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16/05/2017 | FRANCE | N°15PA03616

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 16 mai 2017, 15PA03616


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 par lequel la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a prononcé son licenciement, ainsi que la décision du 13 octobre 2014 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1429360/5-3 du 15 juillet 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté du 29 août 2014.

Procédure devant la Cour :

Par une requête e

nregistrée le 16 septembre 2015, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2014 par lequel la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche a prononcé son licenciement, ainsi que la décision du 13 octobre 2014 rejetant le recours gracieux formé contre cette décision.

Par un jugement n° 1429360/5-3 du 15 juillet 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté du 29 août 2014.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 septembre 2015, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juillet 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris.

Elle soutient que contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, le recteur a examiné la possibilité d'accorder à M. A...le bénéfice d'une deuxième année de stage ; la décision négative prise sur ce point n'avait pas à être formalisée autrement que par la transmission au ministre de l'entier dossier du stagiaire afin que cette autorité, seule compétente pour ce faire, mette fin au stage et, le cas échéant, procède au licenciement de l'intéressé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2016, M.A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au ministre chargé de l'éducation nationale, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de le faire bénéficier d'une seconde année de stage, et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 29 janvier 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 février 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 72-581 du 4 juillet 1972 ;

- l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

1. Considérant que M. A...a été reçu à la session 2013 du CAPET externe de biotechnologies option biochimie génie biologique ; qu'il a été affecté pour une année de stage dans l'académie de Paris au lycée Pierre Gilles de Gennes à Paris ; que par décision du 1er juillet 2014, le jury académique de titularisation s'est prononcé pour un " refus définitif de sa titularisation " ; que par arrêté en date du 29 août 2014, la ministre de l'éducation nationale a prononcé son licenciement ; que par un courrier en date du 1er octobre 2014, M. A...a formé un recours gracieux contre cet arrêté, rejeté par la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche le 13 octobre 2014 ; que par un jugement du 15 juillet 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté, en estimant qu'il n'était pas établi que le recteur aurait examiné la possibilité, pour M.A..., de bénéficier d'une seconde année de stage et en en déduisant que cette autorité avait entaché sa décision " d'incompétence négative " ; qu'il a enjoint à la ministre de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de trois mois ; que la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche fait appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 24 du décret du 4 juillet 1972 susvisé : " Les candidats reçus aux concours prévus aux articles 6 et 11 ou ayant bénéficié d'une dispense en application du premier alinéa de l'article 23, et remplissant les conditions de nomination dans le corps, sont nommés fonctionnaires stagiaires et affectés pour la durée du stage dans une académie par le ministre chargé de l'éducation. Le stage a une durée d'un an. Ses prolongations éventuelles sont prononcées par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle il est accompli. Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation dispensée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, sous la forme d'actions organisées à l'université, d'un tutorat, ainsi que le cas échéant d'autres types d'actions d'accompagnement. Les modalités du stage et les conditions de son évaluation par un jury sont arrêtées par le ministre chargé de l'éducation. " ; qu'aux termes de l'article 26 de ce décret : " A l'issue du stage, la titularisation est prononcée par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage est accompli, sur proposition du jury mentionné à l'article 24. La titularisation confère le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré ou le certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement technique. / Les stagiaires qui n'ont pas été titularisés peuvent être autorisés par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle ils ont accompli leur stage à effectuer une seconde année de stage ; celle-ci n'est pas prise en compte dans l'ancienneté d'échelon. A l'issue de cette année, ils sont titularisés dans les conditions fixées au premier alinéa. / Les stagiaires qui n'ont pas été autorisés à accomplir une seconde année de stage ou qui, à l'issue de la seconde année de stage, n'ont pas été titularisés sont soit licenciés, soit réintégrés dans leur corps ou cadre d'emplois d'origine s'ils avaient la qualité de fonctionnaire. " ; qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 12 mai 2010 fixant les modalités d'évaluation et de titularisation de certains personnels stagiaires de l'enseignement du second degré relevant du ministre chargé de l'éducation, applicable à la situation du requérant : " Un jury académique nommé par le recteur est constitué par corps d'accès. " ; qu'aux termes de l'article 3 de cet arrêté : " le jury se prononce sur le fondement du référentiel de compétences prévu par l'arrêté du 12 mai 2010 susvisé, après avoir pris connaissance : 1° De l'avis d'un membre des corps d'inspection de la discipline désigné à cet effet, établi après consultation du rapport du tuteur auprès duquel le fonctionnaire stagiaire a effectué son stage. L'avis peut également résulter, notamment à la demande du tuteur ou du chef d'établissement, d'un rapport d'inspection ; 2° De l'avis du chef de l'établissement dans lequel le fonctionnaire stagiaire a été affecté pour effectuer son stage. " ; qu'aux termes de l'article 5 de cet arrêté : " Après délibération, le jury établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés. En outre, lorsqu'il s'agit d'un stagiaire qui effectue une première année de stage, l'avis défavorable à la titularisation doit être complété par un avis sur l'intérêt au regard de l'aptitude professionnelle d'autoriser le stagiaire à effectuer une seconde et dernière année de stage./ Le jury entend au cours d'un entretien tous les fonctionnaires stagiaires pour lesquels il envisage de ne pas proposer la titularisation./ Les stagiaires qui n'ont pas été jugés aptes à être titularisés à l'issue de la première année de stage et qui accomplissent une deuxième année de stage subissent obligatoirement une inspection. " ; qu'aux termes de l'article 6 de cet arrêté : " Le recteur prononce la titularisation des stagiaires estimés aptes par le jury et arrête par ailleurs la liste de ceux qui sont autorisés à accomplir une seconde année de stage. /Les stagiaires qui n'ont été ni titularisés ni autorisés à accomplir une seconde année de stage sont, selon le cas, licenciés ou réintégrés dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jury académique s'est prononcé, le 1er juillet 2014, en faveur d'un " refus de titularisation définitif " ; que dans sa délibération, produite en première instance par l'administration, il a, d'une part, estimé que M. A...ne pouvait être proposé à la titularisation, et, d'autre part, rendu un avis défavorable à ce que celui-ci soit autorisé à bénéficier d'une seconde année de stage ; qu'en transmettant le dossier de M. A... au ministre, seule autorité compétente pour prononcer le licenciement d'un stagiaire, et en ne l'inscrivant pas sur la liste des stagiaires autorisés à accomplir une seconde année de stage, le recteur de l'académie de Paris a nécessairement refusé d'accorder à l'intéressé le bénéfice d'une nouvelle année de stage ; que les dispositions précitées du décret du 4 juillet 1972 et de l'arrêté du 12 mai 2010 n'imposaient pas au recteur de notifier ce refus, par un document formalisé, à M.A... ; que ce refus n'entrait d'ailleurs dans aucune des catégories de décisions individuelles soumises, en vertu de la loi du 11 juillet 1979 alors en vigueur, à une obligation de motivation ; que, dans ces conditions, la ministre est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif, pour annuler l'arrêté de licenciement, s'est fondé sur l'" incompétence négative " qui entacherait la décision du recteur refusant d'autoriser M. A...à effectuer une deuxième année de stage ;

4. Considérant, toutefois, qu'il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...en première instance ;

5. Considérant, en premier lieu, que si M. A...soutient que l'avis du directeur de l'école supérieure du professorat et de l'éducation responsable de sa formation n'a pas été communiqué au jury académique, en méconnaissance du 3° du I de l'article 5 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré, ces dispositions n'étaient pas applicables en l'espèce, l'article 15 de cet arrêté disposant qu'elles ne s'appliquent qu'à compter de la rentrée scolaire de septembre 2014 ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition réglementaire ne faisait obstacle à ce que l'inspection effectuée le 9 avril 2014 soit effectuée dans une classe post-baccalauréat ; que cette inspection ne s'est pas, dès lors, déroulée dans des conditions irrégulières ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées que le jury académique se prononce à l'issue d'une période de formation et de stage ; que, s'agissant non d'un concours ou d'un examen, mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation peut être censurée par le juge de l'excès de pouvoir en cas d'erreur manifeste ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'inspectrice ayant effectué l'inspection de M.A..., le 9 avril 2014 et le proviseur du lycée Pierre Gilles de Gennes ont tous deux rendu un avis défavorable à la titularisation ; qu'ils ont relevé notamment des lacunes importantes en matière de préparation des cours, d'autorité et de sécurité des élèves ; que le professeur conseiller pédagogique tuteur a estimé également que "... ses difficultés sont toujours multiples et très nombreuses, aucune évolution n'a été notée sur l'année... " ; que le " bilan de compétences acquises ", préalable à la titularisation, fait apparaître une maîtrise insuffisante de quatre compétences parmi les dix exigées ; que le requérant ne peut utilement se prévaloir des évaluations plus favorables dont il a bénéficié, au cours des années antérieures, en tant qu'agent contractuel ; que, dans ces conditions, le jury académique n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en émettant , compte tenu de l'ensemble des éléments du dossier de l'intéressé et des aptitudes de celui-ci, un avis défavorable à sa titularisation ; que le recteur ne pouvait, en l'absence de proposition en ce sens du jury académique, décider de titulariser M. A... ;

8. Considérant, enfin, que si l'inspectrice pédagogique, dans son rapport d'inspection du 9 avril 2014, a estimé qu'une seconde année de stage pourrait être envisagée, le jury académique et le recteur n'étaient pas tenus par cet avis ; que le recteur n'a pas commis d'erreur d'appréciation en décidant, au vu de l'ensemble du dossier de M.A..., de ne pas lui accorder le bénéfice d'une seconde année de stage ; que dans ces conditions, la ministre de l'éducation ne pouvait dés lors que le licencier ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la ministre est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé son arrêté du 29 août 2014 procédant au licenciement de M.A... ; que les conclusions à fins d'injonction présentées par M.A..., ainsi que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du 15 juillet 2015 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et à M. C...A....

Délibéré après l'audience du 2 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 mai 2017.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA03616


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03616
Date de la décision : 16/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Nominations. Titularisation.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI-MOLINA

Origine de la décision
Date de l'import : 30/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-05-16;15pa03616 ?
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