Vu la requête, enregistrée le 14 juillet 2012, présentée pour la société Valnext, dont le siège est 44 rue Sarette à Paris (75014) par la SCPA..., A...-Bitton etA... ; la société Valnext demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°1000851/3-1 du 15 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Autorité des marchés financiers à lui verser la somme de 162 991,20 euros en réparation des préjudices subis du fait de l'exécution d'un marché conclu le 2 janvier 2009 et relatif au " contrôle des données aberrantes dans des fichiers de transactions " ;
2°) de condamner l'Autorité des marchés financiers à lui verser la somme de
168 516,40 euros, augmentée des intérêts au taux légal, ou, subsidiairement, d'ordonner une expertise ;
3°) de mettre à la charge de l'Autorité des marchés financiers la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 avril 2014 :
- le rapport de Mme Petit, premier conseiller,
- les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public,
- les observations de MeA..., pour la société Valnext,
- et les observations de MeB..., pour l'autorité des marchés financiers ;
1. Considérant que, par un marché à prix forfaitaire conclu le 2 janvier 2009 en application de l'ordonnance du 6 juin 2005, l'Autorité des marchés financiers a confié à la société Valnext la réalisation d'une mission de " contrôle des données aberrantes dans des fichiers de transactions ", destinée à dégager une méthodologie permettant de déceler des comportements frauduleux sur les marchés financiers ; que la durée d'exécution prévue par les documents contractuels était d'un mois ; qu'en mai 2009, la société Valnext a adressé à l'Autorité des marchés financiers trois factures, l'une de 31 520 euros hors taxe correspondant au solde du marché, la deuxième d'un montant de 40 000 euros hors taxe correspondant au " montant contractuel sur dépassement " et une dernière de 53 700 euros hors taxe correspondant à un " complément de mission " ; que seule la première de ces factures a été réglée par l'Autorité des marchés financiers ; que, par un jugement du 15 mai 2012, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Valnext tendant à la condamnation de l'Autorité des marchés financiers à lui payer la somme de 162 991,20 euros au titre des préjudices correspondant, d'une part, à l'absence de règlement des deux factures " montant contractuel sur dépassement " et " complément de mission ", d'autre part, au coût des prestations réalisées entre le 15 avril 2009 et le 20 mai 2009 ; que la société requérante fait appel de ce jugement ;
Sur les conclusions tendant au paiement de prestations réalisées entre le 15 avril 2009 et le 20 mai 2009 :
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Valnext n'a sollicité le paiement des prestations réalisées postérieurement à la date du 15 avril 2009 que devant le tribunal administratif ; que l'Autorité des marchés financiers a, en premier instance, opposé une fin de non-recevoir tirée de l'absence de liaison du contentieux et n'a défendu sur le fond qu'à titre subsidiaire ; que, dans ces conditions, ces conclusions sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions relatives à la facture " montant contractuel sur dépassement " :
3. Considérant que, selon l'article 21 du cahier des charges du marché, la société Valnext avait pour mission, d'une part, d'analyser deux fichiers fournis par l'Autorité des marchés financiers, l'un composé de 300 transactions obligataires et l'autre de 500 lignes obligataires et de mettre en place une méthode de validation et de détection des prix et des valorisations aberrantes et, d'autre part, de restituer le résultat de cette analyse dans un rapport détaillé ; que, par courriel du 14 janvier 2009, l'Autorité des marchés financiers a demandé à la société de procéder elle-même à la sélection d'un certain nombre de transactions destinées à être analysées, en lui transmettant un fichier général comportant des données concernant 57 238 transactions, portant sur 2288 titres ; qu'il est constant que l'Autorité des marchés financiers n'a pas imposé que le nombre de données utilisées pour l'étude soit supérieur à ce qui était prévu initialement par les documents contractuels, le nombre de données finalement retenues par la société s'étant, d'ailleurs, élevé à seulement 754 ; que, toutefois, d'une part, ce travail de sélection préalable des données devant être analysées a nécessairement augmenté la charge de travail de la société Valnext ; que, d'autre part, l'absence d'opposition formelle de celle-ci à cette modification de la méthode initialement retenue par le marché ne peut être regardée, à elle seule, comme signifiant que ce marché aurait été modifié, même sans avenant explicite, d'un commun accord entre les parties ; que, dans ces conditions, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, la requérante est fondée à demander l'indemnisation des conséquences de la modification unilatérale des clauses du marché ; que l'Autorité des marchés financiers ne peut utilement se prévaloir de ce que le dirigeant de la société s'était engagé, sous certaines conditions, à ne pas saisir la juridiction administrative ; qu'il résulte de l'instruction que trois salariés de la société requérante ont réalisé, pendant deux semaines, le travail de présélection des transactions à analyser, en les extrayant du fichier général qui lui avait été transmis ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, de condamner l'Autorité des marchés financiers à verser à la société requérante le montant facturé correspondant à ces prestations, dont le caractère excessif allégué ne résulte pas de l'instruction, soit la somme de 48 318,40 euros ; que la société Valnext est également fondée à demander que cette somme soit majorée des intérêts au taux légal à compter de la date de réception, par l'administration, de cette facture, soit le 22 mai 2009 ;
Sur les conclusions relatives à la facture " complément de mission " :
4. Considérant que la société requérante soutient qu'elle a été contrainte, pour obtenir des résultats fiables, d'éliminer préalablement de nombreuses données erronées en raison d'erreurs de saisies, ces données erronées ne devant pas être confondues avec des transactions " aberrantes " de nature à faire présumer des fraudes ; que, toutefois, et en admettant même que le temps consacré par la société à ce travail d'élimination ait été nécessaire, il résulte de l'instruction que l'existence de données erronées dans les fichiers de l'Autorité des marchés financiers était connue par les parties ; que la société requérante ne peut, dès lors, soutenir qu'elle a été confrontée à des sujétions imprévues lui ouvrant droit à une indemnisation complémentaire, ni que l'Autorité des marchés financiers aurait bénéficié d'un enrichissement sans cause ; que ses conclusions sur ce point ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il y ait lieu de recourir à une expertise ;
Sur les conclusions relatives au paiement d'intérêts moratoires, au titre de la facture réglée par l'Autorité des marchés financiers :
5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante aurait droit, compte tenu, notamment, du retard avec lequel elle a remis son étude, à des intérêts moratoires au titre de la facture réglée par l'Autorité des marchés financiers ; que ses conclusions, qui sont d'ailleurs nouvelles en appel, ne peuvent ainsi qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par l'Autorité des marchés financiers ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Autorité des marchés financiers le versement à la société Valnext d'une somme de 1 500 euros au titre de ces mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'Autorité des marchés financiers est condamnée à payer à la société Valnext la somme de 48 318,40 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2009.
Article 2 : L'Autorité des marchés financiers versera à la société Valnext la somme de
1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête ainsi que les conclusions présentées par l'Autorité des marchés financiers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le jugement n°1000851/3-1 du 15 mai 2012 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
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N° 12PA03061