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06/07/2012 | FRANCE | N°11PA04592

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 06 juillet 2012, 11PA04592


Vu I°) enregistrée le 27 octobre 2011 sous le n°11PA04592, la requête présentée pour M. Savva A demeurant chez ..., par Me Lipietz ; M. A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°s 1101414/2,1101416/2 du 26 mai 2011 du Tribunal administratif de Melun en tant que ce jugement a rejeté partiellement sa demande en annulation de l'arrêté du 18 novembre 2010 du préfet de Seine-et-Marne lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination et a rejeté sa demande en annulation de la décision implicite d

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Vu I°) enregistrée le 27 octobre 2011 sous le n°11PA04592, la requête présentée pour M. Savva A demeurant chez ..., par Me Lipietz ; M. A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°s 1101414/2,1101416/2 du 26 mai 2011 du Tribunal administratif de Melun en tant que ce jugement a rejeté partiellement sa demande en annulation de l'arrêté du 18 novembre 2010 du préfet de Seine-et-Marne lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant le pays de destination et a rejeté sa demande en annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur sa demande tendant au bénéfice du regroupement familial pour son fils mineur ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de réexaminer sa situation et d'autoriser le regroupement familial dans un délai de 2 mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 2 000 euros à verser à son avocat, Me Lipietz ;

Vu, II°), enregistrée le 27 octobre 2011 sous le n° 11PA04694, la requête présentée pour Mme Ala B épouse A, demeurant chez ..., par Me Lipietz ; Mme B épouse A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°s 1101414/2, 1101416/2 du 26 mai 2011 du Tribunal administratif de Melun en tant que ce jugement a rejeté partiellement sa demande en annulation de l'arrêté du 18 novembre 2010 du préfet de Seine-et-Marne lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire et fixant la destination de cet éloignement, et a rejeté sa demande en annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur sa demande tendant au bénéfice du regroupement familial au profit de son fils mineur ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de réexaminer sa situation et d'autoriser le regroupement familial dans un délai de 2 mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 2 000 euros au profit de Me Lipietz ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

Vu l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2012 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur ;

- les conclusions de M. Gouès, rapporteur public ;

- et les observations orales de Me Lipietz, avocat de M. A et de Mme B épouse A

Considérant que les requêtes susvisées, enregistrées sous les n°s 11PA04592 et 11PA04694, respectivement présentées pour M. A et pour Mme B épouse A, sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Considérant que M. A, et Mme B épouse A, ressortissants moldaves, ont demandé leur admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ils ont également demandé le bénéfice du regroupement familial pour leur enfant mineur ; que, par arrêtés du 18 novembre 2010, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté leurs demandes d'admission au séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire et a fixé la destination de leur éloignement ; que M. et Mme A demandent la réformation du jugement du 26 mai 2011 par lequel le Tribunal administratif de Melun, d'une part , n'a que partiellement fait droit à leurs demandes dirigées contre les arrêtés en annulant seulement les décisions fixant le pays de renvoi, d'autre part, a rejeté leurs demandes dirigées contre le rejet tacite de leurs demandes tendant au bénéfice du regroupement familial pour leur enfant mineur ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que devant le tribunal administratif M. et Mme A avaient invoqué la méconnaissance, par les arrêtés attaqués, des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, en faisant notamment valoir qu'ils résidaient respectivement en France depuis les années 2002 et 2004 ; qu'en estimant que les justificatifs ainsi produits ne suffisaient pas à caractériser la présence habituelle en France des demandeurs, et alors qu'une telle présence est au nombre des éléments susceptibles de caractériser l'atteinte portée au droit des intéressés au respect de leur vie privée au sens des stipulations de la convention, le tribunal n'a pas soulevé d'office un moyen d'ordre public ; qu'ainsi, l'irrégularité invoquée n'est pas établie ;

Sur la légalité des arrêtés attaqués :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention "salarié", une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an (...)." ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, qui s'est substitué à l'article L. 341-2 de ce code: "Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail."; qu'aux termes enfin de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif à la délivrance, sans opposition de la situation de l'emploi, des autorisations de travail aux étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse : "La situation de l'emploi ou l'absence de recherche préalable de candidats déjà présents sur le marché du travail n'est pas opposable à une demande d'autorisation de travail présentée pour un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse souhaitant exercer une activité professionnelle dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur la liste annexée au présent arrêté " ;

Considérant qu'au regard de l'obligation de motiver les refus d'autorisation, imposée par l'article 1 de la loi susvisée du 11 juillet 1979, le préfet doit, s'il estime devoir rejeter une demande de carte de séjour temporaire présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 40 de la loi du 20 novembre 2007, faire connaître les motifs pour lesquels ladite demande est rejetée, en indiquant les faits de l'espèce qu'il retient ou écarte ; qu'à cette fin le préfet peut relever soit que la demande, faute de tendre à l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisée par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national, laquelle est aujourd'hui annexée à l'arrêté susmentionné du 18 janvier 2008, ne se situe pas dans le champ de l'admission exceptionnelle au séjour ainsi sollicitée, soit que les éléments de la situation personnelle de l'intéressé, qu'il lui appartient de préciser, tels que, par exemple, l'insuffisance de son expérience et de sa qualification professionnelles, l'absence de perspective réelle d'embauche pour l'intéressé dans l'une des activités susmentionnées, la faible durée de son séjour en France, font obstacle à ce que sa demande puisse être regardée comme relevant d'un motif exceptionnel;

Considérant, d'une part, que M. A avait, produit, à l'appui de sa demande d'admission exceptionnelle au séjour à titre professionnel, une promesse d'embauche en qualité de chef de chantier dans le bâtiment, activité qui, à la date de l'arrêté, figurait sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ; qu'en énonçant dans l'arrêté le concernant, d'une part, que la simple détention d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne constituait pas à elle seule un motif de régularisation, d'autre part, que l'intéressé, ne justifiait ni de diplômes ni d'ancienneté et d'expérience professionnelle dans l'emploi convoité, le préfet de Seine-et-Marne a suffisamment motivé son arrêté ;

Considérant, d'autre part, qu'à l'appui de sa demande, Mme A a produit une promesse d'embauche pour un emploi d'aide à domicile ; que l'activité correspondante ne figurait pas sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ; que, dans ces conditions, en indiquant dans l'arrêté la concernant que l'intéressée n'avait ni diplôme ni ancienneté ni expérience professionnelle, le préfet de Seine-et-Marne a également suffisamment motivé son arrêté ;

Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutiennent les requérants, les arrêtés en cause procèdent de l'examen personnalisé de leur situation ; qu'aucun texte législatif ou réglementaire n'obligeait le préfet à les convoquer au préalable en vue d'un entretien avec les agents chargés d'instruire leurs demandes ;

Considérant, en troisième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, l'emploi d'aide à domicile pour lequel Mme A a présenté une promesse d'embauche ne figurait pas sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ; qu'ainsi cette activité n'était pas caractérisée par des difficultés particulières de recrutement au sens de cet arrêté et n'était en conséquence pas sous tension ; qu'au surplus, la requérante ne conteste pas ne pas avoir d'expérience dans cet emploi ; que, par ailleurs, si l'emploi de chef de chantier qui figurait sur la liste annexée à l'arrêté susmentionné était sous tension, M A ne justifie, ni d'une formation spécifique pour l'exercice de cet emploi précis, ni d'une expérience professionnelle dans cet emploi ; qu'ainsi le préfet de Seine-et-Marne n'a pas commis d'erreur d'appréciation manifeste en estimant que leurs demandes d'admission exceptionnelle au séjour ne reposait pas sur un motif exceptionnel ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que M. et Mme A, respectivement nés en 1967 et 1972 et arrivés en France, selon leurs dires, en 2002 et 2004, n'allèguent pas être dépourvus d'attaches en Moldavie, où ils ont vécu jusqu'aux âges de 35 et de 32 ans ; qu'ils se maintiennent en situation irrégulière depuis leur arrivée en France ; que, dans ces conditions nonobstant leurs efforts allégués d'intégration, et les amis qu'ils auraient en France, aucune circonstance ne s'opposant à ce qu'ils poursuivent leur vie familiale en Moldavie avec leur fils de 16 ans, les arrêtés attaqués n'ont pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motif, les arrêtés ne procèdent pas d'une erreur d'appréciation manifeste de leurs conséquences sur la situation des intéressés ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que les arrêtés attaqués n'ont pas pour effet de séparer l'enfant des requérants de ses parents dès lors que rien ne s'oppose à ce qu'il les accompagne en Moldavie où il a vécu jusqu'en 2009 ; qu'ainsi les arrêtés ne méconnaissent pas l'intérêt supérieur de l'enfant au sens des stipulations précitées ;

Considérant, en sixième lieu, que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions permettant d'obtenir de plein droit un titre de séjour, et non de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ; que M. et Mme A ne remplissant pas ces conditions, la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie ;

Considérant, enfin, que les requérants n'invoquent aucun moyen à l'encontre du rejet implicite de leurs demandes tendant au bénéfice du regroupement familial au profit de leur fils ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes en annulation des arrêtés du préfet de Seine-et-Marne du 18 novembre 2010 ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme A sont rejetées ;

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N°s 11PA04592, 11PA04694

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA04592
Date de la décision : 06/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02-02 Étrangers. Expulsion. Motivation.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. GOUES
Avocat(s) : LIPIETZ ; LIPIETZ ; LIPIETZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2012-07-06;11pa04592 ?
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