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30/12/2011 | FRANCE | N°11PA01385

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 30 décembre 2011, 11PA01385


Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2011, présentée pour M. Cheickna A, demeurant ...), par Me Billonneau ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102278/8 du 17 février 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire

de séjour ;

...................................................................................

Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2011, présentée pour M. Cheickna A, demeurant ...), par Me Billonneau ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102278/8 du 17 février 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 février 2011 par lequel le préfet de police a décidé sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 88-1 ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 1er décembre 2011 par laquelle le président de la Cour a désigné M. Piot, magistrat, pour statuer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 14 décembre 2011 présenté son rapport et entendu :

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire exécutoire prise depuis au moins un an ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité malienne, a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français le 11 octobre 2007, laquelle lui a été notifiée le 25 octobre 2007 ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive n°2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée relatif au départ volontaire : 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les Etats membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / 3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours ; que le 7) de l'article 3 de la même directive définit ce risque de fuite comme le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par la loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l' objet de procédures de retour peut prendre la fuite ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive, intitulé éloignement : 1. Les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2. Si un Etat membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3. Les Etats membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) ; que le délai imparti aux Etats membres pour transposer cette directive expirait, en vertu du paragraphe 1 de son article 20, le 24 décembre 2010 ;

Considérant que les articles 7 et 8 de la directive cités ci-dessus énoncent des obligations en termes non équivoques, qui ne sont assorties d'aucune condition et ne sont subordonnées dans leur exécution ou dans leurs effets à aucun acte des institutions de l'Union européenne ou des Etats membres ;

Considérant que si les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans leur rédaction alors en vigueur, en ce qu'elles n'imposent pas qu'une mesure de reconduite à la frontière soit assortie d'un délai approprié pour le départ volontaire d'un ressortissant de pays tiers dans des cas autres que ceux prévus à l'article 7, paragraphe 4, de la directive, sont incompatibles avec les objectifs de ses articles 7 et 8, ces dispositions de cette directive ne font toutefois pas obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à l'encontre d'un ressortissant de pays tiers dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° du II de l'article L. 511-1, dès lors que cette mesure est assortie d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ; qu'elles ne font pas davantage obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise, sans être assortie d'un tel délai, dans les cas prévus aux 5°, 7° et 8° du même II de l'article L. 511-1, à la condition que ce délai réduit, voire l'absence de délai, soient justifiés par la situation du ressortissant de pays tiers, ou, dans le cas prévu au 3° du II, à la condition que l'obligation initiale de quitter le territoire ait été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions des articles 7 et 12 de la directive ;

Considérant que, comme indiqué précédemment, l'arrêté contesté du 14 février 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A a été pris sur le fondement des dispositions alors en vigueur du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et séjour des étrangers et du droit d'asile, ce qui n'impliquait pas nécessairement qu'il soit assorti d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ; que si cet arrêté ne comportait pas la mention d'un délai de départ volontaire, l'obligation initiale de quitter le territoire français du 11 octobre 2007, notifiée le 25 octobre 2007, sur laquelle il se fondait, était assortie d'un délai d'un mois, à l'expiration duquel il pourrait être reconduit d'office à la frontière ; que, par suite, l'obligation initiale de quitter le territoire national du 11 octobre 1007 a été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions des articles 7 et 12 de la directive du 16 décembre 2008 ; que M. A n'est dès lors pas fondé à soutenir que le préfet de police a méconnu les dispositions susanalysées de la directive n°2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui et qu'aux termes de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si M. A fait valoir qu'il vit en France depuis 2005 et que sa compagne a, le 1er décembre 2010, donné naissance à un enfant qu'il a reconnu, il ne justifie au dossier ni d'une vie commune avec la mère de l'enfant ni de la reconnaissance du nouveau né ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. A en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de police en date du 14 février 2011 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il n'est pas davantage entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de M. A n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour doivent être rejetées ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11PA01385 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 11PA01385
Date de la décision : 30/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marie PIOT
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : BILLONNEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-12-30;11pa01385 ?
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