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03/03/2015 | FRANCE | N°12PA04701

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 03 mars 2015, 12PA04701


Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2012, présentée pour M. C... A..., demeurant au..., par MeB... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105336/2-2 du 1er octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant d'un avis à tiers détenteur décerné à son encontre le 12 août 2010 par le comptable du service des impôts des entreprises du 16ème arrondissement de Paris Chaillot pour avoir paiement de droits de taxe sur la valeur ajoutée restant dus par la société L

icia, dont il était le dirigeant, au titre de la période de décembre 1995 à ...

Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2012, présentée pour M. C... A..., demeurant au..., par MeB... ; M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105336/2-2 du 1er octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant d'un avis à tiers détenteur décerné à son encontre le 12 août 2010 par le comptable du service des impôts des entreprises du 16ème arrondissement de Paris Chaillot pour avoir paiement de droits de taxe sur la valeur ajoutée restant dus par la société Licia, dont il était le dirigeant, au titre de la période de décembre 1995 à octobre 1996 ;

2°) d'annuler l'avis à tiers détenteur susmentionné et tous actes de poursuite ultérieurs ;

3°) d'ordonner la restitution des sommes prélevées en vertu de ces actes ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais de première instance, une somme de 2 000 euros au titre des frais d'appel ainsi que les dépens ;

Il soutient que :

- aucune mesure de recouvrement interruptive de prescription n'est intervenue dans les quatre années qui ont précédé l'avis à tiers détenteur notifié le 12 août 2010, dès lors que l'administration n'a pas justifié que M. A...avait reçu une notification régulière de l'avis à tiers détenteur du 19 septembre 2007 ;

- le pli recommandé comportant notification de l'avis à tiers détenteur du 19 septembre 2007 n'a pas été retiré par M. A...et les pièces produites par l'administration ne mentionnent pas que celui-ci a été avisé de la présentation de ce pli et de son dépôt à la Poste ;

- la lettre de la Poste du 14 mai 2012 ne peut constituer une preuve que M. A...a été avisé de la mise en instance d'un pli qui lui a été présenté dès lors que ce courrier est en contradiction avec les précédents courriers de la Poste et que celle-ci a reconnu dans un courrier du 4 mai 2012 que " les réclamations ne sont traitées que sur un an " ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2013, présenté par le ministre de l'économie et des finances, qui demande à la Cour de rejeter la requête ;

Il soutient que :

- il ressort tant des mentions portées sur l'avis de réception postal que des énonciations du courrier des services postaux du 11 mars 2011 que M. A...a été avisé de la mise en instance du pli en litige ;

- la lettre par laquelle M. A...a saisi le médiateur du ministère des finances d'une proposition de transaction doit être regardée comme une reconnaissance de dette répondant aux conditions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales et comme constituant dès lors un acte interruptif de la prescription de recouvrement ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 17 juin 2014, présenté pour M. A...qui conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que :

- dès lors que l'administration ne produit pas l'enveloppe qui lui a été renvoyée par la Poste, elle ne rapporte pas la preuve d'un acte interruptif de prescription régulièrement notifié ;

- l'attestation de la Poste n'a aucune valeur probante compte tenu du caractère non circonstancié et invérifiable des éléments dont elle fait état ;

- en ce qui concerne la saisine du médiateur, dès lors que, ne s'agissant pas d'une procédure judiciaire, ni d'une procédure de redressement fiscal, l'avocat n'a pas joint un mandat, ce document ne peut valoir acte interruptif de prescription ;

- en tout état de cause, ce courrier, qui constitue une proposition de paiement et non une reconnaissance de dette, ne fait état d'une proposition de paiement qu'à concurrence de 60 000 euros et non pour le montant de 226 779,83 euros ;

Vu le nouveau mémoire enregistré le 15 octobre 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui confirme ses précédentes écritures ;

Il soutient en outre que :

- ayant produit la copie de l'enveloppe retournée au service ainsi qu'une attestation de l'administration postale, il justifie la notification régulière du pli en litige ;

- sous réserve des dispositions législatives et réglementaires excluant l'application d'un tel principe, les avocats ont qualité pour représenter leurs clients devant l'administration fiscale sans avoir à justifier du mandat qu'ils sont réputés avoir reçu de ces derniers dès lors qu'ils déclarent agir pour leur compte ;

- M. A...ayant reconnu, lors de sa saisine du médiateur du 24 septembre 2007, devoir la somme de 232 340,91 euros, même s'il a déclaré ne pas être en mesure de pourvoir à son règlement en totalité, cette situation ne peut limiter la portée de son courrier à une proposition de paiement ;

Vu l'ordonnance en date du 20 octobre 2014 fixant la clôture d'instruction au

10 novembre 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'arrêté du 7 février 2007 pris en application de l'article R. 2-1 du code des postes et des communications électroniques et fixant les modalités relatives au dépôt et à la distribution des envois postaux ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2015 :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que M. A..., relève régulièrement appel du jugement n°1105336/2-2 du 1er octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant d'un avis à tiers détenteur décerné à son encontre le 12 août 2010 par le comptable du service des impôts des entreprises du 16ème arrondissement de Paris Chaillot pour avoir paiement de droits de taxe sur la valeur ajoutée restant dus par la société Licia, dont il était le dirigeant, au titre de la période de décembre 1995 à octobre 1996 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription " ;

3. Considérant que M. A...soutient que la prescription de l'action en recouvrement lui était acquise lorsqu'il a reçu l'avis à tiers détenteur émis le 12 août 2010 au motif que l'avis à tiers détenteur du 19 septembre 2007 ne lui a pas été régulièrement notifié en dépit de l'attestation des services de la poste produite par l'administration fiscale dont il conteste la valeur probante et que le comptable public n'a diligenté aucun autre acte interruptif entre la saisie-vente du 5 février 2004 et l'avis à tiers détenteur du 21 septembre 2009 ;

4. Considérant qu'il résulte de la réglementation postale, et notamment de l'article 5 de l'arrêté du 7 février 2007 susvisé ainsi que des conditions générales de vente auxquelles cet article se réfère, qu'en cas d'absence du destinataire à l'adresse indiquée par l'expéditeur lors du passage de l'employé chargé de la distribution, le prestataire informe le destinataire que l'envoi postal est mis en instance pendant un délai de quinze jours à compter du lendemain de la présentation de l'envoi postal à son domicile ainsi que du lieu où cet envoi peut être retiré ; qu'à cet effet le préposé à la distribution laisse un avis de passage mentionnant le lieu où le pli peut être retiré ;

5. Considérant qu'il incombe à l'administration d'établir la date à laquelle un acte susceptible d'interrompre la prescription de l'action en recouvrement a été régulièrement notifié au contribuable ; qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant un tel acte, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le pli recommandé n° 1A 00368823105 contenant la notification de l'avis à tiers détenteur du 19 septembre 2007 envoyé à la banque Palatine a été présenté au domicile de M. A...le 24 septembre 2007 et retourné au service le

10 octobre suivant, soit au terme du délai de mise en instance, revêtu de la mention " non réclamé " ; que, toutefois, ne figurent sur le pli recommandé qui a été retourné au service et auquel est rattaché un volet " avis de réception " où a été apposée par voie de duplication la date de vaine présentation du courrier, ni la mention selon laquelle M. A...a été avisé de la mise en instance du pli au bureau de poste, ni le motif pour lequel il n'a pu être remis ; que l'attestation établie le 11 mars 2011 par les services postaux de Neuilly situés 149 boulevard Bineau à Neuilly, à la demande de l'administration, confirme que le pli en litige a été présenté et son destinataire avisé le 24 septembre, puis mis en instance au bureau de poste Saint James et qu'il a été retourné " non réclamé " le 10 octobre suivant après les quinze jours de mise en instance ; qu'à la demande de l'administration fiscale, les services de la Poste ont précisé à celle-ci par lettre du 4 mai 2012 que la lettre recommandée n° 1A 00368823105 a été présentée et son destinataire avisé le 24 septembre 2010 et qu'elle a été retournée " non réclamée " le 10 octobre 2010 ; que compte tenu, d'une part de la date tardive à laquelle cette attestation a été établie, soit plus de trois ans après l'envoi du pli en cause alors qu'il ressort de la lettre adressée par les services postaux à l'avocat de M. A...le 4 mai 2012 en réponse à sa demande de renseignement que " les réclamations ne sont traitées que sur un an ", d'autre part des circonstances que ladite attestation n'est accompagnée d'aucun autre élément de nature à justifier que M. A...a bien été avisé le 24 septembre 2007 de la mise en instance de ce pli et que les services de la poste ont complété cette attestation en 2012 en se méprenant sur l'année, l'attestation dont s'agit est dépourvue de valeur probante ; qu'il suit de là que l'avis à tiers détenteur ne peut être regardé comme ayant été valablement notifié et qu'il n'a pas eu pour effet d'interrompre le cours de la prescription ;

7. Considérant, toutefois, que l'administration fiscale soutient que M.A..., en s'adressant au médiateur du ministère de l'économie et des finances le 24 septembre 2007, a reconnu sa dette et que cette démarche constitue un acte interruptif de prescription ;

8. Considérant que pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable, la reconnaissance de dette interruptive de prescription ne peut résulter que d'un acte ou d'une démarche par lesquels le redevable se réfère clairement à une créance définie par sa nature, son montant et l'identité du créancier ; qu'il résulte de l'instruction que M. A... a, par l'intermédiaire de son avocat, proposé au médiateur par lettre du 24 septembre 2007 de s'acquitter d'une somme de

60 000 euros et demandé le dégrèvement du surplus ; que l'intéressé a joint à cette lettre la copie des trois mises en demeure du 27 août 2007 n° RA219462314 d'un montant de 133 225,80 euros, n° RA219462328 d'un montant de 56 688,62 euros et n° RA219462291 d'un montant de 42 023,19 euros expressément visées dans la notification de l'avis à tiers détenteur en litige du 19 septembre 2007 pour leur montant total de 231 937,61 euros ; que M. A...a ainsi expressément reconnu l'exigibilité de sa dette à l'égard de l'administration fiscale pour le montant précité correspondant à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée précisés dans chacune des mises en demeure susmentionnées sans que l'intéressé puisse utilement faire valoir que son avocat n'avait pas joint de mandat, dès lors que celui-ci a déclaré agir pour le compte de son client et que la demande de dégrèvement du surplus vaut reconnaissance de dette expresse ; qu'il suit de là que la lettre du 24 septembre 2007 a eu pour effet d'interrompre le cours de la prescription et que le nouveau délai de quatre ans ouvert au comptable qui en est résulté n'était pas expiré à la date de délivrance de l'avis à tiers détenteur contesté du 12 août 2010 ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que les conclusions de sa requête tendant à l'annulation dudit jugement et à la décharge de l'obligation de payer litigieuse ne peuvent, par suite, qu'être rejetées de même que celles à fin d'injonction ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens de même, en l'absence de toute circonstance justifiant qu'il en soit jugé autrement, que celles présentées sur le fondement de l'article R. 761-1 dudit code ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre des finances et des comptes publics. Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (Pôle fiscal de Paris centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 3 février 2015 à laquelle siégeaient :

M. Luben, président,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

M. Pagès, premier conseiller,

Lu en audience publique le 3 mars 2015.

Le rapporteur,

A. MIELNIK-MEDDAH

Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice, à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12PA04701


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA04701
Date de la décision : 03/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-05-01-005 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement. Action en recouvrement. Prescription.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : SCP LE SERGENT-ROUMIER-FAURE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-03-03;12pa04701 ?
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