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21/05/2013 | FRANCE | N°12PA03940

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 21 mai 2013, 12PA03940


Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2012, présentée pour la SARL Eugène Varlin Valorisation, dont le siège est au 9 rue Eugène Varlin à Paris (75010), représentée par son gérant en exercice, par la société d'avocats CMS Bureau Francis Lefebvre ; la SARL Eugène Varlin Valorisation demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1122237/1-3 du 20 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée sur la marge au titre des années 2007 et 2008, pour des mon

tants, respectivement, de 152 110 euros et de 40 028 euros ;

2°) de prono...

Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2012, présentée pour la SARL Eugène Varlin Valorisation, dont le siège est au 9 rue Eugène Varlin à Paris (75010), représentée par son gérant en exercice, par la société d'avocats CMS Bureau Francis Lefebvre ; la SARL Eugène Varlin Valorisation demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1122237/1-3 du 20 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée sur la marge au titre des années 2007 et 2008, pour des montants, respectivement, de 152 110 euros et de 40 028 euros ;

2°) de prononcer la restitution de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 avril 2013 :

- le rapport de M. Paris, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant que la SARL Eugène Varlin Valorisation, qui exerce une activité de marchand de biens, a mentionné sur ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2006, 2007 et 2008, de la taxe collectée selon le régime de la marge, à raison des cessions qu'elle avait réalisées au cours de ces années d'immeubles bâtis ; qu'au motif que les dispositions de la loi fiscale sur le fondement desquelles elle avait déclaré ces droits de taxe sur la valeur ajoutée seraient incompatibles avec les objectifs de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, elle a adressé à l'administration fiscale deux réclamations, l'une du 31 décembre 2009, l'autre du 3 juin 2010, tendant à la restitution de la taxe qu'elle avait ainsi déclarée, pour des montants, respectivement, de 80 454 euros, 152 110 euros et 40 028 euros ; que par une décision du 26 octobre 2011, le directeur général des finances publiques a rejeté comme irrecevables les réclamations formulées par la SARL Eugène Varlin en tant que celles-ci portaient sur les années 2006 et 2007 et a partiellement fait droit à ces réclamations au titre de l'année 2008 ; que la SARL Eugène Varlin Valorisation a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée collectée qu'elle avait déclarés au titre de l'année 2007 et du surplus des droits non restitués au titre de l'année 2008 ; qu'elle relève appel du jugement du 20 juillet 2012 par lequel le Tribunal a rejeté cette demande ;

Sur la demande en restitution au titre de l'année 2007 :

En ce qui concerne la recevabilité de la réclamation préalable :

2. Considérant que la SARL Eugène Varlin soutient que, contrairement aux motifs retenus par les premiers juges, les éléments qu'elle produit suffisent à établir que la réclamation préalable qu'elle a formée tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait déclarés au titre de l'année 2007 a été présentée à l'administration dans les délais prévus par les dispositions combinées de l'article L. 286 et du b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial (...) de la direction générale des finances publiques (...) dont dépend le lieu de l'imposition " ; que l'article R. 196-1 du même livre dispose que : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement " ; qu'en application de son article L. 286 : " Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d'une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi " ;

4. Considérant que pour rapporter la preuve qui lui incombe que la réclamation qu'elle a formée tendant à la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle avait mentionnés sur ses déclarations au titre de l'année 2007 a été adressée au service des impôts, dans les conditions prévues par l'article L. 286 du livre des procédures fiscales, avant l'expiration du délai prévu par les dispositions de l'article R. 196-1 de ce livre, soit avant le 31 décembre 2009, la SARL Eugène Varlin Valorisation a produit, devant les premiers juges, d'une part, la copie d'un bordereau de dépôt d'un pli recommandé numéroté 1 A 029 740 1356 7, sur laquelle la date de remise au service postaux ne figure pas de manière lisible, ainsi qu'une attestation faisant état de ce que la date de dépôt du pli comportant ce numéro " est bien le 31 décembre 2009 sur les originaux des preuves de dépôt rendues à l'expéditeur " ;

5. Considérant qu'à supposer même, ainsi que le soutient en défense le ministre de l'économie et des finances et que l'ont estimé les premiers juges, que cette seule attestation ne soit pas suffisante pour justifier que le pli recommandé ait été déposé et traité par les services postaux le 31 décembre 2009, la société requérante produit, devant le juge d'appel, d'une part, une attestation du 4 septembre 2012, établie à l'en-tête du " carré pro de Paris Sentier ", signée et comportant le cachet de la poste, certifiant que " la lettre recommandée 1 A 029 740 1356 7 a bien été traitée par nos soins le 31 décembre 2009 " ; qu'elle produit également, d'autre part, un constat, établi le 5 novembre 2012 par exploit d'huissier, dont les mentions font foi jusqu'à inscription de faux et dont il ressort qu'à la lecture de l'original du bordereau de dépôt, l'officier ministériel a relevé " en transparence, sur le volet de l'envoi du recommandé, sous la case destinataire, la date du 31 décembre 2009/Numéro de l'envoi 1 A 029 740 1356 7 " ; qu'eu égard à leur origine et à leur teneur, la date d'établissement de ces documents n'est pas de nature, dans les circonstances de l'espèce, à remettre en cause leur valeur probante ;

6. Considérant, ainsi, s'agissant de la réclamation formée au titre de l'année 2007, que la SARL Eugène Varlin établit qu'elle a satisfait, dans les conditions prévues par l'article L. 286 du livre des procédures fiscales, à l'obligation de respecter le délai prévu par l'article R. 196-1 du même livre, qui expirait en l'espèce le 31 décembre 2009 à minuit, au moyen d'un envoi postal, cachet de la poste faisant foi ; que, par voie de conséquence, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté comme irrecevable sa demande, en tant que celle-ci portait sur l'année 2007 ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler dans cette mesure le jugement attaqué ;

7. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL Eugène Varlin devant le Tribunal administratif de Paris au titre de l'année 2007 ;

En ce qui concerne la recevabilité de la demande en restitution :

8. Considérant que le ministre de l'économie et des finances fait valoir que la demande en restitution formée par la SARL Eugène Varlin Valorisation, qui porte sur une somme totale de 152 110 euros correspondant aux montants de taxe sur la valeur ajoutée inscrits sur les déclarations qu'elle a déposées au titre de l'année 2007, n'est recevable qu'à concurrence d'une somme de 100 965 euros correspondant aux montants des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a effectivement acquittés ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente affaire : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure (...) " ;

10. Considérant que la demande de la SARL Eugène Varlin Valorisation fondée sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, ne tend ni au remboursement d'un excédent de taxe sur la valeur ajoutée déductible dans les conditions fixées par les articles 242-0 A et suivants de l'annexe II au code général des impôts, ni à l'exercice d'un droit à déduction ; que, par suite, en application des termes mêmes des dispositions de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, cette demande ne peut tendre qu'à la réduction ou à la décharge d'une imposition mise en recouvrement ou effectivement versée ; que, dès lors qu'il résulte des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée versées au dossier qu'en raison du report des excédents de taxe déductible dont elle a été bénéficiaire au titre de l'année 2007, la SARL Eugène Varlin Valorisation ne s'est effectivement acquittée, au cours de cette même année que d'une somme de 100 965 euros, la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'économie et des finances, à concurrence de la différence entre ce montant et ceux réclamés par la société requérante, doit être accueillie ;

11. Considérant que la SARL Eugène Varlin Valorisation ne peut utilement invoquer, pour contester ces motifs, les stipulations du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que le présent litige ne porte, ni sur la contestation de droits et obligations de caractère civil, ni sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale, au sens de ces stipulations ;

En ce qui concerne le bien-fondé de la demande en restitution :

12. Considérant que l'administration fiscale, qui a d'ailleurs fait droit à la demande en restitution présentée par la SARL Eugène Varlin au titre de l'année 2008, fondée sur le même motif que celui invoqué au titre de l'année 2007, ne conteste pas le bien-fondé du moyen invoqué, tiré de la contrariété des dispositions sur le fondement desquelles les droits de taxe sur la valeur ajoutée en litige avaient été versés avec les objectifs de la directive 2006/112/CE ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, d'accorder à la SARL Eugène Varlin la restitution des droits de taxe sur la valeur ajoutée en litige, à concurrence des sommes qu'elle a effectivement versées au titre de l'année 2007, soit 100 965 euros ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Eugène Varlin est fondée à demander la restitution, à concurrence de 100 695 euros, des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittés au titre de l'année 2007 ;

Sur la demande en restitution au titre de l'année 2008 :

14. Considérant qu'à la suite de la réclamation préalable qu'elle a formée au titre de l'année 2008, l'administration fiscale a accordé à la SARL Eugène Varlin la restitution des droits de taxe qu'elle avait effectivement acquittés au titre de cette année, soit une somme de 26 100 euros ; que si la société requérante sollicite la restitution d'une somme complémentaire de 13 928 euros, il résulte de l'instruction, et n'est au demeurant pas contesté, que le surplus dont la restitution est ainsi demandée correspond à des droits de taxe déclarés, mais non effectivement acquittés, compte tenu des crédits de taxe sur la valeur ajoutée déductible reportés par la société ; que, par voie de conséquence, en application des principes rappelés aux points 9 et 10, et ainsi que le soutient en défense le ministre de l'économie et des finances, la demande formée par la SARL Eugène Varlin au titre de l'année 2008 n'est pas recevable ;

15. Considérant, ainsi qu'il a été dit en ce qui concerne l'année 2007, que la SARL Eugène Varlin ne peut utilement invoquer, pour contester ces motifs, les stipulations du premier paragraphe de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que le présent litige ne porte, ni sur la contestation de droits et obligations de caractère civil, ni sur le bien-fondé d'une accusation en matière pénale, au sens de ces stipulations ;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Eugène Varlin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande au titre de l'année 2008 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros que demande la SARL Eugène Varlin Valorisation au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : En tant qu'il a statué sur la demande de la SARL Eugène Varlin Valorisation au titre de l'année 2007, le jugement n° 1122237/1-3 du Tribunal administratif de Paris en date du 20 juillet 2012 est annulé.

Article 2 : L'État restituera à la SARL Eugène Varlin Valorisation la somme de 100 695 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par celle-ci au titre de l'année 2007.

Article 3 : L'État versera à la SARL Eugène Varlin Valorisation la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la demande présentée par la SARL Eugène Varlin Valorisation devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus de ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetés.

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N° 12PA03940


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 12PA03940
Date de la décision : 21/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Timothée PARIS
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : C/M/S/ BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-05-21;12pa03940 ?
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