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14/04/2015 | FRANCE | N°14PA03239

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 14 avril 2015, 14PA03239


Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2014, présentée pour Mme C...D..., demeurant au..., par Me A... ; Mme D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305138/1-3 du 23 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a assujettie au titre des années 2006 à 2008 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre

à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'ar...

Vu la requête, enregistrée le 22 juillet 2014, présentée pour Mme C...D..., demeurant au..., par Me A... ; Mme D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1305138/1-3 du 23 mai 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a assujettie au titre des années 2006 à 2008 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la procédure est irrégulière dès lors qu'en méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales elle n'a pu bénéficier d'un délai suffisant lui permettant de se faire assister par un conseil ;

- les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ont été méconnues dès lors que l'examen de sa situation fiscale a excédé la durée d'un an pour les rehaussements notifiés au titre des années 2007 et 2008 ;

- c'est à tort que l'administration a mis en oeuvre la procédure prévue par les dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; c'est à tort que le service a procédé à une taxation d'office de ses revenus sur le fondement des dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ;

- l'administration a entaché la procédure d'imposition d'irrégularité en ne produisant pas après les dégrèvements partiels qu'elle a effectués un tableau des pénalités et droits restant en litige ;

- l'imposition est mal fondée dès lors que les sommes imposées en tant que revenus d'origine indéterminée correspondent pour partie au remboursement d'un prêt et d'avances consentis au bénéfice de son ex concubin, à des gains de jeux et enfin au remboursement par la société Wind 59 d'un prêt qu'elle lui avait consenti ;

- la majoration prévue pas les dispositions de l'article 1758 A du code général des impôts n'est pas justifiée dès lors qu'elle a souscrit chaque année une déclaration ; que les intérêts de retard ne sont pas dus dès lors que l'imposition n'est pas due ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 décembre 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'aucun des moyens de la requérante n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mars 2015 :

- le rapport de Mme Amat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. (...) L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil. " ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme D...a reçu le 24 mars 2009 l'avis de vérification relatif aux années 2006 et 2007 et que son premier entretien avec le vérificateur s'est déroulé le 15 mai 2009 ; que le 29 juin 2009, la requérante a réceptionné l'avis de vérification pour l'année 2008 tandis que le premier entretien a eu lieu le 27 juillet 2009 ; qu'ainsi Mme D...a bénéficié pour chacune des années en litige d'un délai suffisant pour se faire assister d'un conseil de son choix ; que la circonstance que l'administration ait exercé le

25 mars 2009 le droit de communication prévu par l'article L. 101 du livre des procédures fiscales est sans influence sur la régularité de la procédure au regard des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales dès lors que ce droit de communication n'avait en tout état de cause pas pour objet de vérifier la cohérence entre les revenus de Mme D...et son patrimoine, son train de vie ou sa trésorerie ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. (...) Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger.(...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, pour l'année 2007, l'administration, après la réception par la requérante le 24 mars 2009 de l'avis de vérification, a mis en demeure le 15 février 2010 Mme D...sur le fondement des dispositions des articles L. 16 et L. 16 A de fournir des justifications et éclaircissements ; que, par suite, la proposition de rectification du 13 avril 2010 a été adressée dans le délai d'un an augmenté de 30 jours prévu par les dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; que, d'autre part, s'agissant des revenus de l'année 2008, Mme D...a accusé réception de l'avis de réception le 29 juin 2009 ainsi qu'il a été dit au point 2 ; que l'administration lui a ensuite envoyé une mise en demeure le 20 mai 2010, laquelle a eu pour effet de proroger de 30 jours le délai d'un an prévu par les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ; que, faute pour la requérante d'avoir produit dans un délai de 60 jours à compter du 20 mai 2010 ses relevés de compte, le délai a été prorogé du délai nécessaire à l'administration après le délai de 60 jours pour se procurer lesdits relevés de compte ; qu'il s'ensuit que les délais prévus par les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales n'étaient pas expirés le 28 juillet 2010, date d'envoi de la seconde proposition de rectification ; qu'il suit de là que la requérante n'est pas fondée à soutenir que les délais prévus par les dispositions précitées de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales n'ont pas été respectés ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions combinées des articles

L. 16, L. 16 A et L. 69 du livre des procédures fiscales, lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qui font l'objet de sa déclaration, l'administration peut lui demander des justifications et si, le contribuable s'est abstenu de répondre ou a insuffisamment répondu aux demandes de justifications, taxer d'office à l'impôt sur le revenu l'intéressé ;

6. Considérant qu'à la suite de l'examen de la situation fiscale personnelle de

Mme D...le vérificateur, estimant que des discordances importantes avaient été relevées entre le montant des revenus déclarés par l'intéressée au titre des années en litige et le montant des sommes portées au crédit de son compte bancaire - sans même prendre en compte les crédits portés au compte bancaire de son père décédé sur lequel elle détenait une procuration et après neutralisation des virements des compte à compte - lui a demandé des justifications sur l'origine de ces sommes ; qu'en réponse, Mme D...s'est bornée à soutenir que ces crédits provenaient de remboursements de prêts ou de gains de jeux en Grèce sans pour autant fournir de justificatifs crédibles, la simple production de tickets à un jeu de hasard à l'étranger ne constituant pas un justificatif de gains éventuels, au soutien de ces allégations ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a mis en oeuvre la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'aucune disposition légale ou réglementaire ne faisait obligation à l'administration d'adresser à Mme D...à la suite du dégrèvement d'imposition prononcé postérieurement à la réclamation préalable de celle-ci de nouvelles conséquences financières ;

Sur le bien fondé des impositions :

8. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 193 et R. 193-1 du livre des procédures fiscales il incombe à Mme D...d'apporter la preuve de l'exagération des impositions mises à a sa charge à la suite de la procédure de taxation d'office dont ses revenus ont fait l'objet ;

9. Considérant, en premier lieu, que Mme D...soutient que les sommes de

11 840 euros pour l'année 2006 et 4 850 euros pour l'année 2007 proviennent du remboursement d'un prêt qu'elle avait consenti à M. B...alors qu'elle vivait en concubinage avec celui-ci ; que, toutefois, à défaut de la production d'un contrat de prêt ayant date certaine ou d'éléments permettant d'établir sa relation de concubinage qui aurait pu permettre de présumer cette avance comme constituant un prêt familial, Mme D...n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère exagéré des impositions ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que s'agissant de l'année 2006, Mme D...soutient que les crédits d'un montant de 2 740 euros correspondent à des gains de jeux ; que, toutefois, elle se borne au soutien de cette allégation, comme en première instance, à produire des tickets de loto non nominatifs rédigés en langue grecque insuffisamment probants, comme il a été dit au point 6, alors qu'en outre il n'existe pas de correspondance dans le temps entre les dates de versements bancaires et les dates des gains allégués ; qu'ainsi, elle n'établit pas plus en appel qu'en première instance le caractère non imposable des crédits en litige ;

11. Considérant, en dernier lieu, que Mme D...qui ne produit ni reconnaissance de dette ni de contrat de prêt ayant date certaine n'établit pas, par la seule production d'un extrait de comptabilité de la société Wind 59, que les sommes qu'elle a perçues de celle-ci en 2007 et 2008 correspondent au remboursement d'avances qu'elle lui aurait consenties ;

Sur les intérêts de retard et les pénalités :

12. Considérant que Mme D...fait valoir la majoration prévue pas les dispositions de l'article 1758 A du code général des impôts n'est pas justifiée dès lors qu'elle a souscrit pour chaque année une déclaration et que les intérêts de retard ne sont pas dus dès lors que les impositions supplémentaires mises à sa charge ne sont pas fondées ; que, toutefois,

Mme D...n'apporte sur ces points aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le Tribunal administratif de Paris sur son argumentation de première instance ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter les moyens qu'elle soulève par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D...et au ministre des finances et comptes publics. Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal de Paris centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 31 mars 2015 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président,

M. Luben, président assesseur,

Mme Amat, premier conseiller,

Lu en audience publique le 14 avril 2015.

Le rapporteur,

N. AMAT

Le président,

J. KRULIC

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA03239


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA03239
Date de la décision : 14/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Taxation d'office. Pour défaut de réponse à une demande de justifications (art. L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales).


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Nathalie AMAT
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : BRUCK

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-04-14;14pa03239 ?
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