et Mme C..., représentés par Me Hug, demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces deux arrêtés ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de leur délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer leur situation et, dans l'attente de ce réexamen, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour les autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à leur conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- les arrêtés attaquées sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- ils méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 22 novembre 2023, la clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 22 décembre 2023 à 12h00.
Par deux décisions du 11 avril 2022 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport A... d'Haëm, président-rapporteur.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C..., ressortissants algériens, nés respectivement le 12 avril 1980 et le 19 août 1990 et entrés en France, selon leurs déclarations, le 6 avril 2019, ont sollicité, le 20 novembre 2020 et le 29 janvier 2021, leur admission au séjour en qualité d'accompagnants d'un enfant malade. Par deux arrêtés du 17 mai 2021, le préfet de police a rejeté leur demande, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. et Mme C... font appel du jugement du 25 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.
2. En premier lieu, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Par ailleurs, les stipulations du 7 de l'article 6 de cet accord prévoient la délivrance d'un certificat de résidence au ressortissant algérien dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays, mais n'étendent pas le bénéfice de ce titre de séjour aux parents d'un enfant malade. Toutefois, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que le préfet, dans le cadre de son pouvoir de régularisation, délivre à un ressortissant algérien une autorisation de séjour pour l'accompagnement d'un enfant malade.
3. Pour prendre les deux arrêtés contestés, le préfet de police qui a examiné, à titre dérogatoire, la situation A... et Mme C... au regard des dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est notamment fondé sur un avis du 2 mars 2021 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel a estimé, en particulier, que si l'état de santé de leur fille, la jeune B... née le 20 février 2009, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, y bénéficier d'un traitement approprié.
4. Pour contester cette appréciation, les requérants font valoir que l'état de santé de leur fille B..., qui souffre d'un diabète sévère, nécessite un traitement par pompe à insuline, qui est indisponible en Algérie, et font valoir également les pénuries fréquentes d'insuline prévalant dans ce pays ainsi que l'absence de services spécialisés dans la prise en charge des enfants diabétiques. Toutefois, ni les documents d'ordre médical produits par les requérants, notamment un certificat médical établi le 10 novembre 2020 par un praticien du service d'endocrinologie et diabétologie pédiatrique de l'hôpital Robert-Debré, indiquant, notamment, que la jeune B... bénéficie en France d'une " prise en charge en service spécialisé avec adaptation d'un matériel de soins et d'outils de surveillance non disponibles pour elle dans son pays d'origine ", un certificat médical établi le 17 mai 2022 par un autre médecin du même service, faisant état, en particulier, de ce que " les traitements et le suivi proposés en France ne pourraient pas l'être en Algérie " ainsi qu'une attestation d'un médecin algérien, non daté, mentionnant qu'" une pompe à insuline de type Mylife Omnipod et un capteur d'autosurveillance de glucose sont actuellement indisponibles en Algérie ", ni les différents articles en ligne qu'ils versent, portant sur les insuffisances de la prise en charge des patients diabétiques en Algérie, ne sauraient suffire, compte tenu des termes dans lesquels ces certificats médicaux sont rédigés ou du contenu de ces articles, à remettre en cause les éléments versés en défense, en première instance, par le préfet de police, notamment quant à l'existence en Algérie et, en particulier, dans la wilaya d'Oran de consultations et services en diabétologie et à la disponibilité dans ce pays et dans cette région de pompes à insuline. Dans ces conditions et en l'absence de tout autre élément précis et objectif de nature à démontrer que la jeune B... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie en Algérie, le préfet de police, en refusant de délivrer une autorisation de séjour à M. et Mme C... en qualité d'accompagnants d'un enfant malade, n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation.
5. En second lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme C... sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 6 avril 2019 et ne peuvent se prévaloir, à la date des arrêtés contestés, soit le 17 mai 2021, que d'une durée de séjour relativement brève, au demeurant dans des conditions irrégulières. En outre, leurs trois jeunes enfants, B... née en 2009, Asmaa née en 2012 et Yanis né en 2017, inscrits à cette date respectivement en CM2, en CE1 et en petite section de maternelle, n'y ont été scolarisés au plus tôt qu'au mois de juin 2019. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne ressort pas des pièces du dossier que la jeune B... ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie en Algérie, ni d'une scolarisation normale. Enfin, M. et Mme C..., qui ne font état d'aucun autre lien personnel ou familial sur le territoire, ni d'aucune insertion professionnelle, ne justifient, à la date des arrêtés attaqués, d'aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'ils poursuivent normalement leur vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, en Algérie, ni que leurs trois enfants ne pourraient pas y bénéficier d'une scolarisation. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, les arrêtés attaqués ne peuvent être regardés comme ayant méconnu l'intérêt supérieur des enfants A... et Mme C... et, en particulier, de la jeune B.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écartés.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête A... et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., à Mme D... E... épouse C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 20 février 2024, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- M. Pagès, premier conseiller,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2024.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseur le plus ancien,
D. PAGES
La greffière,
Z. SAADAOUI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA02348