Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2011, présentée pour Mme Yolaine Pierre-Fanfan, demeurant..., par MeB... ; Mme C...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°0801441/5-1 du Tribunal administratif de Paris en date du 21 octobre 2010 rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 12 novembre 2007 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a prononcé à son encontre la sanction de l'abaissement d'échelon ;
2°) d'annuler cette décision ;
3°) d'enjoindre à l'Etat, sous astreinte de 100 euros par jour de retard pour chacune des diligences demandées et à compter de l'arrêt à intervenir, de la rétablir à l'échelon qui était le sien avant la décision du 12 novembre 2007, de radier la sanction inscrite dans son dossier et, enfin, de reconstituer sa carrière ;
4°) de condamner l'Etat à l'indemniser de son préjudice, par le versement d'une somme de 5 000 euros ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme est des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
Vu le décret n°84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;
Vu le décret n°2003-466 du 30 mai 2003 portant statut particulier des greffiers des services judiciaires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 avril 2013 :
- le rapport de Mme Sirinelli, rapporteur,
- et les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public ;
1. Considérant que Mme Yolaine Pierre-Fanfan, greffière à la Cour d'appel de Paris depuis le 17 avril 2000, a fait l'objet, par arrêté du garde des sceaux en date du 12 novembre 2007, d'une sanction disciplinaire d'abaissement d'échelon ; qu'elle relève appel du jugement du 21 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'indemnisation des préjudices qui en ont résulté ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, que si Mme C...soutient que le jugement attaqué est intervenu sans qu'elle ait été convoquée à l'audience publique tenue devant le tribunal, le 7 octobre 2010, il ressort toutefois des pièces du dossier de première instance que l'avis d'audience, régulièrement adressé à la requérante et présenté le 18 septembre 2010, est revenu à l'expéditeur sans avoir été réclamé ; que ce moyen, qui manque en fait, doit ainsi être écarté ;
3. Considérant, en second lieu, que Mme C...ne peut utilement, dans le cadre de la présente procédure contentieuse, qui concerne la légalité de la décision du 12 novembre 2007, se prévaloir du délai, selon elle déraisonnable, dans lequel le tribunal a statué sur sa demande, présentée devant lui le 25 janvier 2008 ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance du délai raisonnable mentionné à l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme est des libertés fondamentales doit, en tout état de cause, être écarté comme inopérant ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe de la décision contestée :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 octobre 1984 susvisé : " L'organisme siégeant en Conseil de discipline lorsque sa consultation est nécessaire, en application du second alinéa de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983, est saisi par un rapport émanant de l'autorité ayant pouvoir disciplinaire ou d'un chef de service déconcentré ayant reçu délégation de compétence à cet effet.(...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le rapport présenté au conseil de discipline au sujet de Mme C...émanait de la sous-directrice des greffes du ministère de la justice, qui disposait d'un pouvoir disciplinaire sur la requérante ; qu'ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'auteur de ce rapport aurait été, en vertu des dispositions précitées, incompétent ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que Mme C...soutient que la décision en cause est intervenue sans qu'elle ait pu prendre connaissance de son dossier, ni du rapport de saisine du conseil de discipline et, plus largement des griefs qui lui étaient opposés ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier de l'attestation de consultation de dossier personnel signée par l'intéressée, que Mme C...a procédé à cette consultation le 21 août 2007 ; qu'en outre, le procès-verbal d'entretien du 11 mai 2007, également signé par la requérante, indique qu'au cours d'un entretien avec la directrice du greffe adjointe de la Cour d'appel de Paris et en présence du greffier en chef des services civils, Mme C...s'est vu lire le rapport devant être présenté au conseil de discipline, et qu'il lui en a été remis une copie ; qu'ainsi, les moyens tirés sur ce point du manquement au principe du contradictoire et aux droits de la défense manquent en fait ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 4 du décret du 25 octobre 1984 susvisé : " Le fonctionnaire poursuivi est convoqué par le président du conseil de discipline quinze jours au moins avant la date de réunion, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. (...) " ; que si la requérante fait valoir que les convocations devant le conseil de discipline lui ont été remises par voie hiérarchique et non par pli recommandé et qu'elles n'émanaient pas du président du conseil de discipline ainsi que le prévoit les dispositions précitées, ce manquement aux règles formelles, qui n'a privé en pratique l'intéressée d'aucun de ses droits de la défense et n'a pu lui causer aucun préjudice, n'a pas, à le supposer établi, constitué un vice substantiel de nature à porter atteinte à la régularité de la procédure disciplinaire ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que si la requérante soutient qu'elle n'a pas été mise en mesure de présenter d'ultimes observations devant le conseil de discipline, en méconnaissance des dispositions de l'article 5 du décret du 25 octobre 1984 et du principe des droits de la défense, il est constant que MmeC..., régulièrement touchée par la convocation, ne s'est toutefois pas présentée lors de la séance de ce conseil ; qu'ainsi, et comme il l'a été indiqué par les premiers juges, ce moyen doit être écarté ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 du décret susvisé du 25 octobre 1984 : " Dans l'hypothèse où aucune des propositions soumises au conseil de discipline, y compris celle consistant à ne pas prononcer de sanction, n'obtient l'accord de la majorité des membres présents, le conseil est considéré comme ayant été consulté et ne s'étant prononcé en faveur d'aucune de ces propositions. Son président informe alors de cette situation l'autorité ayant pouvoir disciplinaire. Si cette autorité prononce une sanction, elle doit informer le conseil des motifs qui l'ont conduite à prononcer celle-ci. " ; que si Mme C...soutient que le ministre n'a pas, en méconnaissance des dispositions précitées, informé le conseil de discipline des motifs l'ayant conduit, malgré l'absence d'avis formulé à la majorité de ce conseil en faveur de la sanction d'abaissement d'échelon, à prendre la décision contestée, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de cette décision ;
9. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès à la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès, dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice. (...) " ; que, d'une part, le conseil de discipline ne détient aucun pouvoir de décision et a pour seule attribution d'émettre, à l'intention de l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, un avis sur le principe du prononcé d'une sanction et, le cas échéant, sur le quantum de celle-ci ; qu'ainsi, il ne présente pas le caractère d'une juridiction, ni celui d'un tribunal au sens des stipulations précitées de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, la requérante ne peut utilement invoquer la méconnaissance de ces stipulations, au motif notamment que les débats devant ce conseil n'auraient pas été publics ; que, d'autre part, si MmeA..., sous-directrice des greffes du ministère de la justice et auteur du rapport présenté devant ce conseil au sujet de MmeC..., a également présidé la séance du 29 octobre 2007 au cours de laquelle ce conseil a examiné sa situation, cette circonstance n'est pas de nature à avoir vicié la procédure suivie, dès lors qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que Mme A...aurait manifesté un parti pris au préalable contre la requérante ou manifesté une animosité personnelle à son égard ; que, dans ces conditions, la requérante, qui, comme il a été dit, ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, n'est pas fondée à soutenir que la présidence du conseil de discipline par Mme A...aurait entaché d'irrégularité la procédure suivie ;
En ce qui concerne la légalité interne de la décision contestée :
10. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'arrêté contesté que les éléments ayant motivé l'application de la sanction en cause étaient des faits d'insuffisance professionnelle et de non-respect de la hiérarchie ; qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des nombreux courriers, mails, notes et fiches de mise en demeure émanant des supérieurs hiérarchiques de la requérante, ainsi que de magistrats ou d'auxiliaires de justice amenés à travailler avec elle, qu'au cours des années 2004 à 2007, MmeC..., d'une part, n'a pas fourni, à de nombreuses reprises, le travail attendu d'elle, tout en entretenant des relations conflictuelles avec un certain nombre de ses collègues et interlocuteurs et, d'autre part, qu'elle a, par des agissements répétés, témoigné de son irrespect pour sa hiérarchie, dans le dialogue quotidien comme pour la prise de ses congés ou la transmission d'informations ; que ces faits ressortent également des fiches de notation de la requérante, en particulier pour les années 2004 et 2005 ; qu'enfin, l'existence alléguée de dysfonctionnements au sein de la Cour d'appel de Paris ne saurait remettre en cause la réalité des faits reprochés à Mme C...qui, pris dans leur ensemble, sont constitutifs d'une faute de nature à justifier une sanction ;
11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes (...) Deuxième groupe : / - la radiation du tableau d'avancement ; / - l'abaissement d'échelon ; / - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; / - le déplacement d'office " ; qu'eu égard au caractère répété et à la gravité des faits précédemment énoncés, qui nuisent directement à la bonne marche du service public, il ne ressort pas des pièces du dossier que le garde des sceaux, ministre de la justice, aurait, en prononçant à l'encontre de Mme C...la sanction de l'abaissement d'échelon, entaché sa décision d'une disproportion manifeste ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée, en tout état de cause, à invoquer l'illégalité de la décision du 12 novembre 2007 au soutien de conclusions indemnitaires ; qu'ainsi, c'est à bon droit et sans entacher sur ce point le jugement d'omission à statuer, que le tribunal a rejeté cette demande ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le garde de sceaux, ministre de la justice, que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de Mme C...tendant à l'annulation de la décision du 12 novembre 2007, n'appelle aucune mesure d'exécution ; qu'en conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à Mme C...la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
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N° 11PA00078