Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... G...a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 à 2012.
Par un jugement n° 1500764/1-2 du 31 mars 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés respectivement les 31 mai 2016, 4 août 2016 et 14 juin 2017, M. G..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1500764/1-2 du 31 mars 2016 ;
2°) d'annuler la décision du 10 novembre 2014 ;
3°) de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités et intérêts de retard y afférents ;
4°) à titre subsidiaire de faire droit partiellement à ces conclusions ;
5°) de condamner l'administration au versement des intérêts moratoires au titre de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales sur les sommes versées pour le recouvrement des impositions en litige ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros hors taxe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre 1 500 euros hors taxe au titre du litige de première instance, outre les entiers dépens de première instance et d'appel.
Il soutient que les sommes versées en 2010, 2011 et 2012 ont bien le caractère d'aliments et sont par suite fiscalement déductibles compte tenu de l'insuffisance des ressources financières de ses parents en Algérie, de l'importance de ses propres moyens financiers et des justificatifs tant de la réalité des versements effectués que des ressources suffisantes du débiteur d'aliments, de la non disproportion des versements par rapport à ces ressources et enfin de l'insuffisance des ressources du créancier d'aliments.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut à l'irrecevabilité des conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires et au rejet du surplus de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. G... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,
- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.
1. Considérant que M. G... a déduit de son revenu imposable des pensions alimentaires pour des montants respectifs de 5 000 euros en 2010 et de 14 000 euros en 2011 et en 2012 ; que par une réclamation datée du 19 mai 2014 le requérant a contesté les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge pour des montants de 1 824 euros en 2010, 4 906 euros en 2011 et 1 561 euros en 2012, résultant de la remise en cause du caractère déductible des sommes versées à ses parents qui résident en Algérie ; qu'il a demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti en conséquence au titre des années 2010 à 2012 ; qu'il relève régulièrement appel du jugement n° 1500764/1-2 du 31 mars 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision rejetant la réclamation de M. G... :
2. Considérant que la décision par laquelle l'administration fiscale statue sur la réclamation contentieuse d'un contribuable ne constitue pas un acte détachable de la procédure d'imposition ; qu'elle ne peut, en conséquence, être déférée à la juridiction administrative par la voie du recours pour excès de pouvoir ; que les conclusions de M. G... tendant à l'annulation de la décision par laquelle l'administration fiscale a rejeté sa réclamation ne peuvent par suite qu'être rejetées ;
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : " L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (...) sous déduction : / (...) II. Des charges ci-après (...) : / (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil (...) " ; qu'aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin " ; qu'aux termes de l'article 207 de ce code : " Les obligations résultant de ces dispositions sont réciproques (...) " ; qu'aux termes de l'article 208 du même code : " Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, si les contribuables sont autorisés à déduire du montant total de leurs revenus, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu, les versements ainsi que les montants correspondant à la valeur des avantages en nature qu'ils font à leurs parents dans le besoin, il incombe à ceux qui ont pratiqué ou demandé à pratiquer une déduction de cette nature de justifier que leurs ascendants étaient privés de ressources suffisantes et, dès lors, en droit de demander des aliments ;
4. Considérant qu'il appartient au contribuable d'apporter la preuve de l'état de besoin du bénéficiaire de la pension alimentaire ; qu'en outre, en application de l'article R*. 194-1 du livre des procédures fiscales, il incombe à M. G... de démontrer l'exagération des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu en litige dès lors qu'il résulte de l'instruction qu'il n'a pas répondu à la proposition de rectification du 20 novembre 2013 ;
5. Considérant que M. G... soutient avoir versé entre 2010 et 2012, au bénéfice de son père et sa mère résidant en Algérie, diverses sommes à titre de pension alimentaire ; que s'il produit au soutien de ses allégations, pour la première fois en appel, un extrait de relevé bancaire mentionnant un virement de 20 000 euros effectué le 30 mai 2011 au profit de son père, M. D... G..., le numéro du compte bénéficiaire en Algérie ne correspond pas à celui de ce dernier sur lequel a été effectué le virement de la pension alimentaire l'année précédente, alors que le requérant avait produit devant les premiers juges un ordre de transfert international de 20 000 euros établi le 2 mai 2011 au bénéfice de son frère, M. E... G... ; que, dans ces conditions, les justificatifs produits ne sont pas de nature, en l'absence de caractère probant, à établir la réalité du virement allégué au titre de l'année 2011 dont le montant est au surplus supérieur à celui de la pension alimentaire déclarée à hauteur de 14 000 euros ; que s'agissant de l'année 2012, si M. G... justifie par la production de deux documents établis le 22 février 2012 par le Crédit Lyonnais le virement d'une somme de 14 000 euros au bénéfice de son père et l'acquittement de la commission de virement correspondante, il résulte de l'instruction que M. G... a déclaré au titre de la même année 21 691 euros de revenus sans que l'intéressé puisse régulièrement prétendre à la prise en compte des revenus de Mme F... avec laquelle il vit en concubinage en l'absence d'un lien de filiation entre cette dernière et le créancier de la pension alimentaire ; que, dès lors que la pension alimentaire déclarée au titre de l'année 2012 représente 64 % des revenus déclarés la même année par M. G..., elle doit être regardée comme disproportionnée par rapport aux ressources du contribuable ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction des sommes de 14 000 euros déclarées par M. G... au titre de pensions alimentaires pour les années 2011 et 2012 ;
6. Considérant, toutefois, qu'au titre de l'année 2010, M. G... justifie par la production d'un ordre de transfert international et un extrait de relevé bancaire avoir effectué un virement de 5 000 euros au bénéfice de son père le 15 décembre 2010 ; qu'il justifie en outre l'état de besoin de ses parents dont il n'est pas contesté qu'ils percevaient une retraite de 237 euros par mois en 2010 ; que le montant de la pension alimentaire en litige qui représente 12,4 % des revenus déclarés par M. G... au titre de l'année 2010 n'est pas disproportionné ; qu'il suit de là que M. G... démontre que la pension alimentaire en cause versée au titre de l'année 2010 à ses parents satisfait aux obligations susvisées ;
En ce qui concerne le bénéfice de la doctrine administrative :
7. Considérant que M. G... ne peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de réponses ministérielles à M. A... en date des 30 novembre 1998 et 12 avril 1999, dès lors qu'elles ne comportent pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. G... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2010 ;
Sur les intérêts moratoires :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés " ; qu'en vertu du troisième alinéa de l'article R*. 208-1 du même livre, les intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 précité sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ;
10. Considérant que, faute de litige né et actuel opposant le requérant au comptable chargé du paiement des intérêts moratoires visés à l'article L. 208 précité, les conclusions tendant au paiement de tels intérêts à raison des dégrèvements sollicités sont irrecevables, ainsi que le relève le ministre ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. G...d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : M. G... est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2010.
Article 2 : Le jugement n° 1500764/1-2 du 31 mars 2016 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. G... une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. G... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... G...et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au directeur général des finances publiques (direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris - pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 20 juin 2017 à laquelle siégeaient :
M. Auvray, président de la formation de jugement,
Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,
M. Legeai, premier conseiller,
Lu en audience publique le 7 juillet 2017.
Le rapporteur,
A. MIELNIK-MEDDAH
Le président,
B. AUVRAY
Le greffier,
C. RENE-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA01768