Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision de la ministre de la culture et de la communication en date du 7 juillet 2014 refusant sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge de 65 ans, ensemble l'arrêté du 21 janvier 2014 prononçant sa radiation des cadres, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral causé par ces décisions, enfin de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1417110/5-3 du 9 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé les décisions susvisées des 7 juillet 2014 et 21 janvier 2014 et a rejeté le surplus de la demande de M. A....
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 10 février 2016, la ministre de la culture et de la communication demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1417110/5-3 du 9 décembre 2015 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de M. A... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier du fait de l'insuffisance de sa motivation ;
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle avait commis une erreur manifeste d'appréciation, eu égard à l'intérêt du service, en refusant la demande de prolongation d'activité de M. A....
Par des mémoires en défense, enregistrés les 6 avril 2016 et 15 septembre 2016 et un mémoire de production, enregistré le 29 novembre 2016, M. A..., représenté par MeC..., conclut au rejet du recours et demande, en outre, qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par la ministre de la culture et de la communication ne sont pas fondés ;
- outre l'erreur manifeste d'appréciation retenue à juste titre par les premiers juges, la décision du 7 juillet 2014 est entachée d'insuffisance de motivation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;
- la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pagès,
- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public.
1. Considérant que M. A..., ingénieur d'étude hors classe au musée du Louvre, a sollicité, le 12 juin 2013, le bénéfice d'une prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge de 65 ans ; que, par une décision du 24 décembre 2013, la " cheffe du service des ressources humaines " du ministère de la culture et de la communication a rejeté, sur le fondement de l'article 69 de la loi du 21 août 2003, sa demande au motif qu'une telle prolongation, subordonnée à l'intérêt de l'établissement, n'était pas justifiée par l'évolution de l'organisation du département des antiquités égyptiennes qui ne prévoyait pas de poursuivre les missions confiées à M. A... au-delà de son départ à la retraite, mais a cependant émis un avis favorable à son maintien en activité jusqu'au 30 juin 2014 afin de lui permettre de préparer son départ à la retraite ; que, par arrêté du 21 janvier 2014, la ministre de la culture et de la communication a prononcé la radiation des cadres de M. A... à compter du 22 janvier 2014, avec autorisation de poursuivre son activité jusqu'au 30 juin 2014 ; qu'après avoir, le 30 janvier 2014, adressé un premier recours auprès du président-directeur du musée du Louvre, M. A... a par courrier du 12 mars 2014, exercé auprès de la ministre de la culture et de la communication, un recours gracieux contre la décision du 24 décembre 2013 ; que, par décision du 7 juillet 2014, ladite " cheffe du service des ressources humaines " du ministère de la culture et de la communication a réitéré son refus ; que M. A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler les décisions susvisées des 21 janvier 2014 et 7 juillet 2014, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros en réparation du préjudice moral causé par ces décisions, enfin de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par un jugement du 9 décembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a annulé les décisions susvisées des
7 juillet 2014 et 21 janvier 2014 et a rejeté le surplus de la demande de M. A... ; que la ministre de la culture et de la communication relève régulièrement appel dudit jugement en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de M. A... ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que les premiers juges ont explicité de façon circonstanciée les motifs pour lesquels ils ont retenu le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ; qu'ils n'étaient nullement tenus de se prononcer sur la poursuite bénévole de l'activité de M. A... qui n'était pas un moyen en défense de l'administration, mais un argument en défense ; que la critique relative à la nature des pièces produites par M. A... ne relève pas de la insuffisance de la motivation du jugement au sens de l'office du juge administratif, mais de sa pertinence sur le fond du litige et du droit applicable ; qu'enfin la ministre n'est pas fondée à soutenir qu'à plusieurs reprises, les premiers juges auraient constaté qu'ils manquaient d'éléments pour trancher le litige dans la mesure où les passages incriminés du jugement se bornent à souligner que face aux éléments avancés par M. A... pour solliciter une prolongation d'activité, les motifs de l'administration sont dénués de précisions ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué ne peut donc qu'être écarté ;
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Les fonctionnaires ne peuvent être maintenus en activité au-delà de la limite d'âge de leur emploi sous réserve des exceptions prévues par les textes en vigueur " ; qu'aux termes de l'article 1.1 de la loi du 13 septembre 1984 susvisée : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le maintien en activité du fonctionnaire au-delà de la limite d'âge du corps auquel il appartient, sur le fondement de ces dispositions, ne constitue pas un droit, mais une simple faculté laissée à l'appréciation de l'autorité administrative, qui détermine sa position en fonction de l'intérêt du service, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qui exerce sur ce point un contrôle de l'erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant que pour refuser de faire droit à la demande de prolongation d'activité présentée par M. A..., la " cheffe du service des ressources humaines du ministère de la culture et de la communication " s'est fondée sur les avis des autorités hiérarchiques de ce dernier, desquels il ressortait, sans plus de précision, que la réorganisation du département des antiquités égyptiennes ne justifiait pas la poursuite de l'activité de M. A..., quand bien même ses missions resteraient inachevées après son départ ; que l'évolution de l'organisation du département des antiquités égyptiennes alléguée n'est pas établie par l'administration qui se borne à faire état d'une réorganisation du service sans plus d'indications sur la nature de
celle-ci ; que ladite réorganisation n'est justifiée par aucune pièce du dossier, le courrier du 28 janvier 2014 du président-directeur du musée du Louvre relatif aux arbitrages des emplois pour l'année 2014 ne pouvant en constituer la preuve, contrairement à ce que soutient la ministre ; qu'en effet si ce courrier mentionne dans son point I " Arbitrage 2014 des emplois permanents à temps complet sous plafond " la suppression du poste occupé par M. A..., il ne contient aucune indication précise sur la réorganisation alléguée, alors d'ailleurs que le nombre de postes sous plafond enregistre le gain net d'un poste ; qu'en tout état de cause, dans le présent recours, la ministre se prévaut du fait que M. A... aurait continué ses travaux " à titre bénévole " sans que rien ne lui soit demandé, que " c'est donc à la demande de M. A... que ce dossier n'a pas été transféré à un autre agent en activité pour lui permettre de continuer ses travaux ", en ajoutant " Il est donc fréquent que des chercheurs poursuivent leurs travaux à titre personnel après leur départ à la retraite mais que la publication soit assurée par le musée ainsi que la réalisation des photographies et des dessins. C'est pourquoi la publication de M. A... sur le thème des " serviteurs funéraires privés du Moyen et du Nouvel Empire de l'Ancienne Egypte au Louvre était inscrite dans la liste des publications du département " ; que si la fin des travaux de M. A... n'avait plus eu d'utilité pour le Musée du Louvre, il appartenait à ce dernier de refuser la publication envisagée ; que, faute de l'avoir fait, non seulement la réorganisation du service n'apparaît pas établie, mais, bien au contraire, la justification du maintien en activité de M. A... doit être regardée elle-même comme établie ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé que la décision du 7 juillet 2014 était entachée d'erreur manifeste d'appréciation et ont, pour ce motif, annulé ladite décision, ainsi que, par voie de conséquence, l'arrêté de radiation des cadres de M. A... ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la ministre de la culture et de la communication n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de M. A... en annulant les décisions susvisées ;
Sur les conclusions à fin d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours de la ministre de la culture et de la communication est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la culture et de la communication et à M. B... A....
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. Krulic, président de chambre,
M. Auvray, président-assesseur,
M. Pagès, premier conseiller,
Lu en audience publique le 30 décembre 2016.
Le rapporteur,
D. PAGES
Le président,
J. KRULIC
Le greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne à la ministre de la culture et de la communication en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16PA00601