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23/12/2010 | FRANCE | N°08PA05504

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 23 décembre 2010, 08PA05504


Vu le recours, enregistré par télécopie le 5 novembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 6 novembre suivant, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0211290/2 du 8 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accordé à The Church of Scotland Trust la restitution, pour la somme de 189 708, 93 euros, du prélèvement prévu à l'article 24

4 bis A du code général des impôts à raison de la cession, au titre de...

Vu le recours, enregistré par télécopie le 5 novembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 6 novembre suivant, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ; le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la Cour :

1°) à titre principal, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement n° 0211290/2 du 8 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accordé à The Church of Scotland Trust la restitution, pour la somme de 189 708, 93 euros, du prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts à raison de la cession, au titre de l'année 1999 d'un immeuble situé 17 rue Bayard à Paris ;

2°) de rétablir The Church of Scotland Trust au prélèvement prévu par l'article 244 bis A du code général des impôts à raison de 189 708, 93 euros ;

3°) à titre subsidiaire de limiter la restitution ordonnée en première instance à 186 659,95 euros ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'article 55 de la Constitution ;

Vu la convention entre la République française et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur les revenus du 22 mai 1968 modifiée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2010 :

- le rapport de Mme Merloz, rapporteur,

- et les conclusions de M. Gouès, rapporteur public ;

Considérant que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE fait appel du jugement du 8 juillet 2008 par lequel le tribunal administratif a fait droit à la demande de " The Church of Scotland Trust " (le trust de l'Eglise d'Ecosse) et a prononcé la restitution du prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts auquel a donné lieu en 1999 la cession par le trust d'un immeuble situé 17 rue Bayard à Paris (75008) pour un montant de 189 708,93 euros, au motif que les stipulations de l'article 25 de la convention alors applicable du 22 mai 1968 conclue entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu faisaient obstacle à ce que ce trust soit imposé en France au prélèvement d'un tiers sur les plus-values réalisées lors de la cession d'immeubles sur le fondement des dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts ;

Sur l'application de la convention franco-britannique :

Considérant qu'aux termes de l'article 25 de la convention fiscale signée entre la France et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord le 22 mai 1968 modifiée alors applicable : " 1. Les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat contractant à aucune imposition ou obligation y relative qui soit différente ou plus lourde que celle à laquelle sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre Etat se trouvant dans la même situation. 2. Le terme " national " désigne : a) en ce qui concerne le Royaume-Uni : [...] ii) Toute personne morale, association ou autre entité constituée conformément à la législation en vigueur au Royaume-Uni [...] " ;

Considérant que " The Church of Scotland Trust " a été constitué par une loi spéciale adoptée par le Parlement de Westminster en 1932, " The Church of Scotland Trust Order Confirmation Act 1932 " ; qu'il suit de là qu'il entre dans le champ d'application de la clause de non-discrimination garantie par l'article 25 précité de la convention fiscale franco-britannique, sans qu'y fasse obstacle la circonstance invoquée par le MINISTRE que ce trust serait dépourvu de personnalité morale ;

Considérant, qu'il résulte des dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige, que sont soumis au prélèvement qu'elles instituent les personnes morales ou organismes dont le siège social est situé hors de France ; que, par suite, la différence de traitement qu'instaurent ces dispositions est fondée, s'agissant des personnes morales ou organismes, sur le lieu de leur siège social qui détermine leur nationalité ;

Considérant, qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, (...) toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif.1 bis .(...) 5. Sous réserve des exonérations prévues aux articles 1382 et 1394, (...) les associations et collectivités non soumis à l'impôt sur les sociétés en vertu d'une autre disposition sont assujettis audit impôt en raison : a. De la location des immeubles bâtis et non bâtis dont ils sont propriétaires, et de ceux auxquels ils ont vocation en qualité de membres de sociétés immobilières de copropriété visées à l'article 1655 ter (1) ; b. De l'exploitation des propriétés agricoles ou forestières ; c. Des revenus de capitaux mobiliers dont ils disposent - à l'exception des dividendes des sociétés françaises - lorsque ces revenus n'entrent pas dans le champ d'application de la retenue à la source visée à l'article 119 bis ; ces revenus sont comptés dans le revenu imposable pour leur montant brut ; d. Des dividendes des sociétés immobilières et des sociétés agréées visées aux 3° ter à 3° sexies de l'article 208 et à l'article 208 B perçus à compter du 1er janvier 1987. Ces dividendes sont comptés dans le revenu imposable pour leur montant brut " ;

Considérant qu'il résulte des 1 et 5 de l'article 206 du code général des impôts qu'un organisme français sans but lucratif qui procède à la cession d'un immeuble qu'il détient en France n'est pas assujetti à l'impôt sur les sociétés sur l'éventuelle plus-value réalisée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'acte constitutif du trust et des textes le régissant ainsi que de ses états financiers afférents aux années 1999 à 2001, documents dont le MINISTRE demandait expressément la production, que le trust qui a son siège au Royaume-Uni a pour objet la gestion, pour le compte de l'Eglise d'Ecosse, d'un patrimoine immobilier en dehors du Royaume-Uni, activité consistant à mettre à disposition gratuitement des immeubles aux congrégations pratiquant le culte anglican en dehors du Royaume-Uni, et agit comme " trustee " dans un certain nombre de trusts charitables dont l'activité bénéficie à l'Eglise d'Ecosse ; que, par ailleurs, il ne distribue aucun résultat et ses dirigeants ne bénéficient d'aucune rémunération ni d'aucun avantage particulier ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient le MINISTRE, qui n'a produit aucune observation en réponse à la communication des documents produits par l'intimé, ce dernier ne peut être regardé comme exerçant une activité à but lucratif au sens du 1 de l'article 206 du code général des impôts ;

Considérant que l'application au trust de l'Eglise d'Ecosse des dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts a pour effet de soumettre celui-ci, en raison de sa nationalité, à une imposition plus lourde que celle à laquelle est assujetti un organisme français sans but lucratif qui aurait réalisé la même opération ; que, dès lors, le MINISTRE n'est pas fondé à soutenir que le " Church of Scotland Trust " se trouvait, en ce qui concerne l'opération génératrice du prélèvement litigieux, dans une situation différente de celle d'organismes français réalisant le même type d'opérations ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont estimé qu'en lui appliquant les dispositions de l'article 244 bis A précité du code général des impôts, l'administration a méconnu la clause de non-discrimination prévue par les stipulations de l'article 25 précité de la convention franco-britannique susvisée ;

Sur le montant du prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est pas d'ailleurs contesté par l'intimé, que le prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts qu'il a acquitté s'est élevé à la somme de 186 659, 95 euros (1 224 409 francs) et non à celle de 189 708, 93 euros (1 244 409 francs), comme indiqué par erreur par le Tribunal administratif de Paris dans le jugement attaqué ; que, le MINISTRE est, dès lors, fondé à demander que la restitution du prélèvement soit limitée à la somme de 186 659, 95 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est seulement fondé à demander à ce que le jugement attaqué soit réformé en raison de l'erreur commise sur le montant de la restitution ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par " The Church of Scotland Trust " et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La restitution accordée à " The Church of Scotland Trust " par le jugement n°0211290/2 du Tribunal administratif de Paris du 8 juillet 2008 est ramenée à la somme de 186 659, 95 euros (cent quatre-vingt-six mille six cent cinquante-neuf euros et quatre-vingt-quinze centimes).

Article 2 : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Paris du 8 juillet 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à " The Church of Scotland Trust " la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 08PA05504

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA05504
Date de la décision : 23/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: Mme Marie-Gabrielle MERLOZ
Rapporteur public ?: M. GOUES
Avocat(s) : VALLÉE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-12-23;08pa05504 ?
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