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05/10/2009 | FRANCE | N°09PA01312

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 05 octobre 2009, 09PA01312


Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2009, présentée pour M. Fadil A, demeurant chez M. B ..., par Me Gryner-Levy ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900474/9 en date du 30 janvier 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 23 janvier 2009 décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination ;

2°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de s

éjour sous astreinte de 75 euros par jour de retard à compter de la notification de l'...

Vu la requête, enregistrée le 9 mars 2009, présentée pour M. Fadil A, demeurant chez M. B ..., par Me Gryner-Levy ;

M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900474/9 en date du 30 janvier 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 23 janvier 2009 décidant sa reconduite à la frontière et fixant la Turquie comme pays de destination ;

2°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 75 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 septembre 2009 :

- le rapport de M. Piot, magistrat désigné,

- et les conclusions de Mme Dely, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant turc, fait appel du jugement en date du

30 janvier 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 23 janvier 2009 par lequel le préfet du Val-de-Marne a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé la Turquie comme pays de renvoi ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, devant le premier juge, M. A a soulevé le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui n'était pas inopérant au regard des conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a entaché son jugement d'une omission à statuer ; que par suite, le jugement attaqué doit être annulé en tant qu'il est entaché de cette omission de statuer ;

Considérant qu'il y a lieu, pour la cour, de se prononcer immédiatement sur ces conclusions par voie d'évocation et de statuer sur les autres conclusions par l'effet dévolutif de l'appel ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté attaqué :

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé : L'autorité administrative compétente peut par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité turque, ne justifiait à la date de son interpellation, ni d'une entrée régulière sur le territoire français, ni d'un titre de séjour en cours de validité sur ce territoire ou sur celui d'un des autres Etats parties à la convention d'application de l'accord de Schengen signée le 19 juin 1990 ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées, le préfet peut décider sa reconduite à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que, pour demander l'annulation de la décision de reconduite à la frontière, M. A fait valoir qu'il réside en France depuis 1998 ; qu'il y vit en concubinage avec une compatriote ainsi que leur enfant né en France, le 7 septembre 2007 ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que la régularité du séjour de la concubine de l'intéressé n'est pas démontrée ; que, dès lors, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale soit reconstituée dans un autre pays ; que le requérant n'établit pas davantage être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il ne démontre pas sa présence continue sur le territoire français depuis 1998 ; qu'eu égard à l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du

23 janvier 2009, décidant la reconduite à la frontière de M. A n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que M. A fait valoir qu'il est le père d'un enfant né en France ; que cette circonstance ne fait toutefois pas obstacle à ce que l'enfant, qui encore très jeune, accompagne son père dans son pays d'origine ; que le requérant n'établit pas que l'enfant ne pourrait y être scolarisé et y continuer une vie normale ; que l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision de reconduite à la frontière porte une atteinte contraire à l'intérêt supérieur de son enfant, né en France ; que, par suite ladite décision n'a pas été prise en méconnaissance des stipulations susvisées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrête litigieux ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué mentionne que M. A sera reconduit à destination du pays dont il a la nationalité ; qu'il doit, dès lors, être regardé comme fixant la Turquie comme pays de destination ; que si M. A fait valoir qu'en raison de son appartenance à la minorité kurde, sa vie est menacée en cas de retour dans son pays d'origine, il ressort des pièces du dossier que le requérant a fait l'objet d'une décision du directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 17 juin 1999 rejetant sa demande d'admission au statut de réfugié, décision confirmée par la commission des recours des réfugiés le 27 octobre 1999, qu'il a demandé en 2006 le réexamen de sa demande d'admission au bénéfice de l'asile politique, que le directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides lui a, de nouveau, opposé un refus le 9 novembre 2006 confirmé par la commission des recours des réfugiés le 25 avril 2007 ; que, dans les circonstances de l'espèce, le requérant qui ne produit pas en appel d'éléments nouveaux ne peut être regardé comme personnellement menacé dans son pays d'origine ; que, par suite, la décision fixant la Turquie comme pays de destination de la reconduite à la frontière n'est pas entachée d'illégalité au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision attaquée en tant qu'elle fixe le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet du Val-de-Marne délivre une autorisation provisoire de séjour à M. A ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre des frais irrépétibles :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme demandée par M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement susvisé en date du 30 janvier 2009 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 23 janvier 2009 fixant la Turquie comme pays de renvoi.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Melun tendant à l'annulation de la décision du 23 janvier 2009 fixant la Turquie comme pays de renvoi et le surplus des conclusions de la requête présentée par M. A sont rejetés.

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N° 09PA01312


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 09PA01312
Date de la décision : 05/10/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marie PIOT
Rapporteur public ?: Mme DELY
Avocat(s) : SELARL GRYNER-LEVY ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2009-10-05;09pa01312 ?
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