Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2010 et le mémoire complémentaire enregistré le 27 octobre 2010, présentés pour Mme Jung Sook épouse demeurant ..., par Me Touloum ; Mme demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0915057 du 30 mars 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 septembre 2009 du préfet de police refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 avril 2011 :
- le rapport de Mme Samson, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public ;
Considérant que Mme , de nationalité nord-coréenne, a sollicité l'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que cette demande a été rejetée par décision notifiée le 3 décembre 2008, confirmée par décision du 17 juin 2009 de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'en conséquence, par arrêté du 3 septembre 2009, le préfet de police a refusé de délivrer à Mme le titre de séjour sollicité sur le fondement des articles L. 314-11 8° et L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays de destination ; que Mme relève appel de l'ordonnance du 30 mars 2010 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande sur le fondement de l'article R. 222-1- 7° du code de justice administrative ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : ...les présidents de formation de jugement des tribunaux ... peuvent, par ordonnance : ... 7º Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. ;
Considérant que, dans sa demande devant le Tribunal administratif de Paris, Mme faisait notamment valoir qu'elle craignait de subir des persécutions en cas de retour en Corée du Nord dès lors qu'elle a fui le régime communiste de ce pays ; que cette information précise n'était pas manifestement insusceptible de venir au soutien du moyen de légalité interne tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, opérant à l'encontre de la décision fixant le pays de destination d'une mesure d'éloignement ; que, dans ces conditions, le vice-président du Tribunal administratif de Paris, ne pouvait, comme il l'a fait par l'ordonnance attaquée, rejeter cette demande en application des dispositions du code de justice administrative précitées ; que, par suite, l'ordonnance du vice-président du Tribunal administratif de Paris du 30 mars 2010 doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de Mme devant le Tribunal administratif de Paris et sur ses conclusions devant la Cour ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision ; que le refus de titre de séjour litigieux comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ainsi que des éléments propres à la situation particulière de Mme ; que le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradant. ; et qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ;
Considérant, d'une part, que le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 3 précité est inopérant à l'encontre de la décision refusant de délivrer un titre de séjour à Mme , qui ne constitue pas une mesure d'éloignement, non plus qu'à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français qui, par elle-même, n'implique pas un retour dans le pays d'origine ;
Considérant, d'autre part, que Mme , ressortissante nord-coréenne, soutient qu'elle a subi des oppressions de la part des autorités communistes de son pays et qu'en cas de retour elle craint pour sa vie personnelle car elle sera considérée comme traitre et condamnée à mort ; que la réalité des dangers encourus par Mme , confirmée par les documents qu'elle produit, n'est pas contestée ; que, dans ces conditions, Mme doit être regardée comme établissant qu'elle risquait, à la date de l'arrêté litigieux, d'être soumise à des traitements prohibés par l'article 3 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ; que ses conclusions tendant à l'annulation de la décision désignant le pays dont elle a la nationalité comme destination d'une éventuelle reconduite à la frontière doivent par suite être accueillies ; qu'en revanche, cette annulation n'implique pas nécessairement que le préfet de police lui délivre une autorisation provisoire de séjour ; que les conclusions de Mme tendant à qu'il soit fait injonction au préfet de lui délivrer une telle autorisation doivent par suite être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 septembre 2009 du préfet de police désignant le pays dont elle a la nationalité comme destination d'une éventuelle reconduite à la frontière ;
D E C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 0915057 du 30 mars 2010 du vice-président du Tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : L'article 3 de l'arrêté du 3 septembre 2009 du préfet de police désignant le pays dont Mme a la nationalité comme destination d'une éventuelle reconduite à la frontière est annulé.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de Mme est rejeté.
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N° 10PA02119