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31/05/2023 | FRANCE | N°22PA01718

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 31 mai 2023, 22PA01718


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par des requêtes distinctes, d'une part, la société par actions simplifiées (SAS) Hair Cesson a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 septembre 2015 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercice clos en 2012, 2013 et 2014, et, d'autre part, M. et Mme A... B...

ont demandé au même Tribunal de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par des requêtes distinctes, d'une part, la société par actions simplifiées (SAS) Hair Cesson a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 septembre 2015 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercice clos en 2012, 2013 et 2014, et, d'autre part, M. et Mme A... B... ont demandé au même Tribunal de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par deux jugements nos 1807376/3 et 1807390, 1807397/3 du 24 février 2022, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 14 avril 2022, la société Hair Cesson, représentée par Me Xavier Canis, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1807376/3 du 24 février 2022 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'administration a procédé à des traitements informatiques sans respecter la procédure prévue au II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, réalisant ainsi un détournement de procédure, et sans lui restituer les traitements opérés dans les conditions prévues par le VI de l'article L. 16 B de ce même livre ;

- la proposition de rectification est irrégulière dans son ensemble, et insuffisamment motivée, dès lors qu'elle est fondée sur des documents dont la saisie a été annulée par le juge judiciaire ;

- le rejet de la comptabilité n'est pas fondé dès lors qu'elle n'a pas eu recours à un logiciel frauduleux ;

- la reconstitution de son chiffre d'affaires a été effectuée selon une méthode viciée et sommaire ;

- les pénalités de 80 % pour manœuvres frauduleuses ne sont pas fondées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 décembre 2022.

II. Par une requête, enregistrée le 14 avril 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Xavier Canis, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1807390, 1807397/3 du 24 février 2022 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le rejet de la comptabilité des sociétés n'est pas fondé dès lors qu'elles n'ont pas eu recours à un logiciel frauduleux ;

- la méthode de reconstitution à l'origine des distributions litigieuses est viciée et sommaire ;

- ils ne peuvent être regardés comme bénéficiaires de revenus distribués inexistants ;

- les pénalités de 80 % pour manœuvres frauduleuses ne sont pas fondées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 28 décembre 2022.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Segretain,

- et les conclusions de Mme Prévot, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Hair Cesson, dont M. et Mme B... détiennent la totalité du capital, exploite un salon de coiffure à Cesson (Seine-et-Marne). A la suite de la vérification de sa comptabilité, conclue par deux propositions de rectification des 17 décembre 2015 et 8 juillet 2016, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2012 au 30 septembre 2015 et elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercice clos en 2012, 2013 et 2014. M. et Mme B... ont également fait l'objet d'un contrôle sur pièces, de surcroît consécutif aux vérifications de comptabilité de la SAS Hair Daumesnil et de la SARL Hair République, dont ils détiennent, directement ou indirectement, respectivement la totalité et la majorité du capital, conclu par des propositions de rectification des 17 décembre 2015 et 22 juillet 2016, à l'issue duquel ils ont été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012, 2013 et 2014. Par deux requêtes distinctes, la société Hair Cesson et M. et Mme B... relèvent appel des jugements du 24 février 2022 par lesquels le Tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n° 22PA01718 et 22PA01719 présentant à juger des questions connexes et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur la requête de la société Hair Cesson :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

3. Aux termes du dernier alinéa du VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales : " En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés saisie dans les conditions prévues au présent article, l'administration communique au contribuable, au plus tard lors de l'envoi de la proposition de rectification prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76, sous forme dématérialisée ou non au choix de ce dernier, la nature et le résultat des traitements informatiques réalisés sur cette saisie qui concourent à des rehaussements, sans que ces traitements ne constituent le début d'une procédure de vérification de comptabilité. (...) " et aux termes de l'article L. 47 A du même livre : " II. - En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : / a) Les agents de l'administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ; / b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. (...) c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. (...) ".

4. En premier lieu, la société Hair Cesson soutient que le service vérificateur a réalisé des traitements informatiques à partir des données issues de ses fichiers d'écritures comptables sans avoir respecté la procédure prévue par les dispositions précitées du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales et, en particulier, sans lui avoir demandé de faire un choix entre les différentes options prévues par cet article. Toutefois, il résulte de l'instruction que les traitements informatiques réalisés par le vérificateur ont uniquement porté sur les fichiers issus du logiciel Marlix saisis lors des visites domiciliaires qui ont eu lieu le 30 septembre 2015 dans les locaux de la société situés au centre commercial de Boissenart à Cesson et au domicile personnel de son gérant, M. B..., en vertu d'ordonnances des juges des libertés et de la détention des tribunaux de grande instance de Créteil et de Melun des 24 et 28 septembre 2015 et en particulier sur les fichiers " Fiche.fic ", " Client.fic ", " Personne.fic " dans la partie Caisse et la partie Bureau du logiciel. Il résulte également de l'instruction que le service n'a utilisé les fichiers obtenus dans le cadre de la vérification de comptabilité que pour s'assurer que la comptabilité de la société était effectivement établie sur la base des données issues du logiciel Marlix et que, s'il a effectué des rapprochements entre les données issues de ce logiciel et la comptabilité, c'est sans retraitement de cette dernière mais seulement en confrontant les données y figurant avec celles enregistrées dans le logiciel. Si la société soutient qu'il ressort des propositions de rectification que le service aurait transposé les fichiers des écritures comptables fournies sous format " wordpad " en format " Excel " et aurait utilisé des filtres pour ne faire ressortir que les seules informations dont il avait besoin, à savoir les ventes effectuées en espèces, l'administration fait valoir, sans être utilement contredite, que le service s'est borné à reproduire des captures d'écran dans les propositions de rectification. Dans ces conditions, la société Hair Cesson ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales ni d'un détournement de procédure.

5. En deuxième lieu, la requérante soutient que la procédure est entachée d'irrégularité dès lors que le service ne l'a pas sollicitée en ce qui concerne le choix des modalités de communication de la nature et du résultat des traitements informatiques réalisés sur les documents saisis, en méconnaissance des dispositions précitées du VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales. Toutefois, ni l'article L. 16 B de ce livre ni aucune autre disposition législative ou réglementaire n'impose un formalisme particulier en ce qui concerne le choix des modalités de communication en cause tant de la part de l'administration que du contribuable. En outre, la société requérante n'établit ni même n'allègue avoir demandé à exercer ce choix et s'être heurtée à un refus de l'administration. Enfin, il résulte de l'instruction que la nature et le résultat de ces traitements ont été exposés et débattus contradictoirement tout au long de la procédure et qu'ils ont été exposés à nouveau, par écrit, dans les propositions de rectification et l'administration fait valoir qu'alors qu'il a été proposé à la société, lors des réunions de présentation des résultats du contrôle qui se sont déroulées les 14 décembre 2015 et 20 juin 2016, que les résultats des traitements lui soient communiqués sous forme dématérialisée, la société n'a jamais manifesté son souhait d'obtenir les résultats des traitements en format papier.

6. Enfin, s'il est constant que par une ordonnance du 28 septembre 2017 la Cour d'appel de Versailles a annulé la procédure de saisie autorisée par le juge des libertés et de la détention de Versailles à l'encontre de la société Marlix, éditrice du logiciel utilisé par la société requérante, il résulte de l'instruction que les rehaussements en litige ont été établis sur la seule base des fichiers saisis dans les locaux de la requérante et chez M. B..., son gérant, dans le cadre de procédures distinctes autorisées par les juges de la détention et des libertés de Melun et de Créteil, lesquelles n'ont pas fait l'objet d'une annulation. Il résulte également de l'instruction et des propositions de rectification que les documents saisis dans les locaux de la société Marlix n'ont été consultés que pour confirmer, sur un mois de l'année 2013, le constat de la suppression des recettes établi par le traitement des données valablement saisies et que les redressements en litige auraient été arrêtés à l'identique sans cette confirmation. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que ces redressements ne reposaient pas sur des documents obtenus dans le cadre d'une procédure irrégulière et, par conséquent, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la proposition de rectification doit, en tout état de cause, être écarté.

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

7. Pour écarter comme dépourvue de caractère probant la comptabilité de la requérante, régulière en la forme, le service a relevé que celle-ci utilisait le logiciel Marlix, dont il avait été informé par un aviseur qu'il disposait d'un module " Image.exe ", utilisable à partir d'un support externe, permettant la suppression de recettes. L'existence de ce module ainsi que le fonctionnement du système d'omission de recettes qu'il permet ont été confirmés par la saisie, auprès d'un tiers client de la société Marlix, d'un CD-Rom sur lequel ce module était enregistré. Le service a ensuite constaté, à partir de l'analyse des données présentes dans l'ordinateur saisi au domicile de M. B..., sur lequel était installée la partie " Bureau " du logiciel Marlix, que ce module " Image.exe " avait été exécuté de manière régulière pendant la période vérifiée, ces exécutions étant révélées par la lecture des données contenues dans la fonction " Prefetch " du système d'exploitation de cet ordinateur. Il a ensuite constaté dans les fichiers présents sur cet ordinateur saisi que, pour les mois d'août et septembre 2015, des fichiers " fiche.fic " non encore retraités par le module " Image.exe " présentaient un montant des recettes " Espèces " comptabilisées très nettement supérieur à celui déclaré pour l'ensemble de la période vérifiée. Il a également constaté à partir de l'analyse de ces mêmes données que le fichier " Personne ", recensant le chiffre d'affaires mensuel total et détaillé, client par client, de chaque employé du salon, et qui n'est pas modifié par le module " Image.exe ", présentait systématiquement un chiffre d'affaires supérieur, dans une proportion de 3 500 euros en moyenne, à celui figurant dans les fichiers " fiche.fic " enregistrés pour la comptabilisation des recettes déclarées. Enfin le service a constaté la présence sur l'ordinateur de M. B... d'un fichier " Global.fic " qui enregistrait les paramètres de suppression appliqués, lequel fichier était horodaté à la même minute que les fichiers " fiche.fic " et que ce fichier " Global.fic " mentionnait dans la colonne intitulée " enlever " 9,39 %, dans la colonne " enleverdam " 65 % et dans la colonne " enlevermes " 35 %.

8. La requérante ne conteste pas efficacement la fiabilité des informations issues de la fonction " Prefetch " de l'ordinateur de son dirigeant en se bornant à relever qu'elles ont été lues au moyen d'un logiciel libre et non agréé. Il ne résulte pas plus de l'instruction que le module " Image.exe " constituerait un virus ou un anti-virus comme l'avance la requérante, ni que ce module ne pourrait avoir été exécuté qu'à partir d'une clé USB et non d'un CD-Rom comme cela ressort de la lecture des données " Prefetch ". Enfin et surtout, la requérante ne conteste pas les différences significatives des chiffres d'affaires enregistrés dans les fichiers " Personne " et " Fiche.fic " et, compte tenu de leur caractère récurrent et portant systématiquement sur les recettes en espèces, ces anomalies constatées ne peuvent être expliquées, comme elle le soutient, par un dysfonctionnement informatique, une mauvaise manipulation du logiciel ou des saisies erronées par le personnel. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant qu'un logiciel frauduleux a été utilisé pour établir sa comptabilité, dès lors que les fichiers " résumé de caisse ", qui sont générés par la partie " Bureau " du logiciel Marlix après le transfert des données de gestion de sa partie " Caisse ", sont transmis au comptable pour la comptabilisation mensuelle des produits, des encaissements et de la taxe sur la valeur ajoutée. Dans ces conditions, et alors même qu'elle aurait été régulière en la forme, la comptabilité de la société, qui ne retrace qu'une partie des opérations réalisées par cette dernière, est dépourvue de caractère probant et a pu être écartée comme telle par le service.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

9. Pour reconstituer le chiffre d'affaires réalisé par la société Hair Cesson au cours des exercices en cause, le service a, d'une part, au titre de l'exercice clos en 2012, retenu la part des espèces au titre de la période du 1er août au 30 septembre 2015, soit 10,70 %, et a majoré de ce pourcentage le chiffre d'affaire déclaré et, d'autre part, au titre des exercices clos en 2013, 2014 et de l'année 2015, a utilisé le chiffre d'affaires mentionné dans les fichiers " Personne ", qui retrace le chiffre d'affaires par employé et n'est pas modifié par le module " Image.exe ", à l'exception du mois d'août 2014 pour lequel ce fichier n'ayant pu être exploité, la fraude a été estimée à la moyenne de celle relevée pour les 7 mois précédents de l'exercice 2014.

10. D'une part, la société requérante ne peut utilement relever que le fichier " Personne ", qui figure dans la partie " Caisse " du logiciel Marlix, ne constitue pas une pièce comptable, dès lors qu'il est constant que les employés qui y sont mentionnés sont bien exactement ceux de la société sur la période contrôlée et que les données de ce fichier sont exactes concernant les chiffres d'affaires mensuels réalisés par chacun de ces employés sur cette même période. D'autre part, la société requérante soutient que la méthode de reconstitution mise en œuvre serait radicalement viciée dès lors qu'en divisant le chiffre d'affaires mensuel que le service a estimé éludé par le nombre d'anomalies qu'il a relevées en comparant les fichiers " Fiche.fic " et " Clients ", le montant de facture moyenne par client qui en résulte serait d'un montant de plusieurs centaines d'euros, ce qui est totalement irréaliste au regard de ses conditions d'exploitation. Il résulte toutefois de l'instruction et n'est pas sérieusement contesté que le nombre d'anomalies ainsi relevées par le service ne constitue aucunement un chiffre exact, mais simplement un indice d'une minoration systématique de recettes, dès lors que le fichier " Clients ", qui ne recense que le dernier passage de chaque client du salon, ne permet pas de retracer le nombre total exact de clients passés au salon pour chaque mois, et qu'un certain nombre des ventes enregistrées ne mentionnent aucun nom de client. Dans ces conditions, et alors qu'elle ne propose aucune autre méthode d'évaluation plus précise, la société requérante ne conteste pas utilement la méthode de reconstitution mise en œuvre par le service vérificateur, qui n'est ni sommaire, ni radicalement viciée dans son principe.

En ce qui concerne les pénalités :

11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : (...) c. 80 % en cas de manœuvre frauduleuse (...) ".

12. Il résulte de l'instruction, et en particulier des propositions de rectification des 17 décembre 2015 et 8 juillet 2016 notifiées à la société Hair Cesson, que l'administration, pour établir les pénalités litigieuses, a notamment retenu l'utilisation par la société Hair Cesson de manière récurrente d'une application informatique permettant de minorer les recettes encaissées et de réduire la base imposable tant à l'impôt sur les sociétés qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le montant des recettes dissimulées s'élevant respectivement à 53 413 euros, 60 247 euros, 64 591 euros au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014, et à 42 900 euros pour la période du 1er janvier au 31 août 2015. Elle a également relevé que l'usage régulier, au moins une fois par mois, de l'outil informatique mis en œuvre via un support externe à l'ordinateur ne peut résulter que d'une volonté manifeste de supprimer des recettes imposables et que le fait d'effacer des recettes notamment par la suppression puis la renumérotation de fiches est constitutif d'agissements délibérés destinés à créer une situation occultant des opérations imposables tout en donnant à la comptabilité l'apparence de la sincérité et en réduisant les risques de révélation des irrégularités. L'administration apporte ainsi la preuve de ce que la société Hair Cesson a mis en œuvre des procédés de nature à l'égarer ou à restreindre son pouvoir de contrôle. Par suite, les pénalités de 80 % pour manœuvres frauduleuses infligées à la société sont fondées.

13. Il résulte de ce qui précède que la société Hair Cesson n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

Sur la requête de M. et Mme B... :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

14. En premier lieu, si M. et Mme B... contestent le bien-fondé des rectifications notifiées à la société Hair Cesson, dont le montant a servi de base aux impositions litigieuses avec les rectifications notifiées aux sociétés Hair Daumesnil et Hair République sur le même motif, et contestées par le même moyen, il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 10 que ce moyen doit être écarté.

15. En second lieu, dès lors que les rectifications notifiées aux sociétés sont fondées, le moyen tiré de ce que, par voie de conséquence, les revenus distribués litigieux seraient inexistants ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne les pénalités :

16. Il résulte de ce qui a été dit aux points 7 à 10 et au point 12 que la société Hair Cesson, ainsi que, de la même manière, les sociétés Hair Daumnesil et Hair République, ont utilisé, de façon récurrente et pour des montants importants, un outil informatique, mis en œuvre par un support externe en lien avec l'ordinateur de leur gérant, permettant de faire disparaître des recettes d'exploitation. Il est en outre constant que M. B... contrôlait les sociétés en sa qualité de gérant et de maître de l'affaire. Il est dès lors à l'origine de la dissimulation réitérée des recettes non déclarées de ces dernières, la mise en œuvre de ces procédés lui ayant également permis de dissimuler ses propres insuffisances déclaratives à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux. Par suite, l'administration établit que M. B... a fait usage d'artifices destinés à l'égarer ou à restreindre son pouvoir de contrôle. Elle était dès lors fondée à appliquer aux rectifications litigieuses une majoration de 80 % pour manœuvres frauduleuses sur le fondement des dispositions précitées du c) de l'article 1729 du code général des impôts.

17. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes tendant à la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités. Par voie de conséquence, les conclusions qu'ils ont présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de la société Hair Cesson et de M. et Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Hair Cesson, à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Topin, présidente,

- M. Magnard, premier conseiller,

- M. Segretain, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

Le rapporteur,

A. SEGRETAINLa présidente,

E. TOPIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Nos 22PA01718, 22PA01719 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01718
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme TOPIN
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: Mme PRÉVOT
Avocat(s) : CABINET SCP CANIS LE VAILLANT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-05-31;22pa01718 ?
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