Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2012, présentée pour M. A... C..., demeurant..., par Me B... ; M. C... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1120576/5-2 du 1er mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 19 octobre 2011 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de trente jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du Code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 juillet 2013 :
- le rapport de Mme Renaudin, rapporteur ;
1. Considérant que M. A... C..., de nationalité sri lankaise, entré en France en octobre 1996 selon ses déclarations, a sollicité en novembre 2009 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 19 octobre 2011, après un avis favorable du 29 juin 2010 de la commission du titre de séjour saisie sur la demande de titre de séjour de M. C... par le préfet de police, ce dernier a opposé un refus à sa demande et l'a assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. C... relève appel du jugement du 1er mars 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susmentionné ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 16 juin 2011 : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ; et qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : / 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...) " ;
3. Considérant que M. C... soutient que le préfet n'a pas apprécié le bien-fondé de sa demande de titre de séjour pour motif exceptionnel, en qualité de salarié, alors qu'il disposait d'une promesse d'embauche comme cuisinier, datée de janvier 2010 ; qu'il est constant que le requérant a sollicité en novembre 2009 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si le formulaire de demande, qu'il a rempli avec un accompagnant compte tenu de son absence de maîtrise du français, porte la mention " néant " pour renseigner sa situation professionnelle actuelle, il ressort des pièces du dossier et notamment des pièces qu'il a fournies pour justifier de ses dix années de présence en France et sur le fondement desquelles le préfet de police a, conformément aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées, consulté la commission du titre de séjour, qu'il a justifié par ses bulletins de paie et un contrat de travail d'une activité professionnelle effective depuis le mois d'avril 2010 et jusqu'à la fin de l'année 2011 ; qu'en outre il ressort des mentions de l'avis de la commission du titre de séjour du 29 juin 2010 que M. C...s'est prévalu devant elle de sa promesse d'embauche de janvier 2010 et a déclaré qu'il travaillait comme cuisinier de temps en temps ;
4. Considérant qu'en présence d'une telle demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartenait à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répondait à des considérations humanitaires ou se justifiait au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il était fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, lorsque l'intéressé présente, comme c'est le cas en l'espèce, une promesse d'embauche et des justificatifs de travail, il appartient alors à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande tel que, par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ; qu'il appartient en conséquence au préfet de motiver, conformément aux dispositions de la loi du 11 juillet 1979, tant en droit qu'en fait, un éventuel refus résultant de ce double examen ;
5. Considérant que, pour rejeter la demande de régularisation dont il était saisi, le préfet de police s'est borné à décrire la situation familiale de l'intéressé, à faire état de la durée de sa présence sur le territoire national, et à relever qu'il ne témoignait pas d'une réelle volonté d'intégration dans la société, n'étant pas en mesure de communiquer en français ; que quand bien même la situation professionnelle de M. C... aurait été partielle, le préfet devait apprécier s'il pouvait délivrer à l'intéressé un titre de séjour " salarié " ou " travailleur temporaire " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision est donc entachée d'un défaut d'examen de la situation de l'intéressé et d'une insuffisance de motivation ;
6. Considérant que, par suite, la décision du préfet de police en ce qu'elle refuse d'admettre au séjour M. C... à titre exceptionnel et humanitaire est illégale et doit être annulée ; que les décisions faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de destination, qui sont fondées sur ce refus de titre illégal, doivent en conséquence être également annulées ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 octobre 2011 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " et qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;
9. Considérant que le présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour à M. C... ; que ses conclusions à fins d'injonction présentées en ce sens doivent donc être rejetées ; qu'il y a lieu en revanche de prescrire au préfet de police de délivrer, dans le délai de quinze jours, à M. C..., une autorisation provisoire de séjour ainsi que le prévoit l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 1er mars 2012 du Tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du préfet de police du 19 octobre 2011 refusant de délivrer un titre de séjour à M.C..., l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. C... dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa situation dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. C...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
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N° 10PA03855
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N° 12PA01528