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24/09/2013 | FRANCE | N°12PA02144

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 24 septembre 2013, 12PA02144


Vu la requête sommaire, enregistrée le 14 mai 2012, et le mémoire ampliatif, enregistré le 13 juin 2012, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1119262/3-3 du Tribunal administratif de Paris en date du 10 avril 2012 qui a annulé son arrêté du 11 juillet 2011 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D...B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administrati

f de Paris ;

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Vu la requête sommaire, enregistrée le 14 mai 2012, et le mémoire ampliatif, enregistré le 13 juin 2012, présentés par le préfet de police ; le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1119262/3-3 du Tribunal administratif de Paris en date du 10 avril 2012 qui a annulé son arrêté du 11 juillet 2011 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D...B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

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Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 septembre 2013 :

- le rapport de M. Pagès, rapporteur,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me Balguy-Gallois, avocat de M.B... ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité thaïlandaise, entré en France le 9 février 2009, a obtenu un titre de séjour " étudiant " renouvelé jusqu'au 28 février 2011 ; qu'il a demandé en janvier 2011 un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui lui a été refusé par arrêté du 15 avril 2011 au motif que s'il avait conclu un pacte civil de solidarité avec un ressortissant de nationalité française, il ne justifiait pas d'une communauté de vie effective, en précisant par ailleurs qu'il pouvait solliciter un titre de séjour étudiant ; que M. B... a en conséquence sollicité un tel titre le 17 mai 2011 ; que, par un arrêté du 11 juillet 2011, le préfet de police a rejeté cette demande de titre de séjour en assortissant sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de destination ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté susvisé et a enjoint au préfet de police de délivrer un titre de séjour à M.B... ; que le préfet de police relève appel dudit jugement ;

Sur les conclusions du préfet de police :

2. Considérant que la demande de titre de séjour de M. B...en date du 3 mai 2011, produite en première instance par le préfet de police, tendait exclusivement à la délivrance d'un titre de séjour " étudiant " ; que l'arrêté attaqué ne mentionne pas le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais uniquement l'article L. 313-7 du même code relatif aux titres de séjour " étudiant " ; que les motifs dudit arrêté relatifs à la vie privée et familiale ne concernent que la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que, dès lors, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il s'est saisi en son arrêté, pour la refuser, d'une demande de titre mention " vie privée et familiale " ; que, par ailleurs, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant ; que, dès lors, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé la décision de refus de séjour prise à l'encontre de M. B...au motif de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. B...tant en première instance que devant la Cour ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté n° 2011-00412 du 8 juin 2011, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 14 juin suivant, le préfet de police a donné à M. C...A..., délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté attaqué n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière, manque en fait ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " (...) Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; que l'arrêté attaqué mentionne en caractères lisibles, outre la signature de son auteur, le nom, le prénom et la fonction de ce dernier, à savoir celle d'adjoint au chef du 6ème bureau ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 précité de la loi du 12 avril 2000 doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant" " ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour en qualité d'étudiant, de rechercher si l'intéressé peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement et sérieusement des études ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si l'intimé a suivi des cours de français et de civilisation française de février 2009 à mars 2011, il a cessé de suivre ces cours à cette date ; que, dès lors, le préfet de police est fondé à estimer que le suivi d'études n'était pas le motif véritable de la demande de titre de séjour de l'intimé et à soutenir que l'intéressé ne peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement et sérieusement des études ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que M. B...a conclu un pacte civil de solidarité (PACS) le 8 janvier 2010 avec un ressortissant français ; que pour établir la réalité de la communauté de vie avec ce ressortissant, outre le PACS, M. B...produit notamment l'avis d'imposition 2011 mentionnant cette situation familiale, des relevés bancaires d'un compte joint, l'avenant au contrat d'assurance-vie souscrit par son partenaire à son bénéfice en date du 1er mars 2011 et l'attestation commune d'assurance multirisque domicile du 31 mars 2011 ; que l'intimé fait également référence à juste titre à la décision de refus d'aide juridictionnelle du 23 septembre 2011 mentionnant l'ensemble des revenus du foyer ; que, toutefois, la réalité de la vie commune n'est attestée par aucun document antérieur au 8 janvier 2010 ; qu'en outre, si l'intimé justifie avoir suivi des cours de français, il ne justifie pas pour autant d'une intégration significative à la société française ; que, dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 312-2 de ce même code : " Le préfet ou, à Paris, le préfet de police saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance. La commission est également saisie dans les cas prévus aux articles L. 313-14 et L. 431-3 " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le préfet de police n'était pas tenu de soumettre le cas de M. B...à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, que la décision portant obligation de quitter le territoire français énonce les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que le moyen tiré du défaut de motivation doit donc être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. B...n'établit pas que la décision de refus de séjour prise à son encontre était illégale ; que, dès lors, l'exception d'illégalité de ladite décision ne peut qu'être rejetée ;

12. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la durée de la vie commune n'est que d'un an et demi à la date de la décision attaquée ; que, dès lors, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant à son encontre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant, en dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. Considérant que, par un arrêté n° 2011-00412 du 8 juin 2011, régulièrement publié au bulletin municipal officiel de la ville de Paris du 14 juin suivant, le préfet de police a donné à M. C...A..., délégation pour signer notamment les décisions de refus de titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté attaqué n'aurait pas été titulaire d'une délégation régulière, manque en fait ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 11 juillet 2011 et lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. B...;

Sur les conclusions de M. B...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1119262/3-3 du Tribunal administratif de Paris en date du 10 avril 2012 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D...B.... Copie en sera adressée au préfet de police.

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N° 12PA02144


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA02144
Date de la décision : 24/09/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : BALGUY-GALLOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-09-24;12pa02144 ?
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