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18/09/2007 | FRANCE | N°06PA00669

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 18 septembre 2007, 06PA00669


Vu la requête, enregistrée le 20 février 2006, présentée pour M. Henri X demeurant ..., par Me X ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0111563/5-1 du 16 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 décembre 1988 par laquelle il a reçu une nomination pour ordre, celle du 23 janvier 1990 et l'arrêté du 21 juin 1994 par lesquels il a été mis à disposition du centre des hautes études sur l'Afrique et l'Asie modernes puis de la délégation générale pour l'armement, la décis

ion en date du 6 mars 2001 par laquelle le ministre de la défense l'a radié de...

Vu la requête, enregistrée le 20 février 2006, présentée pour M. Henri X demeurant ..., par Me X ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0111563/5-1 du 16 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 décembre 1988 par laquelle il a reçu une nomination pour ordre, celle du 23 janvier 1990 et l'arrêté du 21 juin 1994 par lesquels il a été mis à disposition du centre des hautes études sur l'Afrique et l'Asie modernes puis de la délégation générale pour l'armement, la décision en date du 6 mars 2001 par laquelle le ministre de la défense l'a radié des cadres à compter du 1er février 2001, ensemble la décision du 12 juin 2001 par laquelle le directeur de l'administration du ministère de la défense a rejeté le recours gracieux formé à l'encontre de cette décision-ci, à ce qu'il soit réintégré au sein de la direction générale de la sécurité extérieure et que sa carrière soit reconstituée à compter du mois de décembre 1987, à ce que soit fait appliquer la décision de la commission centrale d'aptitude de le désigner chef de la subdivision recherche et opérations pour le renseignement économique et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 3 000 000 de francs en réparation du préjudice moral qu'il a subi à la suite des nombreuses fautes commises par l'administration à son encontre ;

2°) de faire droit à ses conclusions de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………...…………………………………………………………………………

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 53-39 du 3 février 1953 modifiée ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2007 :

- le rapport de M. Lelièvre, rapporteur,

- les observations de Me X, pour M. X,

- et les conclusions de Mme Régnier-Birster, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre de la défense a produit devant le Tribunal administratif de Paris, le dernier jour précédant la clôture de l'instruction, plusieurs procès-verbaux indiquant que M. X avait pris connaissance du décret du 27 novembre 1967 portant statut spécial des fonctionnaires visés par la loi du 3 février 1953 ; que le requérant ayant antérieurement pris connaissance de ces documents, qu'il avait signés et le tribunal administratif s'étant prononcé expressément, à la demande de l'intéressé, sur l'authenticité desdits documents, M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été pris en méconnaissance du principe contradictoire de la procédure ;

Considérant que le Tribunal administratif de Paris, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments présentés par M. X à l'appui de ses moyens, ni aux moyens inopérants, a répondu de façon suffisamment motivée et sans omission à statuer, à l'ensemble des moyens opérants soulevés par M. X à l'appui de sa demande ;

Considérant toutefois que les premiers juges ont omis de statuer expressément sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice résultant de l'absence d'affectation de M. X entre décembre 1988 et janvier 1990 ; que le jugement est irrégulier sur ce seul point et doit être annulé partiellement pour ce motif ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur lesdites conclusions ;

Sur les conclusions tendant à ce que soit « appliquée la décision de la commission centrale d'aptitude de décembre 1987 » :

Considérant qu'à supposer même, ce qui n'est pas établi, qu'une commission centrale d'aptitude ait nommé M. X « chef de la subdivision recherche et opération » à la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) du ministère de la défense au mois de décembre 1987, les conclusions tendant à ce que cette décision soit « appliquée », qui n'entrent pas dans le champ d'application des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative relatifs à l'injonction de prendre des mesures d'exécution d'une décision juridictionnelle, ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions indemnitaires relatives à la décision de mutation du 15 septembre 1988 :

Considérant que M. X soutient, sans être contredit sur ce point, qu'il a été nommé le 15 septembre 1988 à des fonctions comportant des attributions réduites et le plaçant sous l'autorité d'un de ses anciens stagiaires ; que l'intéressé n'ayant été placé dans cette situation que provisoirement, pendant une durée de deux mois, il n'établit pas, dans les circonstances de l'espèce, avoir subi un préjudice moral ; que par suite, les conclusions susmentionnées doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur les conclusions relatives à la situation de M. X du mois de décembre 1988 au mois de janvier 1990 :

Considérant que si M. X, affecté par décision du 7 décembre 1988 à la direction du personnel, soutient qu'il aurait été affecté à ce poste pour ordre, il n'apporte aucune pièce probante à l'appui de cette allégation ; qu'il n'est ainsi fondé à demander ni l'annulation de cette décision d'affectation, ni la condamnation de l'Etat à réparer le préjudice qu'il estime avoir subi ;

Sur les conclusions indemnitaires relatives à la lettre de démission datée du 1er février 1990 :

Considérant que s'il résulte de l'instruction que M. X a rédigé une lettre de démission, datée du 1er février 1990, qui a été conservée par l'administration, il n'est pas établi que l'intéressé aurait été contraint de rédiger un tel courrier, dont le ministère de la défense ne s'est d'ailleurs jamais servi ; que, par suite, l'administration n'ayant commis aucune faute, les conclusions indemnitaires présentées à ce titre par M. X doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés de mise à disposition du 23 janvier 1990 et 21 juin 1994 :

Considérant, d'une part, que l'article 2 de la loi n° 53-39 du 3 février 1953 susvisée a soustrait les fonctionnaires des corps à l'un desquels appartenait le requérant des dispositions de la loi du 19 octobre 1946 relative au statut général des fonctionnaires ; que ces dispositions n'ont fait l'objet d'aucune abrogation expresse et ne sauraient être regardées comme ayant été implicitement abrogées par l'intervention de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ou de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ; qu'il s'ensuit que tant ces textes législatifs que les textes réglementaires pris pour leur application ne sont pas opposables et ne peuvent être invoqués par les fonctionnaires susmentionnés ; que, d'autre part, en l'absence de publication au journal officiel de la République française, le décret du 27 novembre 1967 portant statut spécial des fonctionnaires visés par la loi du 3 février 1953, susvisée, ne peut acquérir force obligatoire à l'égard de ces derniers qu'après avoir fait l'objet d'une notification complète et individuelle aux intéressés ; que ce texte leur est opposable dès lors que cette notification est antérieure à la décision prise à leur encontre ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le décret du 27 novembre 1967 a été notifié dans son intégralité à M. X le 1er août 1988 ; que, dans ces conditions, à supposer même que l'administration n'aie pas procédé à cette notification lors de l'entrée en service du requérant en 1973 et sans qu'il soit besoin de statuer sur la demande d'inscription en faux qui ne porte que sur l'authenticité du procès-verbal de notification lors de cette entrée en fonction, ledit décret a acquis force obligatoire à son égard ; que M. X étant soumis au statut particulier des fonctionnaires visés par la loi susvisée du 3 février 1953, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article 14 de la loi du 11 janvier 1984 et de l'article 44 du décret du 16 septembre 1985 sont inopérants ;

Sur les conclusions relatives à la situation de M. X du 1er août 1993 au 1er juillet 1994 :

Considérant que, sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le ministre de la défense n'a pas procédé, à l'expiration de sa mise à disposition auprès du centre des hautes études sur l'Afrique et l'Asie modernes le 1er août 1993, à la nomination de M. X dans un emploi correspondant à son grade ; que l'intéressé n'a pas reçu de nouvelle affectation avant le 1er juillet 1994 ; que le ministre ne soutient pas que le statut particulier de ce fonctionnaire lui permettait de ne pas procéder à une telle affectation ; que toutefois, il ne résulte pas de l'instruction qu'en s'abstenant de donner à M. X une affectation pendant une durée de onze mois, l'administration aurait dépassé le délai raisonnable qui lui était imparti et aurait ainsi commis une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Sur la protection de l'administration :

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. X aurait demandé le bénéfice de la protection juridique de l'administration ; qu'ainsi, l'intéressé n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que le ministre de la défense aurait commis une faute en refusant de le protéger des atteintes dont il aurait été victime ;

Sur l'accès au dossier administratif :

Considérant que M. X ne soutient pas que les dispositions dérogatoires de son statut, déterminé par le décret du 27 novembre 1967 modifié, lui conféreraient un droit d'accès à l'intégralité de son dossier administratif ; que, par suite, le requérant, n'est en tout état de cause, pas fondé à soutenir que le ministre de la défense aurait commis une faute en ne lui donnant pas accès à l'ensemble de ce dossier ;

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 6 mars 2001 de radiation des cadres, confirmé sur recours gracieux le 12 juin 2001 et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté du 15 mai 2000, conférant au chef de service, signataire de l'arrêté contesté, délégation de signature pour signer tous arrêtés ressortissants aux attributions de la direction de l'administration, qu'il n'a pas été publié au journal officiel de la République française ; que le ministre de la défense n'allègue pas que le décret du 27 novembre 1967 portant statut spécial des fonctionnaires visés par la loi susvisée du 3 février 1953 dispenserait l'administration de publier les arrêtés de délégation de signature concernant la direction générale de la sécurité extérieure ; qu'ainsi, l'arrêté du 7 mars 2001 par lequel le chef de service a prononcé la radiation des cadres de M. X à compter du 1er février 2001 est entaché d'incompétence ; que par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté, ensemble la décision en date du 12 juin 2001 de rejet de son recours gracieux, et à demander pour ce motif l'annulation partielle dudit jugement ;

Considérant que M. X n'ayant pas demandé le renouvellement de sa disponibilité dans les délais prescrits par le décret du 27 novembre 1967, la mesure de radiation des cadres qui a été prise à son encontre est justifiée sur le fond ; que par suite, les conclusions indemnitaires présentées par l'intéressé ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique pas qu'il soit procédé à la reconstitution de carrière de M. X ; qu'il implique seulement que le ministre de la défense se prononce à nouveau sur la situation du requérant compte tenu de l'annulation, par le présent arrêt, de la décision de radiation des cadres en date du 7 mars 2001 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X une somme de 1 500 euros au titre des dispositions susvisées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 16 décembre 2005 est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice résultant de l'absence d'affectation de M. X entre décembre 1988 et janvier 1990 et qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté du 6 mars 2001 de radiation des cadres, confirmé sur recours gracieux le 12 juin 2001.

Article 2 : L'arrêté du 6 mars 2001 de radiation des cadres de M. X, ensemble la décision du 12 juin 2001 de rejet de son recours gracieux, sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de la défense de se prononcer à nouveau sur la situation administrative de M. X dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Le ministre de la défense tiendra le greffe de la cour (service de l'exécution) immédiatement informé des dispositions prises pour y répondre.

Article 4 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 06PA00669


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 06PA00669
Date de la décision : 18/09/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré COROUGE
Rapporteur ?: M. Francois LELIEVRE
Rapporteur public ?: Mme REGNIER-BIRSTER
Avocat(s) : FONTANA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-09-18;06pa00669 ?
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